Christopher Lee nous sert de guide dans cette histoire de village embrumé porteur d’une lourde malédiction ancestrale…
THE CITY OF THE DEAD / HORROR HOTEL
1960 – GB
Réalisé par John Moxey
Avec Venetia Stevenson, Christopher Lee, Patricia Jessel, Dennis Lotis, Tom Naylor, Betta St John, Valentine Dyall
THEMA SORCELLERIE ET MAGIE
Icône de la firme Hammer grâce à ses prestations inoubliables dans Frankenstein s’est échappé, Le Cauchemar de Dracula, Le Chien des Baskerville et La Malédiction des pharaons, Christopher Lee tourne en 1960 dans La Cité des morts pour la firme Vulcan Productions, alors sur le point d’être rebaptisée Amicus et de devenir le principal concurrent de la Hammer. Sous la direction de John Moxey, il incarne Allan Driscoll, un professeur d’histoire féru de sciences occultes qui conseille à l’une de ses étudiantes les plus assidues, Nan Barlow (Venetia Stevenson), de visiter le village de Whitewood, ou fut jadis brûlée la sorcière Elizabeth Selwyn. « La base du conte de fée est la réalité, et la base de la réalité est le conte de fée » affirme Driscoll pour convaincre le frère d’Ann, un scientifique renommé, que les histoires de sorcellerie ne sont pas des balivernes. La belle Nan ne va pas tarder à en faire les frais en gagnant ce village nocturne gorgé de fumigènes où chaque autochtone semble porter un lourd secret. S’agirait-il de la malédiction proférée par la suppliciée trois siècles plus tôt ? La jeune fille s’installe dans le seul hôtel du coin, le River’s Inn, tenu par l’austère Miss Newless (Patricia Jessel). Le spectateur attentif constatera que Newless épelé à l’envers donne Selwyn, ce qui ne peut-être qu’un mauvais présage…
Avec un certain talent, John Moxey entretient l’étrangeté et le malaise lorsque l’intrigue se transporte à Whitewood. La brume stagne obstinément dans les rues sombres, les passants hagards y traînent comme des âmes en peine, et le seul révérend du village vit aveugle et reclus dans une église abandonnée. Malgré des moyens limités, le film cultive ainsi un esthétisme et une photogénie de tous les instants, jouant sur le contraste du joli minois blond et souriant de son actrice principale avec les ténèbres, les ombres et la noirceur du village maudit. De beaux tableaux, comme cette procession encapuchonnée dans le cimetière brumeux, ponctuent le métrage, agrémenté d’audacieux effets de montage elliptiques. Comme en outre la bande originale se teinte de sonorités jazzy, en accord avec les goûts du début des années 60, La Cité des morts évoque souvent les films fantastiques que Roger Corman réalisa à la même époque.
Ma sorcière mal aimée
Le Psychose d’Alfred Hitchcock nous vient aussi à l’esprit, dans la mesure où la structure scénaristique de La Cité des morts s’en approche considérablement. Dans les deux cas, la blonde héroïne quitte son environnement familier pour s’aventurer dans un hôtel étrange, puis disparaît de la circulation, les protagonistes devenant alors ses proches menant l’enquête sur place (le fiancé et la sœur chez Hitchcock, le petit ami et le frère ici). Psychose et La Cité des morts étant sorti quasi simultanément sur les écrans, il est difficile de savoir si ces similitudes sont volontaires ou fortuites. Le film s’achève sur un climax spectaculaire, la croix portée par l’un des héros lançant des rayons enflammés sur les sorciers tout de noir vêtus. A vrai dire, Christopher Lee reste la plupart du temps à l’arrière-plan, laissant à Patricia Jessel le loisir d’incarner le Mal sous la double identité d’Elizabeth Selwyn/Newless.
© Gilles Penso
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