Une adaptation kitsch, clinquante et disco du célèbre comic book d’Alex Raymond, navrante ou culte selon les goûts…
FLASH GORDON
1980 – USA / GB
Réalisé par Mike Hodges
Avec Sam Jones, Max Von Sydow, Melody Anderson, Ornella Muti, Timothy Dalton, Topol, Brian Blessed, Peter Wyngarde
THEMA SPACE OPERA
Flash Gordon est né le 7 janvier 1934 sous la plume d’Alex Raymond. Les aventures de ce héros intergalactiques aux prises avec un empereur Ming symbolisant sans fard le « péril jaune » est un succès immédiat. Le fier combattant des forces du mal, rebaptisé Guy l’éclair chez nous, sort bientôt des planches dessinées pour poursuivre ses exploits dans un feuilleton radiophonique de 1935, puis pour s’incarner en chair en os dans trois serials avec Buster Crabbe en 1936, 1938 et 1940. Curieusement, aucun long-métrage ne lui aura été consacré avant le début des années 80. Le producteur Dino de Laurentiis y pense pourtant dès les années 60, dans la foulée des deux autres adaptations de comic books qu’il a produites (Barbarella et Danger : Diabolik). Mais le projet tarde à prendre son envol. George Lucas envisage lui-même de s’y coller, avant de se tourner finalement vers La Guerre des étoiles (qui de fait doit beaucoup à Flash Gordon). Federico Fellini y songe aussi, sans concrétiser l’idée. De Laurentiis revient donc à la charge, embauche le scénariste Lorenzo Semple Jr (déjà auteur du King Kong de 1976) et le réalisateur Mike Hodges (signataire du célèbre polar Get Carter avec Michael Caine). Le puissant producteur se paye un casting de luxe mais choisit de donner le rôle-titre à un inconnu, suivant la démarche des frères Salkind sur Superman. C’est donc Sam Jones qui est chargé de donner corps au puissant Flash Gordon.
Au cours du prégénérique, le sinistre empereur Ming (Max Von Sydow) décide de tromper son ennui en déchaînant sur la Terre une série de cataclysmes (ouragans, séismes, volcans et tornades). C’est alors que retentit la célèbre chanson de Queen, délicieusement eighties, tandis que s’égrènent à l’écran des images empruntées au comic-strip d’Alex Raymond. Après ce générique plein d’emphase, les deux protagonistes principaux font leur apparition : Flash, le célèbre capitaine d’une équipe de football (Sam Jones donc), et sa petite amie Dale Arden (Melody Anderson). Au milieu d’une pluie de pierres lunaires et d’une étrange éclipse, ils sont obligés de faire atterrir en catastrophe leur avion de tourisme dans le laboratoire du professeur Hans Zarkoff (Topol), un savant paranoïaque et passablement dérangé, renvoyé de la NASA après avoir clamé que la Terre était menacée par un danger intergalactique. Zarkoff, qui a construit une fusée, oblige le couple à s’envoler avec lui. Ils font cap sur la planète Mongo, où les sbires de Ming les attendent de pied ferme…
« Flash ! Ah ah ! »
Fidèle en esprit aux péripéties excessives d’un serial, le script de Lorenzo Semple Jr multiplie les rebondissements au cours desquels Flash ne cesse de frôler la mort. Mais le scénariste peine à équilibrer les deux tendances exigées par De Laurentiis, à savoir un humour proche de celui de la série Batman et des moments plus sérieux. De fait, le film semble prétexter ses origines dessinées pour caricaturer ses personnages, se contenter de dialogues simplistes et de situations absurdes. La direction artistique oscille ainsi entre l’inventivité audacieuse (les belles maquettes de vaisseaux et de palais qui émaillent le métrage, les robots en armure mi-futuriste mi-médiévale, la garde-robe d’Ornella Mutti) et le kitsch outrancier (les affreux trucages optiques, le slip en cuir de Flash, la faune hétéroclite de la planète Mongo, le monstre baveux hérissé de tentacules qui surgit dans un marécage, les bruitages de jeux vidéo). Dans le même esprit, quelques séquences très réussies (Dale dont on vide l’esprit, le duel au fouet sur une plateforme mouvante hérissée de pointes) côtoient des passages plus embarrassants (le combat cartoonesque qui prend les allures de match de foot US, l’envol des hommes-oiseaux). Démodé dès sa sortie sur les écrans, accueilli par le public avec un enthousiasme très modéré, ce Flash Gordon clinquant et disco s’est mué en petit objet de culte et ne s’apprécie désormais plus qu’au second degré.
© Gilles Penso
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