Une musicienne aveugle recouvre progressivement la vue grâce à une expérience révolutionnaire et devient la cible d’un tueur psychopathe…
BLINK
1994 – USA
Réalisé par Michael Apted
Avec Madeleine Stowe, Aidan Quinn, James Remar, Peter Friedman, Bruce A. Young, Laurie Metcalf, Matt Roth
THEMA MÉDECINE EN FOLIE I TUEURS
Blink marque les retrouvailles de Madeleine Stowe et Aidan Quinn, qui campaient un couple pour le moins conflictuel dans la savoureuse comédie policière Étroite Surveillance de John Badham. Ici, ils tiennent la vedette d’un thriller fantastique solidement dirigé par le metteur en scène de Gorilles dans la brume. Né sous la plume imaginative de Danna Stevens, le scénario de Blink repose sur une idée passionnante. À l’âge de huit ans, Emma Brody subit les violences d’une mère abusive. Un jour, la situation vire au drame et le visage de la fillette heurte de plein fouet le miroir de la salle de bains, la frappant dès lors de cécité. Vingt ans plus tard, Emma est devenue la séduisante violoniste d’un groupe de musique celtique. Lorsque le chirurgien Ryan Pearce (Peter Friedman) lui annonce qu’une greffe de cornée pourrait lui faire recouvrer la vue, elle décide de tenter sa chance. À l’issue de cette intervention chirurgicale révolutionnaire (purement fictive, mais inspirée de données scientifiques réelles), elle découvre un monde aux contours flous et incertains, par la grâce d’élégants trucages numériques. Une nuit, Emma entend des bruits suspects chez sa voisine Valérie et entrevoit la silhouette d’un homme qui s’éclipse. La police, alertée dès le lendemain, ne cache pas son scepticisme, mais finit par se rendre chez Valérie, dont elle découvre le corps. La jeune femme, violée et assassinée selon un rituel précis, est selon toute apparence la deuxième victime d’un tueur en série. Chargé de l’enquête, l’inspecteur John Hallstrom (Aidan Quinn) se laisse peu à peu séduire par Emma…
L’idée forte du script est que la vue de son infortunée héroïne va en s’améliorant progressivement, et que certaines visions nettes lui parviennent avec un temps de retard plus ou moins long (une « vision rétroactive » pour reprendre les termes du scénario de Danna Stevens). Le décalage s’étend parfois sur plusieurs heures, voire sur des jours entiers. Ces éléments apportent des indices dans la recherche de l’assassin, mais constituent surtout d’énormes handicaps qui trompent l’héroïne – et le spectateur. Blink propose ainsi une variante inédite sur le thème connu de la victime féminine aveugle prise en chasse par un assassin psychopathe (les fleurons du genre étant Seule dans la nuit de Terence Young et Terreur aveugle de Richard Fleischer) dans la mesure où ici la cécité se décale dans le temps.
Seule dans la nuit
Si le phénomène visuel dont est frappée l’héroïne suscite des chocs assez forts au sein de scènes tendues (en particulier au cours d’une poursuite dans le métro qui rappelle Pulsions et L’Impasse), on peut regretter qu’il n’ait pas vraiment d’autres objectifs. De telles visions à retardement auraient pu susciter de nombreux faux-semblants, surprises, indices déformés, éléments d’un puzzle difficile à reconstituer. On imagine ce qu’un Dario Argento ou un Brian de Palma auraient pu tirer d’un tel argument. Avouons également que les motivations du tueur, même si elles s’avèrent pour le moins tordues, sont trop tôt prévisibles, malgré une tentative peu concluante d’attirer l’attention vers un autre suspect possible. Le climax lui-même, affrontement obligatoire entre l’héroïne et l’assassin, manque de surprise. C’est toujours le même problème : comment un tueur aussi implacable, minutieux et astucieux se laisse-t-il si stupidement avoir ? Mais ces réserves n’empêchent pas cette intrigue policière, aux confins de l’épouvante et de la science-fiction, de s’affirmer comme une réussite, qui repose à vrai dire plus sur le jeu solide de ses acteurs, échappant habilement à tous les stéréotypes, que sur son scénario un brin limité.
© Gilles Penso
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