À 17 ans, Matthew Perry devient le héros de cette sitcom fantastique dans laquelle son double du futur vient réparer ses fautes passées…
SECOND CHANCE / BOYS WILL BE BOYS
1987/1988 – USA
Créée par David W. Duclon et Gary Menteer
Avec Kiel Martin, Matthew Perry, William Gallo, Demian Slade, Randee Heller, Joseph Maher, Terri Ivens, Adam Sadowsky
THEMA MORT I VOYAGES DANS LE TEMPS
Créateurs de la série Punky Brewster, David W. Duclon et Gary Menteer développent au milieu des années 80 l’idée d’une sitcom au concept surprenant : alors qu’il vient de mourir, un homme adulte est renvoyé dans le passé pour se rencontrer lui-même à l’âge de l’adolescence et tenter de réparer les erreurs de sa vie. Matthew Perry, alors âgé de 17 ans, n’a joué que des petits rôles à la télévision et au cinéma et voit là l’opportunité de se faire enfin repérer par le grand public. Mieux encore : pourquoi ne pas embarquer avec lui son père Joe Perry, acteur spécialisé jusque-là dans les films publicitaires ? « Existe-t-il un meilleur pitch pour un duo d’acteurs père/fils ? » raconte-t-il à propos du concept de Second Chance. « Mon père et moi avons évidemment passé le casting. Et là, désastre : j’ai été pris pour jouer la version jeune du héros, mais pas mon père pour jouer la version adulte. Mon père a géré la situation en n’assistant à aucun de mes tournages sauf celui du dernier épisode. Je suppose qu’il avait ses raisons » (1). Cette rancœur compréhensible gâche un peu le plaisir du jeune Matthew Perry mais lui permet enfin d’accéder à un rôle de premier ordre. C’est finalement l’acteur Kiel Martin (l’inspecteur LaRue dans Hill Street Blues) qui est sélectionné pour incarner le personnage à l’âge adulte.
Le caractère burlesque de Second Chance est assumé dès son entame. Dans son bureau très « rococo », Saint-Pierre (Joseph Maher) reçoit tour à tour une Miss America et le général Kadhafi. La première est envoyée au paradis (une lumière dorée s’allume et la conduit vers une porte d’où émergent des chœurs angéliques), le second part directement en enfer (comme l’indique la lumière rouge qui l’emmène vers une autre porte s’ouvrant sur d’inquiétantes volutes de fumée). L’action se situe le 29 juillet 2011. Kadhafi étant mort dans la réalité le 20 octobre 2011, voilà qui démontre un surprenant sens de la prédiction de la part des scénaristes ! Le prochain visiteur de l’au-delà est Charles « Chazz » Russell, mort dans un accident d’aéroglisseur. Face à son cas, Saint-Pierre est perplexe. Le défunt n’a droit ni à la lumière dorée, ni à la lumière rouge, mais à une lueur bleue. C’est un « Blue Lighter », autrement dit quelqu’un qui n’est pas assez bon pour le paradis ni assez mauvais pour l’enfer. Saint-Pierre le renvoie donc sur Terre en 1987 pour qu’il se rencontre lui-même alors qu’il était adolescent et s’aide à faire des choix moraux plus judicieux.
Changement de cap
Si Kiel Martin déborde de charisme dans la peau de cet homme coincé dans son passé et si la petite galerie de personnages qui lui donnent la réplique ne démérite pas, c’est clairement Matthew Perry qui crève l’écran et vole la vedette de tous ses compagnons de jeu. En tout début de carrière, il possède déjà tout le dispositif comique qui le rendra célèbre : une répartie cinglante, une façon unique de ponctuer ses dialogues, des mimiques irrésistibles, une gestuelle saccadée et surtout un incroyable sens du timing. Une grande partie des gags de la série se réfèrent directement à la culture américaine. Chazz n’étant ni bon ni mauvais, il est comparé au chanteur Barry Manilow par exemple. Les auteurs imaginent également que le président des USA du futur sera John Travolta. Les dialogues abondent quant à eux de jeux de mots autour de la mort, l’enfer, le paradis et l’éternité, dont la plupart sont intraduisibles en français. La série n’est d’ailleurs jamais parvenue jusqu’à chez nous, faute d’un succès suffisant aux États-Unis. « Tout le monde était persuadé que Second Chance allait cartonner », raconte Perry. « À sa sortie, la série s’est placée à la 93ème place des 93 séries du classement » (2). Face à ces mauvaises audiences, les scénaristes changent complètement leur fusil d’épaule. Après neuf épisodes, l’argument fantastique est supprimé, les intrigues se concentrent sur la vie d’adolescent de Chazz et de ses amis et le programme est rebaptisé Boys Will Be Boys. Le succès n’est pas pour autant au rendez-vous, et la série est annulée au bout de sa première et unique saison. Dommage, parce que Second Chance ne manque ni d’atouts ni de charme. Peut-être serait-il temps de lui donner… une seconde chance ?
(1) et (2) Extraits de l’autobiographie « Friends, mes amours et cette chose terrible » de Matthew Perry parue en 2022.
© Gilles Penso
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