Une double imitation éléphantesque de Conan le Barbare et La Guerre du Feu signée par Umberto Lenzi
IRONMASTER / LA GUERRA DEL FERRO
1982 – ITALIE / FRANCE
Réalisé par Umberto Lenzi
Avec Sam Pasco, Elvire Audray, George Esatman, Pamela Prati, Jacques Herlin, Danilo Mattei, Benito Stefanelli, Areno D’Adderio
THEMA EXOTISME FANTASTIQUE
Entre deux imitations de Zombie et Cannibal Holocaust, Umberto Lenzi nous livrait sans honte ce croisement contre-nature entre Conan le barbare, Un million d’années avant JC et La Guerre du feu (on note au passage la grande finesse du titre français). Habitué aux rôles de grosses brutes, George Eastman (Anthropophagous, 2019 après la chute de New York) incarne ici Vood, un Cro-Magnon bien peu mignon qui tue Exay (Benito Stefanelli), le chef de sa tribu, dans l’espoir de lui succéder. Mais il est chassé de son village par Ela (Sam Pasco), une espèce de Rahan bodybuildé, et se met à errer dans des bois aux allures bien peu préhistoriques (filmés dans une réserve naturelle du Dakota, ce qui explique la surabondance de plans mettant en scène des troupeaux de bisons). Sur son chemin, Vood voit des stock-shots d’éruptions volcaniques et découvre parmi des cendres fumantes un matériau jusqu’alors inconnu : le fer. Il en tire une arme, avec laquelle il tue un lion. Désormais revêtu de sa dépouille, tel Héraclès, il revient revendiquer son statut de chef et envoie en exil son rival Ela. Notre expatrié préhistorique échappe de peu à une horde d’hommes singes en furie (des acteurs recouverts de poils et de masques rigides grotesques) puis rencontre la belle Isa au brushing impeccable (Elvire Audray) et accepte de rejoindre sa tribu, tandis que Vood décide d’imposer son règne de terreur sur la vallée toute entière.
Les blonds sont les gentils, les bruns les méchants, le spectateur peut donc tranquillement suivre l’intrigue sans crainte du moindre mal de tête. Et lorsque La Guerre du fer s’essaie aux dialogues d’une haute portée philosophique, l’effet comique est garanti. Notamment quand Eastman, à peu près aussi exalté que dans Les Nouveaux barbares, déclame « l’aigle ne s’abaisse pas à tuer le serpent, sauf lorsqu’il sort du bois ». Ou lorsque le sage Mogo (William Berger) affirme avec aplomb : « La liberté, les armes ont le pouvoir de te la rendre, mais elles ont aussi le pouvoir de te l’enlever ».
« L'aigle ne s'abaisse pas à tuer le serpent… »
Co-écrit par cinq auteurs (dont le réalisateur lui-même), le scénario ne cherche pas midi à quatorze heures et assure le service minimum, ne s’égayant que trop rarement de mini-séquences horrifiques dignes d’Umberto Lenzi, comme cette agression de nos héros par des troglodytes lépreux qui ressemblent comme deux gouttes d’eau aux zombies de Virus cannibale (chassez le naturel…) ou cette vision furtive d’un cadavre féminin défiguré et amputé d’un bras. L’étrange bande originale ethnique de Guido et Maurizio de Angelis (La Montagne du dieu cannibale, La Mort au large) puise son inspiration un peu au hasard, à mi-chemin entre les chœurs à la Ennio Morricone, les percussions africaines et les cordes indiennes. Sans la magie de John Milius, sans le réalisme de Jean-Jacques Annaud, sans les dinosaures de Ray Harryhausen, cette aventure préhistorique n’a finalement pas grand-chose pour séduire, si l’on excepte quelques accortes jeunes filles en peaux de bête. Bref, encore un film fauché et sans ambition qui ne rend guère justice à la magnifique affiche conçue pour le promouvoir à l’époque.
© Gilles Penso
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