HORREUR À VOLONTÉ (1970)

Dans cette adaptation libre d’une nouvelle de H.P. Lovecraft, Dean Stockwell campe un homme mystérieux à la recherche du Necronomicon…

THE DUNWICH HORROR

 

1970 – USA

 

Réalisé par Daniel Haller

 

Avec Sandra Dee, Dean Stockwell, Ed Begley, Lloyd Bochner, Sam Jaffe, Joanne Moore Jordan, Donna Baccala, Talia Shire, Michael Fox, Jason Wingreen

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

Après s’être frotté avec succès aux écrits d’Edgar Allan Poe à travers le fameux cycle d’adaptations réalisé par Roger Corman, la compagnie AIP essaie de poursuivre dans la même voie en s’attaquant à un romancier pas encore très populaire à l’époque : H.P. Lovecraft. L’inventeur du mythe de Cthulhu et du Necronomicon est si peu connu dans les années 60 que la première tentative qu’ils effectuent dans ce domaine, La Malédiction d’Arkham, est « déguisée » en adaptation d’Edgar Poe. Entre-temps, le nom de Lovecraft commence à circuler plus largement et devient donc un argument marketing plus concluant. AIP confie donc à Daniel Haller Le Messager du diable, qui s’inspire de la nouvelle La Couleur tombée du ciel, puis Horreur à volonté, tiré de l’histoire L’Abomination de Dunwich. Mario Bava est un temps envisagé pour diriger le film, avec en tête d’affiche Boris Karloff et Christopher Lee (tous deux ayant été dirigés respectivement dans Les Trois visages de la peur et Le Corps et le fouet par le cinéaste italien). Mais le cuisant échec au box-office de L’Espion qui venait du surgelé, réalisé par Bava, enterre le projet. D’où le retour de Daniel Haller derrière la caméra et la sollicitation d’un autre casting.

Le scénario d’Horreur à volonté est co-écrit par Henry Rosenbaum, Ronald Sikovsky et Curtis Hanson. Ce dernier, ancien critique de cinéma, deviendra plus tard le réalisateur à succès de L.A. Confidential. À vrai dire, ce script prend beaucoup de libertés avec la nouvelle qui l’inspire pour n’en garder que quelques idées éparses. La scène d’introduction – l’accouchement douloureux d’une femme autour de ce qui ressemble à une assemblée de sorciers – cligne manifestement de l’œil vers Rosemary’s Baby. Nous changeons ensuite de décor pour nous retrouver dans la prestigieuse université de Miskatonic, dont la bibliothèque est dirigée par le docteur Henry Armitage (Ed Begley) avec l’assistance de Nancy Wagner (Sandra Dee). Un homme énigmatique incarné par Dean Stockwell (enfant star du Garçon aux cheveux verts et futur partenaire de Scott Bakula dans Code Quantum) fait soudain son apparition. Son nom : Wilbur Whateley. Sa requête : consulter l’exemplaire du Necronomicon – livre de sorcellerie et de démonologie à la réputation sulfureuse – que les bibliothécaires gardent sous clé. Nancy se laisse séduire par ce ténébreux inconnu sans se douter de la tournure terrifiante que s’apprêtent à prendre les événements…

Crise d’identité

La romance qui va bientôt servir de moteur à l’intrigue est résolument étrangère à la prose de Lovecraft, qui décrivait Wilbur comme un homme immense et mal proportionné, au teint bistré et au faciès de bouc. Nous sommes bien loin du dandy qu’incarne ici Stockwell ! Encore sous influence du cycle Corman/Poe, à cheval entre le classicisme des années 60 et la libération des mœurs des années 70, Horreur à volonté témoigne d’une sorte de « crise d’identité » qui ne joue pas forcément en sa faveur. On se perd d’ailleurs en conjectures face à la réinterprétation libre des rituels démoniaques imaginés par Lovecraft. Ici, il faut lire le Necronomicon et sacrifier une vierge sur un ancien autel pour réveiller les Grands Anciens et les faire revenir dans notre monde. Daniel Haller tente alors une scène érotique timide, occultant la nudité de la doublure de Sandra Dee avec un filtre texturant l’image. Le monstre vedette du film lui-même nous déçoit. L’écrivain nous laissait imaginer une créature hybride mêlant une infinité de tentacules, de pattes, d’yeux protubérants, de gueules et de trompes avec un visage à moitié humanoïde – une description cauchemardesque que nous offre assez fidèlement le poster du film. Mais à l’écran, il nous faudra nous contenter d’une marionnette peu convaincante que la mise en scène masque prudemment par un montage épileptique et des filtres de couleurs. Restent de très beaux décors (la vaste demeure gothique des Whateley, l’autel à flanc de falaise), une ambiance fantastico-mélancolique intéressante et la prestation de Dean Stockwell qui réapparaîtra dans Necronomicon : le livre de Satan, une autre adaptation de la même nouvelle réalisée en 2008.

 

© Gilles Penso

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