Une séquelle ambitieuse et radicale qui choisit d'adopter le point de vue des primates pour mieux dénoncer les travers des humains
DAWN OF THE PLANET OF THE APES
2014 – USA
Réalisé par Matt Reeves
Avec Andy Serkis, Gary Oldman, Jason Clarke, Keri Russell, Toby Kebbell, Kodi Smit-McPhee, Kirk Acevedo
THEMA SINGES I SAGA LA PLANETE DES SINGES
A quelques jours d’intervalle sortaient sur les écrans du monde entier Transformers 4 de Michael Bay et La Planète des Singes : l’Affrontement de Matt Reeves, qui poussaient dans leurs retranchements les possibilités incroyables des images de synthèse en proposant, chacun à sa manière, un spectacle totalement inédit. Ce fut l’occasion de mesurer l’abysse qui séparait les intentions des deux films. A ma droite : Michael Bay, pyrotechnicien régressif pour qui chaque avancée technologique permet de casser plus de jouets et de saturer son écran d’explosions, de destructions orgiaques jusqu’à l’indigestion. A ma gauche : Matt Reeves, qui emploie l’outil numérique comme véhicule d’émotion et de dramaturgie, sans jamais occulter la performance du comédien sous le déferlement spectaculaire. Et force est de constater qu’un simple gros plan sur le regard du chimpanzé César, d’une intensité quasi-hypnotique, s’avère mille fois plus impressionnant que tous les robots hystériques de Michael Bay.
Mine de rien, ces deux approches antithétiques permettent d’anticiper sur la manière dont le cinéma des décennies à venir utilisera la technologie digitale, divisant comme toujours les cinéastes en deux catégories : les auteurs et les faiseurs. Assez perdu de temps avec les Transformers, concentrons-nous sur cette magistrale séquelle de La Planète des singes : les origines qui va jusqu’à dépasser son modèle grâce à la mise en scène toute en retenue de Matt Reeves et au scénario audacieux de Rick Jaffa, Amanda Silver et Mark Bomback, privilégiant le point de vue des singes à celui des humains. De fait, la première partie du film nous familiarise avec la communauté simiesque qui s’est installée dans une forêt post-apocalyptique des Etats-Unis, vivant de chasse et de pêche selon un modèle assez proche de celui des hommes de Neanderthal, sous l’autorité du vénérable César (Andy Serkis toujours, dont la prestation incroyable mériterait largement un Oscar).
La guerre appelle la guerre
Mais le fléau qui a décimé l’humanité a épargné quelques individus, réunis dans le centre dévasté de San Francisco et unifiés tant bien que mal par l’ancien militaire Dreyfus (Gary Oldman). Bientôt à cours d’énergie, les humains souhaitent réactiver un barrage situé en lisière de forêt et dépêchent donc une petite expédition sur place. La rencontre avec les singes est inévitable, et les tensions qui en découlent laissent prévoir le pire. Chaque incident, chaque malentendu, chaque faux pas marque une progression vers l’affrontement qui semble inévitable, et que le sous-titre français annonce d’emblée. Les parallèles avec maints conflits ethniques bien réels nous viennent fatalement à l’esprit. Le fait que la guerre se déclare à cause de l’omniprésence d’armes à feu dans le camp des humains permet d’appréhender sans ambigüité le positionnement politique du film. D’autant qu’ici – et le cas est assez rare pour être signalé – aucun spectateur normalement constitué ne souhaite assister à cette bataille. Il s’avère en effet difficile de prendre parti pour l’un ou l’autre des deux fronts, tandis que l’espoir de paix s’érode inexorablement jusqu’à un climax époustouflant qui s’ouvre vers une nouvelle séquelle…
© Gilles Penso
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