

Interné après avoir brûlé vif l’agresseur de sa fille avec un chalumeau, un homme revient hanter les lieux du crime…
MANIAC
1963 – GB / FRANCE
Réalisé par Michael Carreras
Avec Kerwin Mathews, Nadia Gray, Donald Houston, Liliane Brousse, George Pastell, Arnold Diamond, Norman Bird, Justine Lord, Jerold Wells
THEMA TUEURS
À contre-courant des films d’épouvante gothiques avec lesquels la compagnie Hammer s’était forgée une solide réputation, Hurler de peur s’aventurait sur un terrain différent, préférant aux châteaux hantés, aux vampires et aux savants fous une horreur psychologique contemporaine héritée de Psychose et des Diaboliques. Le succès du long-métrage de Seth Holt surprit agréablement Michael Carreras, patron de la Hammer, qui décida de poursuivre dans la même voie en passant lui-même derrière la caméra à l’occasion de Maniac. Comme pour Hurler de peur, l’intrigue se situe dans le sud de la France, plus précisément en Camargue, une région qui séduisit le producteur et scénariste Jimmy Sangster pour sa photogénie et sa nature sauvage aux vastes étendues désertes. Les moyens mis à la disposition du film restent modestes – 300 000 dollars de budget, cinq semaines de tournage -, ce qui implique un certain nombre de restrictions qui ne seront pas toujours du goût de Sangster. Ce dernier espérait en effet un résultat de plus grande envergure. Le rôle masculin principal est attribué à Kerwin Mathews (Le 7ème voyage de Sinbad, Jack le tueur de géants, Les Voyages de Gulliver), alors sous contrat chez le studio Columbia qui participe au financement du film et à sa distribution en Amérique.


Un carton d’introduction nous donne le ton : « La Camargue… une région du sud de la France où vivent les chevaux sauvages, où sont élevés les taureaux de combat et où la violence n’est jamais loin… » Nous sommes dans la petite commune (imaginaire) de Sainte-Gironde. Alors qu’elle rentre à pied de l’école, l’adolescente Annette (Liliane Brousse) croise la route de Janiello (Arnold Diamond) qui propose de la raccompagner en voiture. Mais l’homme est un pervers qui entraîne la jeune fille dans un coin de nature et la viole, sous le regard d’un jeune témoin qui va chercher le père de la victime. Celui-ci arrive aussitôt, s’empare de l’agresseur, l’enferme dans son garage et le brûle vif avec son chalumeau. Maniac démarre donc assez fort. Quatre ans plus tard, Geoff Farrell (Kerwin Mathews), un peintre américain qui vient de se disputer avec sa petite amie, débarque dans le village. Il prend une chambre dans la modeste pension où travaille Annette et commence à lui faire du gringue, ce qui n’est pas du goût de sa belle-mère Eve (Nadia Gray). Le mari de cette dernière, surnommé « le tueur à l’acétylène », a été arrêté après son crime et enfermé dans un hôpital psychiatrique près d’Avignon. Mais l’assassin s’apprête à refaire parler de lui…
« Le tueur à l’acétylène »
Les premières minutes de Maniac savent saisir le spectateur et le secouer avec efficacité. La mise en scène inventive de Carreras joue sur les ruptures, les entrées dans le champ qui redéfinissent la composition des cadres ou les effets de montage inattendus, le tout aux accents d’une musique jazz mystérieuse de Stanley Black qui évoque certains travaux de Lalo Schifrin et John Barry. Après cette entrée en matière choc, le ton change et le rythme s’alanguit, comme ensommeillé par la chaleur provençale, tandis qu’une petite rivalité amoureuse se met en place autour du peintre nonchalant qu’incarne Mathews. L’intrigue devient policière à mi-parcours, puis retrouve son caractère horrifique lorsque le tueur entre à nouveau en scène. Maniac jongle ainsi avec plusieurs genres qu’il essaie d’harmoniser du mieux qu’il peut, les manigances, les complots et les retournements de situation s’enchaînant sous l’influence manifeste des Diaboliques. On sent bien que certains personnages cachent leur jeu, mentent, tirent les ficelles, sans que nous soyons capables de comprendre le fin mot de l’histoire jusqu’à un climax très hitchcockien situé dans les carrières vertigineuses des Beaux-de-Provence. Les extérieurs captés dans le sud de la France tranchent d’ailleurs spectaculairement avec l’atmosphère habituelle des films Hammer (cavalcades à cheval sur les plages camarguaises, promenades dans le marché et les arènes d’Arles, virées entre Avignon et Marseille). Ce n’est pas la moindre singularité de ce thriller horrifique imparfait mais très prenant.
© Gilles Penso
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