L’ATLANTIDE (1932)

Le remake parlant de L'Atlantide de Jacques Feyder, avec dans le rôle de la reine Antinéa l'inoubliable Maria de Metropolis

L’ATLANTIDE / DIE HERRIN VON ATLANTIS

1932 – FRANCE / ALLEMAGNE

Réalisé par G.W. Pabst

Avec Brigitte Helm, Pierre Blanchar, Jean Angelo, Tela Tchaï, Vladimir Sokoloff, George Tourreil, Mathias Wieman, Florelle

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE

Jacques Feyder ayant refusé de réaliser lui-même le remake parlant de son Atlantide, c’est le cinéaste allemand Goerg Wilhlem Pabst qui prend le relais. Ce dernier multiplie les défis, car non content de boucler le tournage du film en un temps record de cinq mois, il met en boîte trois versions différentes avec trois castings distincts, respectivement en français, en allemand et en anglais. Dans la version française, c’est Pierre Blanchar qui incarne le lieutenant de St Avit. Alors qu’une émission radiophonique émet l’hypothèse de l’existence de l’Atlantide dans le désert du Sahara, ce dernier se rappelle la mésaventure dont il fut victime deux ans plus tôt. Un flash-back nous le montre arpentant le désert avec son ami le capitaine Morhange (Jean Angelo, qui tenait déjà le rôle en 1921), pour renseigner le gouvernement sur la situation trouble des pays du sud. 

Egarés au milieu des dunes, ils sont attaqués par des touaregs. Saint-Avit erre un temps dans un village arabe sans retrouver la trace de Morhange. Lorsqu’il s’évanouit, c’est pour s’éveiller dans un lieu inconnu dirigé par la reine Antinéa (Brigitte Helm, l’héroïne de Metropolis, qui joue le rôle dans les trois langues). Celle-ci l’accueille en partageant avec lui une partie d’échecs. L’un des Occidentaux jadis égarés dans cette Atlantide, Ivar Torstenson (Mathias Wieman), fou d’amour, se noie dans la drogue et l’alcool. Il meurt bientôt et a droit à des funérailles exotiques. Saint-Avit succombe à son tour à l’amour d’Antinéa. Or la souveraine est amoureuse de Morhange. « Je vous ai choisi » lui dit elle lascivement. « Ici les femmes choisissent, c’est la coutume de votre pays, ce n’est pas celle du mien », répond le capitaine français, avec la fierté machiste et patriotique du colon digne de ce nom. Or l’oracle prédit que : « celui qui a perdu aux échecs perdra le repos, celui qui a gagné en amour gagnera la mort ». Antinéa ordonne donc à Saint-Avit de tuer Morhange. Son forfait accompli, il s’enfuit avec la servante d’Antinéa, Tanit-Zerga (Tela Tchaï), aidé par un des gardes qui déclare, pour justifier ses actes : « le prophète permet au juste de placer une fois dans sa vie la pitié au-dessus du devoir. »

« Ici, les femmes choisissent… »

Même si cette Atlantide est deux fois plus courte que la version muette, force est de constater que son rythme semble plus lent. Ce travers est amplifié par un jeu d’acteurs exagérément théâtral (Pierre Blanchar déclame ses répliques aussi peu naturellement qu’un Jean-Pierre Léaud !), une mise en scène un peu brouillonne (cadrages approximatifs, mouvements de caméra accidentés, raccords imprécis), et des décors et costumes plutôt ordinaires. Le seul véritable apport de cette version, au-delà de la bande son, est la présence de Brigitte Helm, ô combien plus séduisante que Stacia Napierkowska. Certes, l’ex-Maria de Fritz Lang occupe bien peu de place à l’écran, se contentant de caresser son guépard en prononçant trois lignes de dialogue. Mais chacune de ses apparitions est d’une grande sensualité. Elle possède la beauté d’une statue grecque antique, ce que ne démentent pas ces plans magnifiques où Antinéa s’adosse à un grand visage sculpté imitant ses traits avec une troublante ressemblance. 

 

© Gilles Penso 

Partagez cet article