L’histoire vraie d’une étudiante persuadée d’être possédée par des entités maléfiques et soumise à d’éprouvantes séances d’exorcisme…
REQUIEM
2006 – ALLEMAGNE
Réalisé par Hans-Christian Schmid
Avec Sandra Hüller, Burghart Klaussner, Imogen Kogge, Anna Blomeier, Friederike Adolph, Nicholas Reinke, Jens Harzer
THEMA DIABLE ET DÉMONS
Par un troublant hasard de calendriers, deux films inspirés du même fait divers sont sortis à quelques mois d’intervalle sur les grands écrans : L’Exorcisme d’Emily Rose et Requiem. Or rarement un point de départ identique aura accouché de deux œuvres aussi radicalement dissemblables. Comme le réalisateur Scott Derrickson et son scénariste Paul Harris Boardman, Hans-Christian Schmid s’intéresse donc au cas réel et troublant d’Annelise Michel, une étudiante allemande de vingt-trois ans morte de malnutrition et d’épuisement après avoir subi de longues séances d’exorcisme en 1976 dans la ville de Miltenberg. Les événements sont ici racontés avec un maximum de fidélité, même si les noms des protagonistes ont été modifiés et leurs actions réadaptées pour les besoins du scénario. Elevée par un père affectueux et soumis et une mère froide et autoritaire, Michaela (Sandra Hüller, dans son premier rôle), vingt-et-un an, souffre d’épilepsie depuis plusieurs années et rêve de reprendre ses études à l’université. Là, elle se lie d’amitié avec Hannah (Anna Blomeier) et tombe amoureuse de Stephan (Nicholas Reinke).
Le décor est ainsi posé, simple et somme toute très banal. Tout semble aller pour le mieux, mais de nouvelles crises, plus violentes que les précédentes font entendre à Michaela des voix insultantes et voir des visages grimaçants. Craignant d’être renvoyée dans sa famille, la jeune fille consulte un prêtre. Bizarrement, celui-ci refuse de croire à ses « apparitions » et lui conseille de consulter un psychiatre. En réalité, la proximité d’une possédée l’effraie viscéralement, et il cherche à s’en éloigner. Au fil des crises éprouvantes qui se multiplient et altèrent sa personnalité, Michaela craque, devient allergique à toute prière, s’avère incapable de toucher un crucifix et implore son entourage de chasser les démons qu’elle abrite malgré elle. Un second prêtre, plus jeune, prône alors le recours à l’exorcisme…
Un réalisme quasi-documentaire
Mis en scène de manière instinctive, une caméra 16 mm à l’épaule, Requiem semble en quête permanente de réalisme et de naturalisme. Le film se prive donc de musique, d’effets de montage et bien sûr d’effets spéciaux. Tout se passe comme si nous assistions à la captation brute, presque documentaire, d’un drame réel. Les crises elles-mêmes sont fugaces, sobres et anti-spectaculaires, à la limite de l’austérité. Ce parti pris est tout à fait intéressant, d’autant que les comédiens sont tous d’une grande justesse (Sandra Hüller a d’ailleurs décroché pour ce rôle intense l’Ours d’Argent de la meilleure actrice au Festival de Berlin). Mais Requiem laisse un peu perplexe, dans la mesure où il s’interdit l’adoption d’un véritable point de vue sur son sujet. C’est d’autant plus étrange que la position d’Hans-Christian Schmid est très claire : il ne croit pas à la possession diabolique et dénonce la pratique de l’exorcisme. Dans ce cas, pourquoi ne pas raconter explicitement l’histoire d’une fille épileptique que les gens d’église croient habitée par des démons ? En restant flou et distant, le cinéaste allemand n’implique pas ses spectateurs et les laisse un peu à l’écart, ce sentiment étant renforcé par son refus de nous montrer l’issue du drame. Un simple carton précédant le générique de fin nous annonce en effet ce qu’il advint de Michaela. Difficile d’être plus sobre.
© Gilles Penso
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