

Vincent Price et Peter Cushing partagent la vedette de ce film rocambolesque où un acteur spécialisé dans l’horreur est accusé de meurtres sanglants…
MADHOUSE
1974 – GB / USA
Réalisé par Jim Clark
Avec Vincent Price, Peter Cushing, Robert Quarry, Adrienne Corri, Natasha Pyne, Linda Hayden, Barry Dennen, Ellis Dale, Catherine Willmer, Michael Parkinson
THEMA TUEURS I CINÉMA ET TÉLÉVISION
Relativement peu connu malgré la présence en tête d’affiche de deux des plus grandes stars du cinéma d’épouvante des années 60/70, Madhouse n’est jamais sorti en salles en France. Le film s’inspire du roman Devilday d’Angus Hall dont Samuel Z. Arkoff, patron de la compagnie AIP, achète les droits en confiant le rôle principal à Vincent Price. En s’associant à la firme Amicus, Arkoff met sur pied une coproduction anglo-américaine et envisage dans un premier temps de confier la réalisation à Robert Fuest (L’Abominable docteur Phibes). Mais Fuest se désiste et laisse son poste vacant à Jim Clark, monteur très respectable (Les Innocents, Macadam Cowboy, Marathon Man) dont les travaux de mise en scène se limitaient jusqu’alors à quelques comédies polissonnes très anecdotiques. Pour donner la réplique à Price, les producteurs engagent Peter Cushing. C’est un événement, dans la mesure où les deux stars ne s’étaient encore jamais directement confrontées à l’écran. Tout semble donc bien engagé. Hélas, le scénario de Greg Morrison est jugé catastrophique et donc réécrit au fur et à mesure pendant le tournage par Ken Levison. Le fait que Price s’entende très mal avec le troisième rôle masculin principal, Robert Quarry (Comte Yorga), n’arrange pas non plus les choses.


Dans un rôle savoureusement autobiographique, Vincent Price incarne Paul Toombes, acteur spécialisé dans les films d’horreur qui doit sa popularité à une série de longs-métrages consacrés au maléfique « Doctor Death », un personnage imaginé par son ami scénariste Herbert Fley (Peter Cushing). Le film démarre à « Hollywood, quelques années auparavant », comme nous l’indique un carton introductif. Nous sommes le soir du nouvel an, et une petite sauterie mondaine organisée entre gens du cinéma permet de visionner le dernier opus de la saga « Doctor Death ». Toombes profite de cette soirée pour présenter publiquement sa nouvelle épouse. Mais il déchante en apprenant qu’elle a démarré sa carrière en jouant dans des films pornographiques. Soudain, le docteur Death pénètre dans le monde réel et commence à massacrer ceux qui tombent sous son couteau. S’agit-il de Toombes, devenu fou ? Ou de quelqu’un cherchant à le faire accuser ? Tandis que le mystère s’épaissit et que l’intrigue nous transporte en Angleterre, la liste des victimes s’allonge, chaque meurtre s’inspirant d’une scène de la série des « Docteur Death »…
Horror star
Ayant fait de la mise en abîme son maître-mot, Madhouse semble avoir été conçu comme un hommage à la carrière de Vincent Price, presque un film-testament. En puisant dans le patrimoine des productions AIP, Samuel Arkoff met à disposition de Jim Clark des extraits de L’Empire de la terreur, Le Corbeau, La Chambre des tortures, La Chute de la maison Usher ou La Malédiction d’Arkham. Dans le scénario, ces images sont censées provenir des films de la série « Doctor Death ». Boris Karloff et Basil Rathbone y apparaissent, ce qui nous vaut une étrange mention au générique les annonçant comme guest stars (alors que les deux comédiens sont décédés quelques années plus tôt). On sent aussi l’influence de L’Homme au masque de cire (la silhouette de Doctor Death y fait beaucoup penser) tandis que quelques autres clins d’œil ponctuent le métrage (lors d’une soirée costumée, Peter Cushing est habillé en Dracula et Robert Quarry en comte Yorga). Le problème majeur de Madhouse est son caractère anachronique. À l’heure où L’Exorciste et Massacre à la tronçonneuse sont en train de redéfinir les contours du cinéma d’horreur, ce « whodunit » à l’ancienne qui cultive une ambiance macabro-poétique héritée du cycle Poe/Corman et des films gothiques italiens (chandeliers, toiles d’araignée, vieilles voutes, brume sépulcrale) semble daté dès sa sortie. Les rebondissements improbables du dernier acte et les traits forcés des personnages (Price en fait des tonnes comme s’il rejouait le Lioneheart de Théâtre de sang) jouent aussi en défaveur de Madhouse, qui précipitera le double déclin d’AIP et d’Amicus. Pour autant, le film n’est pas dénué de charme et s’apprécie comme une petite bulle insolite et hors du temps.
© Gilles Penso
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