À Hong-Kong, un policier cyborg affronte des trafiquants de drogue, une armée de vampires et une femme-fantôme…
Le nom de la société de production hongkongaise Filmark est synonyme de petits films fauchés improbables faits de bric et de broc et recyclant souvent des images empruntées un peu partout. Face au succès international de Robocop, le producteur Tomas Tang (un pseudonyme qu’empruntent plusieurs membres de Filmark) se dit qu’il y a sans doute de l’argent à se faire avec l’histoire d’un policier robot. Par ailleurs, l’accueil très chaleureux réservé à Histoires de fantômes chinois par le grand public est une aubaine. Pourquoi ne pas ajouter dans cette histoire des éléments surnaturels ? Voilà comment naît cet objet filmique totalement inclassable dont le titre Robo Vampire et le poster détournant effrontément le visuel du classique de Paul Verhoeven laissent déjà rêveur. Le concept du film est le suivant : un patron de la pègre établi à Hong-Kong engage un moine taoïste afin de créer une armée de vampires et ainsi sécuriser son trafic de drogue. Prometteur n’est-ce pas ? Les vampires en question ont le visage peinturluré à la va vite et des mains en latex avec des ongles crochus. Les bras tendus comme le monstre de Frankenstein, ils adoptent un mode de déplacement incroyablement risible (de manière involontaire bien sûr) qui consiste à effectuer des petits bonds à pieds joints. Avides de chair humaine, ils crachent de la fumée et projettent des étincelles. Voilà donc de redoutables adversaires !
Et le policier robot dans tout ça ? Patience, il arrive. Pendant une descente contre les trafiquants de drogue, Tom Wilde, l’un des agents de la brigade des stups, est assailli par des feux d’artifices surnaturels projetés par l’un des vampires. Les médecins ont beau s’acharner sur lui avec leur joli transistor qui fait bip-bip, rien n’y fait, il est déclaré mort. Le docteur consciencieux et son infirmière se regardent gravement en secouant la tête pour bien nous faire comprendre qu’il n’y a aucun espoir. En apprenant la terrible nouvelle, un ingénieur militaire exalté annonce alors à son supérieur : « Puisque Tom est mort, j’aimerais utiliser son corps pour créer un robot de type androïde. » Au lieu de finir dans une cellule capitonnée avec une camisole de force, il voit sa requête approuvée officiellement. Notre savant bricoleur s’active donc avec des morceaux de métal, un fer à souder, un appareil électronique qui clignote et une perceuse, et voilà : le Robo Warrior est né. Dans son costume en aluminium avec un saladier argenté sur la tête, des lunettes de ski et des jambières de joueur de hockey sur glace, il est de toute beauté. Les méchants n’ont qu’à bien se tenir désormais !
Robo Toc
À partir de là, tous les délires sont permis. On apprécie notamment le « uber-vampire » que fabrique le moine taoïste en agitant ses bras dans tous les sens et en prononçant des formules magiques. Le résultat est une sorte de mort-vivant dont la tête est un masque de gorille et dont la longue chevelure brune s’agite au vent ! Ce sera lui, le plus dangereux des ennemis du Robo Warrior. La meilleure scène le concernant est cependant celle où il soupire tandis que sa bien-aimée (une femme-fantôme) l’aguiche en masquant à peine sa nudité sous un voile transparent. Constatant qu’il n’a pas assez de métrage pour tenir sur un film entier, le réalisateur Godfrey Ho récupère des séquences entières d’un film policier thaïlandais, Paa Lohgan, réalisé en 1984, et tente de les raccorder avec son histoire d’androïde et de monstres blafards. Une bonne moitié de Robo Vampire est donc constituée de scènes de fusillades, de combats au couteau, d’attaques de commando dans la jungle, de kidnapping d’agents et d’explosions diverses qui n’ont strictement rien à voir avec le reste du film mais que le montage et la post-synchronisation harmonisent du mieux qu’ils peuvent. Le résultat est bien sûr parfaitement invraisemblable et ne laissera aucun spectateur indemne. Se confronter à Robo Vampire est une expérience dangereuse pour le cerveau humain, vous êtes prévenus !
© Gilles Penso
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