La sulfureuse présentatrice TV incarnée par Cassandra Peterson quitte les petits écrans pour tenter sa première aventure cinématographique
ELVIRA, MISTRESS OF THE DARK
1988 – USA
Réalisé par James Signorelli
Avec Cassandra Peterson, Morgan Sheppard, Edia McClury, Danoel Greene, Jeff Conaway, Morgan Shepard, Susan Kellerman
THEMA SORCELLERIE ET MAGIE
Au tout début des années 80, la comédienne Cassandra Peterson s’inspire du personnage de Vampira, campé par Maila Nurmi dans les années 50 pour le programme « Movie Macabre » de la chaîne ABC, et invente son propre alter-égo gothico-comico sexy : Elvira. Maila Nurmi n’apprécie gère ce qu’elle considère comme un plagiat et porte même l’affaire devant les tribunaux, sans succès. Toujours est-il qu’Elvira devient, comme son inspiratrice, une icône de la culture populaire de son époque. Animatrice du show « Elvira’s Movie Macabre » pour KHJ, elle illumine de sa présence inoubliable (grande robe noire fendue, crinière spectaculaire, décolleté plongeant, maquillage excessif) les petits écrans américains entre 1981 et 1985 en présentant des séries B d’horreur et de science-fiction sur un ton sarcastique qui fera même des émules en France (ah, la fameuse Sangria des « Accords du diable » !). Inévitablement, Cassandra Peterson finit par caresser le rêve de porter son personnage sur le grand écran et convainc NBC de produire ce qui deviendra Elvira, maîtresse des ténèbres, en collaboration avec la compagnie New World de Roger Corman. C’est James Signorelli (réalisateur de nombreuses fausses publicités parodiques pour le « Saturday Night Live » et de la comédie Easy Money) qui hérite de la mise en scène, le scénario étant l’œuvre conjointe de Peterson, Sam Egan et John Paragon.
Après un bref extrait de It Conquered the World de Roger Corman, nous découvrons Elvira dans un exercice auto-parodique de présentatrice de films fantastiques fauchés. Blasée et aigrie, elle rêve de quitter les plateaux télévisés pour monter un grand spectacle à Las Vegas, mais les finances lui manquent cruellement pour concrétiser un tel projet. Or elle apprend que sa grand-tante Morgane – dont elle ignorait l’existence – vient de mourir et la cite dans son testament. Elvira s’embarque donc dans sa « Macabre Mobile » et débarque avec fracas dans une petite ville ultra-conservatrice du Massachusetts où sa présence délurée fait grincer toutes les dents. À l’hostilité généralisée se mêle la déception de la lecture du testament : Morgane n’a légué à Elvira que sa vieille maison en ruines (qui semble presque échappée de Psychose), un petit chien et un livre de cuisine. Or ce dernier attire la convoitise de l’antipathique oncle Vincent. Se pourrait-il que cet ouvrage contienne autre chose que de simples recettes familiales ?
Les feux de la vamp
A priori, la mécanique d’Elvira, maîtresse des ténèbres semblait taillée sur mesure pour Tim Burton et même annoncer certains des motifs d’Edward aux mains d’argent, notamment l’être gothique et « différent » parachuté au beau milieu d’une petite ville étriquée et traditionaliste. Burton, qui avait déjà brièvement dirigé Cassandra Peterson dans Pee Wee’s Big Adventure, était d’ailleurs le premier choix de la comédienne, mais il dut décliner la proposition pour se consacrer à Beetlejuice. C’est sans doute mieux ainsi. Car honnêtement, à part une mise en scène forcément plus inventive et stylisée que celle – plate et anonyme – de James Signorelli, on ne voit pas bien ce que le réalisateur d’Ed Wood aurait pu tirer d’une intrigue aussi peu palpitante. Au-delà des frictions répétées d’Elvira avec la communauté collet-monté qui la regarde d’un très mauvais œil, cette Maîtresse des ténèbres ne raconte en effet rien de très passionnant pendant une bonne heure, d’autant que le comportement vulgaire et snob de la star ne la rend pas particulièrement attachante, ce que ne tempère guère un humour balourd situé volontiers en-dessous de la ceinture. Ce n’est que dans son dernier acte que le film décolle un peu, grâce aux manifestations surnaturelles provoquées par le vieux grimoire. Les moments les plus mémorables en la matière sont probablement le surgissement du monstre dans la casserole (une marionnette conçue par l’équipe de Doug Beswick) et l’affrontement final contre le sorcier qui lance des éclairs en rotoscopie et crache des flammes en dessin animé. Sorti en salles sans grand succès, le film deviendra culte au fil des ans et finira même par générer une séquelle tardive, Elvira et le château hanté.
© Gilles Penso
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