Très supérieur aux deux épisodes précédents, ce troisième opus ressuscite le clown démoniaque, flanqué de trois compagnons de jeu monstrueux…
KILLJOY 3 / KILLJOY’S REVENGE
2010 – USA
Réalisé par John Lechago
Avec Darrow Igus, Mark Freedom, Trent Haaga, Al Burke, Tai Chan Ngo, Victoria De Mare, Jessica Whitaker, Spiral Jackson, Michael Rupnow, Olivia Dawn York
THEMA DIABLE ET DÉMONS I SAGA KILLJOY I CHARLES BAND
Réalisateur de films d’horreur indépendants à tout petit budget (Bloodgnome, Magus), John Lechago attire l’attention de Stuart Gordon, le légendaire metteur en scène de Re-Animator et From Beyond, qui organise sa rencontre avec le producteur Charles Band. Or ce dernier cherche un artiste multi-talents pour concevoir les effets visuels de son film Ghost Poker. Heureux de cette collaboration, Band propose à Lechago de réaliser pour lui le troisième épisode de la saga Killjoy. Cette décision peut sembler surprenante, dans la mesure où les deux premiers opus n’avaient pas soulevé un grand enthousiasme. Mais au tout début des années 2010, Band cherche à donner un second souffle à d’anciennes franchises en sommeil. D’où la réalisation conjointe de Demonic Toys 2, Puppet Master : Axis of Evil et Killjoy 3, ces deux derniers présentant la particularité d’être tournés en même temps en Chine, sur les plateaux de la compagnie ACE Studio qui participe à leur financement. Convaincre Trent Haaga de revenir faire le clown huit ans après le second épisode n’est pas une mince affaire, d’autant qu’entre-temps le producteur/scénariste/acteur a connu un beau succès d’estime en écrivant le script de Deadgirl. Mais la lecture du scénario de Killjoy 3 et la perspective d’un tournage en Chine le séduisent.
La séquence d’ouverture crée déjà une rupture avec les deux films précédents. Un homme (Darrow Igus) y verse son sang pour invoquer le démoniaque Killjoy. Celui-ci apparaît sous une forme « primitive », sa perruque de clown étant remplacée par une paire de cornes et des oreilles pointues de diable. À ses côtés surgissent aussitôt trois autres personnages hauts en couleur : Punchy le clown clochard géant (Al Burke), Freakshow le mime sinistre dont le flanc est raccordé à un bébé monstrueux (Tai Chan Ngo), et la succube lascive Batty Boop (Victoria De Mare). Mais avant que ce quatuor grotesque n’ait le temps de faire quoi que ce soit, le charme se rompt et ils se volatilisent dans les limbes. Le film nous présente alors ses personnages principaux : quatre étudiants qui gardent la maison d’un de leur professeur pendant son absence. Un matin, ils découvrent un mystérieux paquet laissé pendant la nuit sur le pas de la porte. A l’intérieur se trouve un vieux miroir antique qu’ils accrochent au mur. Mais s’ils ont le malheur de s’en approcher, le miroir les transporte dans un monde parallèle coloré où sévissent Killjoy et ses sbires, avides d’âmes à collecter et de jeux infernaux à organiser.
Les jeux du cirque
De toute évidence, John Lechago est ce qui pouvait arriver de mieux à la bancale franchise Killjoy. Non content de soigner tout particulièrement la mise en forme du film (la photographie, les décors, la direction artistique, les maquillages spéciaux), l’auteur/réalisateur tient à enrichir le mythe du clown diabolique en réinterrogeant sa nature démoniaque. « Nous avons créé les démons, nous avons créé les religions, nous avons créé les livres pour les invoquer, nous les nourrissons avec nos pensées, nos prières et nos sacrifices » explique le personnage du professeur pour justifier l’existence et les agissements du monstre. S’il refuse de poursuivre dans la voie des « films urbains » de post-blaxploitation (qu’il juge très stéréotypés et datés), Lechago tisse malgré tout un lien direct avec le premier film, clé du rebondissement final de Killjoy 3. Bourré de surprises, d’idées visuelles originales (le combat de boxe avec les poings surdimensionnés, les meurtres au marteau géant, le macabre banquet final) et de gags (l’un des protagonistes parle d’inégalités sociales avec un des clowns pour le pousser à refuser d’être exploité par son boss), Killjoy 3 offre également la possibilité à Trent Haaga de transcender sa prestation précédente. Cette fois-ci, son démon ne se contente pas de ricaner bêtement. Il est drôle, effrayant et même pathétique. Bref, voilà une étonnante résurrection à laquelle personne n’aurait cru.
© Gilles Penso
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