AIMEE : THE VISITOR (2023)

Après Siri et Alexa, voici Aimee, la nouvelle génération d’intelligence artificielle : sexy, jalouse et très dangereuse…

AIMEE : THE VISITOR

 

2023 – USA

 

Réalisé par Charles Band

 

Avec Dallas Schaefer, Faith West, Felix Merback, Tom Dacey Carr, Joe Kurak, Liz Jordan, Lexi Lore

 

THEMA ROBOTS ET INTELLIGENCE ARTIFICIELLE I SAGA CHARLES BAND

Véritable tête chercheuse à l’affut de tout ce qui pourrait faire du buzz ou s’inscrire dans l’air du temps, le producteur Charles Band décide de ne pas passer à côté du phénomène de l’intelligence artificielle qui transforme peu à peu des considérations de pure science-fiction en réalité tangible. Il s’attelle alors à un petit film de SF dont il prend lui-même en charge la réalisation en s’appuyant sur un scénario de Neal Marshall Stevens (qui utilise ici le pseudonyme de Roger Barron). Le texte d’introduction du film exprime en toutes lettres son argument marketing principal : « Le film que vous allez voir met en scène un personnage qui utilise la technologie moderne de l’IA. Aimee elle-même n’est pas interprétée par une actrice et n’a pas été conçue à l’aide d’effets spéciaux numériques. Elle est en fait la toute première femme fatale créée par l’IA dans l’histoire du cinéma. » L’idée du film consiste ainsi à faire fusionner le fond et la forme. L’intelligence artificielle qu’il met en scène, AIMEE (acronyme de « Advanced Intimate Model of Euphoric Entertainment », c’est-à-dire « Modèle intime avancé de divertissement euphorique », tout un programme !) est elle-même conçue avec l’assistance de l’IA, sous la supervision du créateur d’effets visuels Chuck Cirino (dont le travail ne se distingue habituellement pas par sa finesse, comme en témoignent des films tels que Attack of the 50 Foot CamGirl ou Killbots).

Scott Keyes (Dallas Schaefer) est un pirate informatique brillant mais misanthrope qui préfère généralement la compagnie des ordinateurs à celle des humains. Son activité préférée : se faire livrer par un fast-food et regarder des films pornographiques entre deux piratages. Dans l’immeuble qu’il possède, il loue un appartement à un frère et une sœur, Hunter (Felix Merback) et Gazelle (Faith West), qui sont des hackers talentueux et l’aident donc dans ses travaux illicites. Gazelle en pince un peu pour lui mais notre homme est trop obnubilé par ses activités solitaires pour s’en rendre compte. Un jour, Hunter et Gazelle lui apportent un nouveau programme d’intelligence artificielle qu’il débloque pour en découvrir les capacités. Au départ, AIMEE (c’est son petit nom) a tout de l’assistant virtuel efficace à la voix enjôleuse auquel le programme a ajouté un visage féminin très avenant. Scott se laisse séduire par cet outil puissant et très ergonomique. Mais AIMEE n’est-elle pas en train de développer une personnalité propre, des sentiments étrangement humains et des intentions inavouées ?

Les Prométhées modernes

La situation est familière et nous évoque plusieurs films ayant déjà abordé à leur manière nos relations complexes aux outils informatiques, le scope allant de Génération Proteus à Her en passant par Electric Dreams et Blade Runner. AIMEE : The Visitor assume ce prestigieux passé, laissant même l’un des personnages s’inquiéter en ces termes : « C’est peut-être le prochain niveau de Terminator ! » Mais ce film sans prétention tire son efficacité d’une approche relativement réaliste et minimaliste, construisant par petite touches une relation homme/machine qui bascule progressivement dans une zone trouble qui n’est pas si éloignée de nos comportements réels vis-à-vis de l’intelligence artificielle. Le budget limité oblige à restreindre les décors, les personnages et les situations mais ce n’est pas plus mal, cette triple unité évitant d’inutiles digressions (dont l’une aurait d’ailleurs pu être évitée, celle des deux « hommes en noir » qui interviennent brièvement en début de métrage). L’aspect le plus intéressant du scénario est le triangle amoureux qui s’installe entre Scott, Gazelle et AIMEE. « C’est la première fois que deux filles s’intéressent à moi en même temps » finit par dire notre homme dépassé par la situation. La suite des événements se déroule selon un schéma que l’on connaît déjà et qui évacue toute réelle surprise. Mais le final, nihiliste et désespéré, n’en perd pas son impact pour autant, avec à la clé une interrogation lancinante héritée du « Frankenstein » de Mary Shelley : jusqu’où peut-on jouer à l’apprenti-sorcier sans en mesurer gravement les conséquences ?

 

© Gilles Penso


Partagez cet article