Le premier long-métrage d'un amoureux du cinéma de genre qui s'est toujours battu contre vents et marées pour produire ses séries B décomplexées
TIME DEMON
1996 – FRANCE
Réalisé par Richard J. Thomson
Avec Laurent Dallias, Elodie Chérie, Elisabeth Henriques, Dominick Breuil, Jean-François Gallotte, Alain Robak
Avec son goût immodéré pour le fantastique, l’horreur et la science-fiction, Richard J. Thomson fit un peu office de vilain petit canard auprès des écoles de cinéma françaises, plus portées sur l’œuvre d’un Jean-Luc Godard ou d’un Eric Rohmer que sur celles de John Carpenter et Sergio Martino. Ses études se terminant sans éclat, l’apprenti-cinéaste prit donc le taureau par les cornes et mit en chantier comme il put un premier long-métrage baptisé Time Demon (et sous-titré Les Prêtresses de l’Enfer). Le scénario, totalement délirant, nous fait découvrir des nazis rescapés de la seconde guerre mondiale et réfugiés dans une usine désaffectée. Grâce à une machine à voyager dans le temps et à une secte de prêtresses diaboliques, ils récupèrent un coffre mystérieux que des conquistadors ont volé à un sorcier indien et qui contiendrait un esprit capable de donner la vie éternelle. Mais cette boîte de Pandore ne peut s’utiliser sans la présence d’un talisman sacré ayant appartenu à un Espagnol du 16ème siècle. Les prêtresses, armées jusqu’aux dents, se mettent donc en quête de son descendant. Or ce dernier n’est qu’un loser qui fait croire à sa femme qu’il travaille dans une banque alors qu’en fait il est plongeur dans un fast-food et rêve de devenir comédien.
Tourné et exploité en vidéo, produit avec l’aide du magazine Mad Movies, Time Demon a souvent les allures d’un court-métrage amateur, dont il accuse les inévitables maladresses mais aussi l’insolence désinvolte et la naïveté décomplexée. Quelle production « officielle » oserait donc exhiber avec un tel mauvais goût assumé des diablesses sexy en tenue de cuir sadomasochiste s’adonner à des relations saphiques devant un drapeau nazi flottant ostensiblement entre les parois rouillées d’une usine décrépie ? Et que dire de ces effets gore excessifs bidouillés avec les moyens du bord (visages décomposés, membres tranchés, tête fondue dans de l’acide, seins découpés au couteau) ? Ou de ces officiers SS dont l’accent allemand est aussi peu crédible que celui de Thierry Lhermitte dans Papy fait de la Résistance ?
Bricolage et autodérision
Si Richard J. Thomson filme le plus sérieusement possible ce récit improbable (le prologue situé en 1521, avec cascades à cheval et en costumes d’époque, démontre une audace manifeste), il ne se prend lui-même jamais au sérieux et cultive volontiers l’autodérision. Ainsi, lorsqu’une comédienne s’offusque devant son agent qui lui propose de tourner dans une série Z fantastique mal filmée et tournée en vidéo, la mise en abîme s’avère plutôt culottée. D’autant que Thomson joue lui-même le rôle du réalisateur ! Alors qu’importent ces scènes érotiques parfaitement gratuites, ces combats aux chorégraphies approximatives, ce grain vidéo peu photogénique ou ces dialogues souvent débités sans la moindre conviction. Time Demon n’ambitionne pas de concourir dans la même catégorie que ses modèles mieux argentés. C’est un simple galop d’essai bricolé par un petit groupe animé d’une passion commune. D’ailleurs, les fantasticophiles reconnaîtront au gré du casting quelques visages connus comme Jean-Pierre Putters, Christophe Lemaire, Jean-Claude Romer ou Alain Robak.
© Gilles Penso
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