Un chevalier du moyen-âge rencontre sur son chemin la Mort en personne et lui propose une partie d’échecs…
DET SJUNDE INSEGLET
1956 – SUÈDE
Réalisé par Ingmar Bergman
Avec Max Von Sydow, Gunnar Björnstrand, Bengt Ekerot, Nils Poppe, Bibi Andersson, Inga Gill, Maud Hansson, Inga Landgré
THEMA MORT
Entre 1946 et 2003, Ingmar Bergman a réalisé une soixantaine de longs-métrages, mais Le Septième sceau est probablement celui qu’il préfère. Au milieu du quatorzième siècle, le chevalier Antonius Block (Max Von Sydow, aux traits ascétiques et burinés) revient de croisade avec son écuyer Jöns (Gunnar Björnstrand). Alors qu’Antonius est empli de doutes et d’incertitudes, Jöns est tout bonnement devenu athée. Sur une plage déserte, le chevalier rencontre la Mort en personne (Bengt Ekerot). Celle-ci est venue le chercher pour l’emporter avec elle au-delà du monde des vivants. « Êtes-vous prêt ? » s’enquiert-elle auprès de lui. « Mon corps est prêt, mais je ne le suis pas », rétorque Antonius qui réclame un petit délai. Accordée, cette requête prend la forme d’une partie d’échec entre la Faucheuse et lui (la Mort choisit bien entendu les pièces noires !). En se dirigeant vers son château, le chevalier et son écuyer rencontrent une famille de bateleurs, une jeune sorcière promise au bûcher, une procession de flagellants, une jeune fille muette, un forgeron alcoolique et sa femme infidèle. Le récit alterne dès lors le parcours des deux croisés avec celui des artistes de foire, leurs destinées se regroupant de manière inattendue…
Inscrit dans un moyen âge en proie aux affres de la peste noire et aux craintes de la sorcellerie, Le Septième sceau fonctionne sur le registre métaphorique, assimilant la partie d’échecs contre la Mort à un parcours initiatique ponctué de choix à effectuer, d’obstacles à contourner et de décisions à prendre. En organisant les pièces sur l’échiquier, Antonius Block semble vouloir ainsi donner un sens à son existence. La Mort prend non pas l’apparence classique d’un squelette encapuchonné armé d’une faux, mais les traits d’un homme au visage livide, tout de noir vêtu. Cette vision proposée par Bergman est restée inscrite dans l’inconscient collectif comme une nouvelle personnification possible de la Grande Faucheuse, et le faciès livide de Bengt Ekerot s’est littéralement mué en icône cinéphilique.
La danse macabre
Au cours d’une scène à la limite du burlesque (voire du dessin animé), la Mort quitte cependant ses atours austères pour scier le tronc d’un arbre sur lequel s’est juché un comédien dont la dernière heure a sonné. Comble de l’ironie, elle lui annonce que son ultime performance est « annulée pour cause de décès ». Baigné dans une somptueuse photographie en noir et blanc (signée Gunnar Fischer), Le Septième sceau s’articule autour d’une intrigue un peu chaotique (se contentant souvent de sa démarche intellectuelle au mépris de l’éveil des sens et des émotions du spectateur), mais regorge d’images de poésie pure, comme cette danse finale des convives, entraînés par la Mort au-dessus d’une colline. Bergman avoue avoir puisé ses références graphiques à la fois dans les fresques de l’église où prêchait son père ecclésiastique et dans tout un pan du cinéma d’époque d’Akira Kurosawa, auquel il vouait une admiration sans borne. Maintes fois primé, le Septième sceau fut notamment récipiendaire du Prix Spécial du Jury du Festival de Cannes en 1957, ex-aequo avec Kanal d’Andrzej Wajda.
© Gilles Penso
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