Quelques bonnes idées mais un résultat globalement décevant pour ce remake parfaitement facultatif
A NIGHTMARE ON ELM STREET
2010 – USA
Réalisé par Samuel Beyer
Avec Jackie Earle Haley, Kyle Gallner, Rooney Mara, Katie Cassidy, Thomas Dekker, Kellan Lutz, Clancy Brown
THEMA TUEURS I RÊVES I SAGA FREDDY KRUEGER
L’initiative d’un remake des Griffes de la nuit pouvait sembler incongrue, mais après les excellentes relectures de La Colline a des yeux par Alexandre Aja et La Dernière maison sur la gauche par Denis Illiadis, la renaissance d’un autre classique de Wes Craven pouvait s’avérer prometteuse. L’idée d’une préquelle effleura un moment les producteurs du film (Michael Bay, Andrew Form et Brad Fuller), jusqu’à ce qu’ils ne se rabattent sur un remake plus traditionnel reprenant dans les grandes lignes la trame et les personnages des Griffes de la nuit. Nous sommes dans la ville de Springwood, et plusieurs adolescents sont en proie à des rêves sinistres dans lesquels sévit un grand brûlé armé de griffes acérées. Lorsque l’un de ces lycéens tourmentés meurt égorgé dans son sommeil, la panique s’empare du voisinage. Ce n’est évidemment que le premier d’une sanglante série. Nancy Holbrook (Rooney Mara) décide de mener sa propre enquête, persuadée que sa mère en sait bien plus que ce qu’elle n’ose dire…
Les fans inconditionnels de Robert Englund risquent fort d’être déconcertés par le nouveau look du croquemitaine. Désormais incarné par Jackie Earle Haley (mémorable sous le masque de Rorschach dans Watchmen), il arbore un faciès moins grimaçant et plus proche de l’aspect d’un homme gravement brûlé, sous les bons auspices du maquilleur Andrew Clement (le Star Trek de J.J. Abrams, la série Fringe). Cette approche « médicalement crédible » se défend, mais fait perdre au personnage une grande partie de son expressivité et de son caractère iconique. Mais c’est probablement l’histoire du tueur elle-même qui fera déchanter la plupart des spectateurs. Oublié le tueur d’enfants né de l’union contre-nature d’une infirmière avec une centaine de malades mentaux dans une institution psychiatrique. Ce Freddy là est l’ancien jardinier d’une école maternelle, pédophile à ses heures, ayant subi le courroux de parents révoltés. Une fois de plus, cette quête de réalisme, pas inintéressante en soi, finit par banaliser le monstre. Sans aller jusqu’aux délires des derniers épisodes de la saga, ces nouvelles Griffes de la nuit auraient sans doute mérité un peu plus d’audace et de panache.
L'héritage de la culpabilité
Mais le film de Samuel Beyer (spécialisé jusqu’alors dans la pub et les clips) n’a rien d’honteux. Les séquences de suspense fonctionnent à merveille, les cauchemars et les morts brutales qui en découlent sont mis en scène avec efficacité, et le script sait préserver les thèmes majeurs développés dans le film original : les adolescents héritant du mensonge et de la culpabilité de leurs parents, l’accès via le rêve à d’autres niveaux de conscience, les conséquences comportementales d’une privation prolongée de sommeil… En outre, les scénaristes apportent un élément narratif nouveau : les micro-siestes, qui frappent les protagonistes sans préavis et qui érodent les frontières entre le rêve et la réalité. Bref, si cette relecture n’a rien de bien révolutionnaire, elle n’entache pas spécialement le mythe créé par Wes Craven, surtout en regard des nombreuses séquelles dont furent affublées Les Griffes de la nuit depuis le milieu des années 80.
© Gilles Penso
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