SHRIEKER (1998)

Six étudiants qui logent illégalement dans un hôpital désaffecté font face à un démon hurleur capable de se téléporter…

SHRIEKER

 

1998 – USA

 

Réalisé par David DeCoteau

 

Avec Tanya Dempsey, Jamie Gannon, Parry Shen, Alison Cuffe, Thomas R. Martin, Chris Boyd, Jenya Lano, Jason-Shane Scott, Brannon Gould, Rick Buono

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS I SAGA CHARLES BAND

Entre 1998 et 2000, pas moins de treize longs-métrages réalisés par le stakhanoviste David DeCoteau seront sortis dans les bacs vidéos pour le compte du producteur Charles Band, qu’il s’agisse d’alimenter la compagnie Full Moon (Le Retour des Puppet Masters, Talisman, Alien Arsenal, Witchouse, Totem, Retro Puppet Master, Voodoo Academy), d’enrichir le catalogue des aventures calibrées pour le jeune public (Frankenstein Reborn !) ou d’enfiler les escapades érotiques destinées à un public plus averti (Contes macabres : la reine du château, The Killer Eye). Fidèle à ses habitudes, DeCoteau parvient à boucler Shrieker en un temps record (six jours de tournage seulement) et en le signant d’un de ses nombreux pseudonymes (ici Victoria Sloan). Malgré les restrictions de temps et d’argent, notre homme tient à soigner ce petit film d’horreur qu’il tourne au format Cinemascope 2 :35, même si malheureusement son exploitation en VHS n’offrira aux spectateurs qu’une version recadrée en 4/3. Le concept de Shrieker, qui s’appuie sur un scénario de Neal Marshall Steven (sous son nom d’emprunt habituel Benjamin Carr) semble vouloir concilier trois motifs horrifiques disparates en un tout relativement cohérent : le monstre tapi dans l’ombre façon Alien, les rites occultes voués à éveiller une créature démoniaque et le slasher pour ados réactivé par le succès de Scream. La mayonnaise ne prend pas toujours très bien, mais l’initiative reste très sympathique.

Nous suivons cette histoire étrange avec les yeux de Clark (Tanya Dempsey), une étudiante en mathématiques sans le sou qui n’a ni les moyens de se payer un logement sur le campus où elle travaille, ni même une colocation. Un autre étudiant, Zak (Jamie Gannon), lui fait alors part d’une solution inespérée : un hôpital abandonné dans lequel il s’est installé avec plusieurs amis. L’endroit est spacieux, organisé comme une petite communauté que mène l’autoritaire David (Parry Shen), avec à ses côtés l’étudiante en médecine Elaine (Jenya Lano), l’activiste communiste Tanya (Alison Cuffe) et le roi du bricolage Mike (Chris Boyd). Clark est acceptée par le groupe à condition de ne parler à personne de ce squat de luxe. La situation semble idéale. Mais parfois, des grognements bestiaux se font entendre dans les couloirs au beau milieu de la nuit. En effectuant des recherches, Clark découvre que l’hôpital a été abandonné à cause d’une série de meurtres commis dans les années 1940 par « le hurleur », un étrange tueur qui n’a jamais été capturé. Or quelqu’un, caché dans l’hôpital, semble pratiquer des rites occultes pour ramener à la vie un monstre qui serait l’auteur de ces crimes du passé…

Le cri qui tue

DeCoteau s’efforce de pratiquer le grand écart entre les codes du slasher classique (les étudiants et leurs histoires personnelles ou sentimentales, la recherche du coupable) et ceux d’un conte fantastique déconnecté de la réalité tangible. Nous avons donc d’un côté des personnages plutôt attachants, quelques dialogues incisifs et des traits d’humour réussis (comme le personnage de Mike qui insiste lourdement pour dire qu’il n’est pas gay, ce qui ne manque pas de sel quand on connaît la filmographie et la personnalité du réalisateur). De l’autre, nous découvrons cette créature au concept original (une sorte de démon humanoïde affublé de deux têtes simiesques siamoises) capable de traverser les murs et de se téléporter avant de frapper ses victimes. Les deux idées fonctionnent indépendamment, mais lorsque le scénario s’efforce de les combiner, Shrieker devient chaotique. Car à ce stade, les dialogues se révèlent surexplicatifs dans le but de nous donner le mode d’emploi qui régit le comportement de la bête et la suspension d’incrédulité s’évapore. On note que le principe du parchemin dont les victimes potentielles doivent se débarrasser avant d’être attaquées par le démon est directement emprunté à Rendez-vous avec la peur de Jacques Tourneur. Le film se suit sans déplaisir malgré ses faiblesses d’écriture, agrémenté d’une belle photographie de Brad Rushing et de maquillages spéciaux originaux signés Mark Williams (qui concevait la même année la créature de Frankenstein Reborn !).

 

© Gilles Penso


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