L’INVENTION DIABOLIQUE (1958)

Le cinéaste-magicien Karel Zeman adapte Jules Verne et immerge ses acteurs dans des décors aux allures de gravures du 19ème siècle…

VYNALEZ ZKATY

 

1958 – TCHÉCOSLOVAQUIE

 

Réalisé par Karel Zeman

 

Avec Lubor Tokos, Miroslav Holub, Jana Zatloukalova, Arnost Navratil, Frantisek Cerny, Václav Kyzlink, Vanislov Kuvlov

 

THEMA MONSTRES MARINS

Derrière ce titre qu’on croirait directement issu d’une aventure de « Blake et Mortimer » se cache une adaptation de l’univers de Jules Verne, romancier favori de Karel Zeman. Même si l’œuvre officiellement adaptée est « Face au drapeau », on y trouve également des éléments empruntés aux deux récits consacrés au Capitaine Némo. L’Invention diabolique nous parle ainsi du professeur Roch qui a trouvé le moyen de domestiquer l’énergie atomique. Il est enlevé ainsi que son assistant par le docteur Artigas qui rêve de dominer le monde. L’assistant, Hart, réussit à s’enfuir, avec une jeune fille rescapée d’un naufrage criminel, du cratère d’une île volcanique, repère de l’aventurier. La flotte d’intervention venue les secourir semble promise à la destruction, à moins que le professeur Roch ne parvienne à sauter l’île d’Artigas… Si l’expression tant galvaudée « livre d’images animé » devait être attribuée à un film en particulier, ce serait bien celui-là. Les images en question sont les gravures hachurées du début du siècle qui illustraient les romans de Jules Verne chez les éditions Hetzel.

Avec l’art qu’on lui connaît, Karel Zeman a récupéré ces gravures et y a intégré ses comédiens, via une combinaison très variée de trucages qui sont sa spécialité : double expositions, surimpressions, dessins animés, maquettes, animation en volume, décors spéciaux, photos animées… ce bric à brac possède une singulière unité, et un charme inédit dans la mesure où un tel choix artistique et technique est assez unique. Même si certaines lignes de cache sont visibles et certaines surimpressions transparentes, il est souvent difficile de départager le vrai du faux dans les plans du film. Certaines scènes sont assez mémorables, comme le sous-marin éperonnant un galion, le duel à l’épée des scaphandriers, l’arrivée sur l’île-volcan, ou encore la poursuite des deux submersibles. Et, ce qui ne gâte rien, le film regorge d’humour. Témoin cette scène où le héros, après une rude escalade à flanc de façade, parvient à la fenêtre de la demoiselle qu’il vient sauver, laquelle lui demande de l’attendre dehors un instant, le temps qu’elle passe une tenue plus habillée.

L’attaque de la pieuvre géante

Fidèle à ses habitudes, Karel Zeman nous offre de belles apparitions fantasmagoriques via l’usage de l’animation image par image. On voit notamment des nuées d’oiseaux qui traversent le ciel, un effet qui deviendra une marque de fabrique du cinéaste. Mais le morceau de bravoure du film est l’attaque d’une pieuvre géante inspirée par 20 000 lieues sous les mers. Le monstre marin émerge d’une caverne souterraine et attrape un homme dans l’un de ses tentacules. Le montage s’amuse alors à alterner habilement les comédiens et des figurines à leur effigie. L’Invention diabolique est certainement l’une des œuvres maîtresses de Karel Zeman, un véritable festival qui montre toute l’étendue de son talent, de son imagination et de son inventivité. En France, il fut également distribué sous le titre Aventures fantastiques. Trois ans plus tard, les Américains remontent le film, changent le nom des personnages et modifient quelques scènes pour pouvoir le sortir sous le titre The Fabulous World of Jules Verne.

 

© Gilles Penso


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