Trois siècles après son exécution, un sorcier maléfique revient sur Terre sous la forme d’un monstre improbable…
EL BARON DEL TERROR
1961 – MEXIQUE
Réalisé par Chano Urveta
Avec Abel Salazar, German Robles, Rosa Maria Gallardo, Ariadna Welter, David Silva, Luis Aragon, Mauricio Garces, Rene Cardona
THEMA SORCELLERIE ET MAGIE
Après trois films consacrés aux suceurs de sang (Les Proies du vampire, Le Retour du vampire et Le Monde des vampires), le fort prolifique producteur Abel Salazar persévère dans la voie du folklore fantastique, les amateurs d’hémoglobine aux dents longues cédant cette fois le pas aux malédictions ancestrales en tout genre. Premier de cette nouvelle série, Le Baron de la terreur met en scène le maléfique Bertélius, brûlé vif par l’inquisition mexicaine en 1661 pour ses nombreuses exactions, blasphèmes et perversions. 300 ans plus tard, le sinistre baron revient sur Terre pendant le passage d’une comète. Respectable aristocrate aux yeux de la société, il se mue régulièrement en monstre hideux pour tuer les descendants de ceux qui le condamnèrent jadis. Le Baron de la terreur est entré dans la légende pour son monstre au design franchement improbable. Qu’on en juge : une peau velue, un nez exagérément crochu, des canines proéminentes, des oreilles pointues, des ventouses à la place des mains et une langue de serpent démesurée qui lui sert à perforer le crâne de ses victimes pour leur aspirer le cerveau !
Sous son apparence humaine, le baron est incarné par Abel Salazar en personne, qui fut acteur de la plupart des films qu’il produisit, et qui s’octroie ici l’un de ses meilleurs rôles. Loin des faire-valoir comiques ou des silhouettes dispensables dont il se contenta souvent, Salazar déploie toute l’étendue de son talent, magnétisant l’écran avec presque autant de charisme que son confrère German Robles (héros sanglant des Proies du vampire), lequel est ici relégué au petit rôle de victime impuissante. Doté d’un redoutable pouvoir d’hypnotiseur, le baron Bertelius paralyse les hommes, séduit les femmes et conserve les cerveaux de ses proies dans une urne pour venir régulièrement s’y délecter avec une petite cuiller, histoire de se requinquer entre deux attaques ! Le Baron de la terreur ne recule ainsi devant aucun excès et contourne la faiblesse de ses moyens par de nombreuses astuces de mise en scène.
Sorbets de cerveaux à la petite cuiller !
Ainsi, les forêts sont reconstituées en studio avec une poignée de branchages tremblants, le grand bûcher du prologue fait appel à une maquette et à une dizaine de figurants, la météorite qui s’écrase est un gros morceau de carton, le panorama de l’observatoire est obtenu à l’aide d’une photo projetée derrière les acteurs… À ces bricolages ingénieux, le film ajoute quelques effets visuels simples mais très efficaces, notamment lorsque le visage des bourreaux apparaît furtivement sous leur cagoule d’inquisiteurs en fondu enchaîné, un procédé repris plus tard dans le récit pour montrer le visage des descendants devenir celui de leurs ancêtres. Le scénario se permet même quelques incartades potaches, comme lorsque les deux inspecteurs de police discutent de l’affaire dans un restaurant et déchantent quelque peu au moment où le serveur leur apporte des tacos de cervelle ! Les policiers surgiront au final telle la cavalerie pour occire le monstre à coup de lance-flammes. Bref, Le Baron de la terreur est une œuvre diablement distrayante, qui connut aux États-Unis les honneurs d’une distribution en salles sous le titre fort imagé de The Brainiac.
© Gilles Penso
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