Chaque fois qu’elle est hypnotisée, une jeune femme se transforme en monstre marin invraisemblable attaquant tous les humains qu’il croise…
THE SHE-CREATURE
1956 – USA
Réalisé par Edward L. Cahn
Avec Chester Morris, Marla English, Lance Fuller, Tom Conway, Cathy Downs, Ron Randell, Freda Inescort, Paul Dubov
THEMA MONSTRES MARINS
Extrêmement prolifique en ces joyeuses années 50, Edward L. Cahn inaugura avec The She-Creature un « cycle » consacré à divers monstres improbables. Plutôt tordu, son scénario mixe dans le désordre monstre marin humanoïde, hypnose, possession et réincarnation. Nous faisons ainsi connaissance avec le docteur Carlo Lombardi (incarné par un Chester Morris émule de Bela Lugosi qui n’hésite pas à en faire des tonnes). Ce médium de fête foraine hypnotise régulièrement une jeune femme prénommée Andrea (la délicieuse Mara English). A chaque séance, l’âme de la jolie cobaye transmigre vers le corps qu’elle habitait il y a des millions d’années, celui d’une bestiole mi-femme mi-poisson du plus ridicule aspect. Échappant à toute description, la créature ressemble vaguement à un homme trapu en armure écailleuse dont la tête grimaçante, aux grands yeux noirs surplombés de sourcils froncés, s’affuble de longues oreilles pointues, d’antennes et de mandibules pendantes.
L’auteur de ce costume hallucinant est le spécialiste des effets spéciaux bon marché Paul Blaisdell, pas vraiment subtil dans ses œuvres, on l’aura compris, mais non dénué d’imagination. Cahn et Blaisdell entameront dès lors une heureuse collaboration, et le costume de la créature hybride resservira sous diverses variantes (une antenne par ci, une perruque par là) pour d’autres séries B du même acabit, notamment The Voodoo Woman ou How to Make a Monster. Vedette indiscutable du film, la bête n’apparaît pas beaucoup à l’écran en réalité, se contentant même parfois de quelques prestations sous une enveloppe invisible, ses pas creusant le sable de la plage comme le feront ceux des Invisible Invaders trois ans plus tard. Mais revenons à ce merveilleux scénario. Chaque fois que l’hypnotiseur invoque la vie antérieure d’Andréa et que son âme s’échappe sous forme d’une jolie fumée en surimpression, un meurtre est commis sur la plage, preuve que le monstre ressurgit réellement du fond des âges, habité par l’esprit de la jeune femme. Autant dire que la police piétine, ne sachant pas trop par quel bout prendre l’enquête.
Moitié-femme moitié-poisson
Persuadé qu’il y a de l’argent à faire avec cette étrange affaire, le businessman Chappel (le charismatique Tom Conway) tente de tirer profit des dons divinatoires de Lombardi en organisant des séances privées chez lui et en faisant éditer des ouvrages spécialisés. Mais le gendre de Chappel, l’éminent docteur Ted Erickson (un Lance Fuller assez monolithique) reste fort sceptique et demeure le détracteur le plus virulent de Lombardi. Cette rivalité déteindra bien vite sur leur vie privée, les deux hommes convoitant la troublante Andrea. Malgré son concept tarabiscoté, son approche risible de la science (Erickson, grand spécialiste de la métaphysique et de la recherche psychique, passe des heures dans son laboratoire à contempler des liquides dans des tubes à essai de petit chimiste) et son monstre de carnaval, The She-Creature se laisse voir sans déplaisir, en grande partie grâce à ses personnages pittoresques et à leurs dialogues savoureux. Vers la fin du film, refrain connu, Lombardi demandera à la créature d’éliminer son rival, mais cette dernière refusera et finira par se retourner contre lui, suivant donc la voie de tous les monstres de Frankenstein qui l’ont précédé.
© Gilles Penso
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