LA VAMPIRE NUE (1969)

Un faux film de vampires dans lequel Jean Rollin ne recule devant aucune situation absurde pour assouvir son goût conjoint de l’épouvante et de l’érotisme

LA VAMPIRE NUE

 

1969 – FRANCE

 

Réalisé par Jean Rollin

 

Avec Caroline Cartier, Maurice Lemaitre, Olivier Martin, Ly Lestrong, Bernard Musson, Jean Aron, Ursule Pauly

 

THEMA MUTATIONS I SAGA JEAN ROLLIN

La Vampire nue figure indiscutablement parmi les films les plus incohérents, les plus mal fichus et les plus involontairement drôles de toute la carrière de Jean Rollin, ce qui n’est pas peu dire. En résumer le scénario relève déjà de la gageure. Le héros est un jeune fils à papa du nom de Pierre Radamante. Alors qu’il se promène une nuit sur l’île Saint-Louis, en plein Paris, il tombe nez à nez avec une magnifique jeune fille, nue sous sa toge rouge transparente, et traquée par des individus affublés de masques d’animaux (un clin d’œil au Judex de Georges Franju ?) qui finissent par lui tirer dessus. De retour chez lui, où il se prélasse auprès de deux sœurs jumelles qui semblent jouer le rôle de domestiques sexuelles dans la maison (!), Pierre finit par découvrir que son père, Georges Radamante, est directement concerné par les étranges événements de la nuit précédente. En effet, celui-ci a constitué une secte d’adorateurs de la jeune femme en rouge, qui s’avère immortelle et est donc considérée comme une déesse. Ça commence donc assez fort. Et ce n’est que le début…

Au cours de cérémonies étranges, les membres de la secte se suicident et la belle se repaît de leur sang. Car Radamante senior est persuadé qu’il s’agit d’une femme vampire et entend bien percer le secret de son immortalité. Pour y parvenir, il analyse régulièrement son sang, espérant pouvoir l’accoupler avec un autre vampire. Il s’est donc adjoint les services de deux savants qui, comme le spectateur, ne comprennent pas grand-chose à ce qui se passe. Transférant ses activités depuis son hôtel particulier jusqu’à un grand château en pleine campagne, Radamante doit bientôt faire face à des dizaines d’individus bizarres, vêtus de capes blanches ou torse nu selon la fantaisie du costumier. Ils réclament la jeune fille car elle est l’une des leurs. Et effectivement, eux aussi sont insensibles aux balles. Il s’avère finalement (coup de théâtre incroyable, roulement de tambour) que tous ces immortels ne sont pas des vampires mais des mutants, censés représenter le prochain stade de l’évolution de l’humanité.

Les mutants sont parmi nous

L’absurdité du scénario le dispute à l’indigence des dialogues et l’amateurisme de l’ensemble des comédiens, incapables de prononcer une seule réplique sans jouer faux. Le film contient son quota de filles dénudées, qui se trémoussent régulièrement sans faire avancer l’intrigue d’un pouce. Le scénario est d’ailleurs tellement succinct que Jean Rollin est obligé d’accumuler les séquences interminables de traversées des corridors ou des descentes et montées d’escaliers en temps réel pour combler les vides. Parmi les moments les plus grotesques de cette Vampire nue, on gardera en mémoire ces suicides où les comédiens collent un pistolet en plastique sur leur tempe puis s’écroulent en mimant la mort, ou encore la « cascade » des jumelles qui dévalent lamentablement un grand escalier. Mais la palme revient sans conteste au plan final, où le chef des mutants regarde la caméra, dans sa belle cape blanche, et récite sans conviction un texte annonçant l’ère future des mutants sur la Terre. Ceux qui considèrent Plan 9 From Outer Space ou Robot Monster comme des candidats possibles à l’élection du plus mauvais film de tous les temps devraient tout de même jeter un coup d’œil à cette Vampire nue, qui a toutes les chances de figurer au palmarès.

 

© Gilles Penso

 

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