HOUSE OF THE DRAGON (2022-2024)

Plusieurs générations avant celles de Game of Thrones, le meurtre, la trahison, les complots et les créatures fantastiques étaient déjà au programme…

HOUSE OF THE DRAGON

 

2022/2024 – USA

 

Créée par Ryan Condal et George R.R. Martin

 

Avec Matt Smith, Emma D’Arcy, Olivia Cooke, Rhys Ifans, Steve Toussaint, Fabien Frankel, Sonoya Mizuno, Milly Alcock, Emily Carey, Paddy Considine

 

THEMA HEROIC FANTASY I DRAGONS

C’est en 2015, alors que Game of Thrones continue de rameuter les foules du monde entier devant leurs petits écrans, que les dirigeants de la chaîne HBO commencent à réfléchir à un moyen de continuer à exploiter cette franchise au-delà de la série principale. À leur demande, l’idée d’un spin-off se met bientôt à germer dans l’esprit de l’écrivain par qui tout a commencé, George R.R. Martin. La série dérivée est annoncée en 2018, mais rien n’est encore officiel. Sollicités pour s’y atteler, David Benioff et D. B. Weiss, les créateurs du show original, préfèrent décliner la proposition pour éviter de se répéter et pour s’intéresser à d’autres projets. C’est finalement George R.R. Martin lui-même, associé à Ryan Condal (scénariste de Hercule et Rampage), qui initie House of the Dragon. Le concept de cette série consiste à raconter les événements situés plusieurs générations avant ceux de Game of Thrones en s’intéressant tout particulièrement à la maison Targaryen. Personne n’est dupe : il sera très difficile – voire impossible – de rivaliser sur son propre terrain avec la première série, véritable phénomène planétaire ayant quelque peu bouleversé les codes télévisuels. Pour autant, HBO met toutes les chances de son côté, allouant à chaque épisode un budget confortable, des comédiens solides et des réalisateurs aguerris. Il n’est pas question de décevoir le public accroc au « Trône de fer ».

Le fait d’employer en guise de thème musical principal le célèbre générique composé par Ramin Djawadi est d’emblée déconcertant, nous donnant l’impression que House of the Dragon n’est pas une série à part entière mais une simple variante destinée à prolonger le plaisir des téléspectateurs. Ce choix est d’autant plus discutable que le show de Ryan Condal et George R.R. Martin possède indubitablement sa propre personnalité. Certes, les ingrédients avec lesquels nous sommes déjà familiers sont toujours au programme, notamment l’alternance des séquences intimistes (intrigues de cour, stratégies, trahisons, coucheries) et des moments épiques et grandioses (batailles homériques, attaques incendiaires de dragons), ainsi que l’absence de retenue en ce qui concerne le sexe et la violence. Mais House of the Dragon parvient très tôt à trouver le juste équilibre, assumant l’influence inévitable de la série originale tout en définissant ses propres codes. À travers le destin du vieux roi Jaehaerys 1er Targaryen et de sa descendance, c’est un portrait bien peu reluisant des dynasties royales que nous dresse cette « Maison du Dragon » gorgée d’hypocrisie, de mensonges, de frustrations, de calomnies et de jalousies.

Un air de famille

Les manigances, l’incessant manège des successions, les sombres secrets familiaux s’égrènent ainsi au fil des épisodes, dans un monde où le devoir, l’honneur, la réputation et le rang prévalent systématiquement sur les sentiments, les désirs et les envies. Ici, les mariages ne sont pas des décisions romantiques mais des actions politiques. L’inceste lui-même ne fait pas peur, puisque seule prime la pureté de la lignée. On finit même par s’y perdre avec ces femmes qui épousent leurs oncles, ces demi-frères qui sont aussi cousins et neveux… Car au royaume de House of the Dragons, la consanguinité prime. Si les épisodes ne bénéficient pas tous de la même intensité dramatique, la qualité de la direction artistique, la solidité de la mise en scène, la finesse des dialogues et l’excellence de l’interprétation demeurent constantes. Il faut certes avouer que les changements de casting en cours de route, induits par le vieillissement des personnages, sont un peu déstabilisants et nécessitent une réadaptation de l’empathie des téléspectateurs, laquelle est de toutes façons mise à mal par le comportement unilatéralement détestable de la grande majorité des protagonistes. Car lorsque Emma D’Arcy et Olivia Cooke reprennent à mi-parcours de la première saison les rôles respectifs de la princesse Rhaenys et de la reine Alicent (tenus avant elles par Milly Alcock et Emily Carey), leurs personnalités semblent changer radicalement en même temps que leurs traits. Le trouble qu’engendre cette double « métamorphose » s’atténue par la suite, mais c’est une étrangeté qui nécessite de la part des spectateurs une certaine suspension d’incrédulité. À ces quelques réserves près, force est de reconnaître que Ryan Condal et George R.R. Martin ont su trouver la formule idéale pour poursuivre le culte généré par Game of Thrones.

 

© Gilles Penso


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