LE CIRQUE DES VAMPIRES (1972)

Au 19ème siècle, un village en quarantaine est visité par un cirque ambulant que dirigent de redoutables suceurs de sang…

VAMPIRE CIRCUS

 

1972 – GB

 

Réalisé par Robert Young

 

Avec Adrienne Corri, Thorley Walters, Anthony Higgins, Laurence Payne, John Moulder-Brown, Richard Owens, Lynne Frederick, Elizabeth Seal

 

THEMA VAMPIRES

En découvrant le scénario du Cirque des vampires écrit par Jud Kinberg, James Carreras, président et fondateur de Hammer Films, s’affole. Ses relations avec son fils Michael, à la tête des productions de la compagnie, sont tendues depuis bien longtemps. Il lui fait donc part de ses réserves dans l’un de leurs nombreux échanges épistolaires conservés dans les archives de la Hammer. « Nous avons déjà eu des problèmes considérables par le passé avec la censure », écrit-il. « Je prédis que si le film est tourné tel qu’il est écrit, 50% finira sur le sol de la salle de montage. Essaie un peu d’imaginer les ventes télévisées – qui représentent une grande part de nos revenus. Tu risques de te retrouver avec un film de 50 minutes. Qu’est-il arrivé à nos beaux films de vampires et de Frankenstein que nous faisions sans besoin d’y ajouter tout ce gore et tout ce contenu malsain ? » (1). Nostalgique de l’âge d’or de la Hammer, celui de Frankenstein s’est échappé et Le Cauchemar de Dracula, Carreras Sr. a du mal à épouser l’air du temps et tient à le faire savoir. Son fils lance pourtant la production à peu près telle qu’elle est prévue et en confie les rênes à Robert Young en utilisant les mêmes décors que ceux des Sévices de Dracula.

Futur metteur en scène des comédies britanniques Grandeur et descendance et Créatures féroces, Young n’a encore réalisé aucun long-métrage à cette époque et n’est guère familier avec les méthodes économes de la compagnie. Son tournage finit par prendre un retard considérable. Au bout de sept semaines, Carreras est contraint d’interrompre la production pour stopper l’hémorragie financière et confie les images au monteur Peter Musgrave en lui demandant de se débrouiller avec ce qu’il a. Malgré ces conditions de travail chaotiques, Le Cirque des vampires se tient plutôt bien. L’intrigue se situe en 1810, dans le petit village européen de Schtettel où les jeunes femmes sont corrompues par le comte vampire Mitterhouse (Robert Tayman), maudissant les lieux avant de périr sous les assauts des villageois. Quinze ans plus tard, alors qu’une sorte de peste s’est abattue sur les habitants de Schtettel, le petit « Cirque des Nuits » s’installe dans le village. Or son directeur, Emil (Anthony Higgins), n’est autre que le cousin de Mitterhouse, bien décidé à assouvir une vengeance familiale…

Du sang sur la piste

Le prologue du film donne le ton : nudité, châtiments corporels, sadomasochisme, meurtres sanglants et même la suggestion malsaine d’un acte pédophile. Le spectacle nocturne qu’offre d’ailleurs le cirque aux habitants médusés est loin d’être orthodoxe. N’y voit-on pas une chorégraphie évoquant l’accouplement entre un dompteur de fauve et une femme entièrement nue maquillée en tigre ? De fait, les corps se dénudent souvent dans le film de Young, conformément à la libération des mœurs qui influençait alors le genre fantastique. Mais outre l’érotisme habituellement associé au vampirisme, le mythe se complète ici d’un don magique pour la métamorphose. Non contents de se muer en chauves-souris, les suceurs de sang peuvent adopter l’apparence de fauves, reflet idéal de la bestialité à peine camouflée par leur apparence humaine. L’association du monde du cirque au folklore vampirique est loin d’être inintéressante, même s’il faut reconnaître que l’intrigue du Cirque des vampires finit par patiner un peu en répétant inlassablement les mêmes situations. Les spectateurs attentifs reconnaîtront sous les traits de l’homme fort du cirque, bâti comme une statue d’Hercule, l’acteur David Prowse, qui incarna à deux reprises le monstre de Frankenstein pour la Hammer (dans Les Horreurs de Frankenstein et Frankenstein et le monstre de l’enfer) avant de devenir célèbre sous le casque de Dark Vador. Comme James Carreras l’avait prévu, le film fut sévèrement raccourci et radouci pour son exploitation aux États-Unis et à la télévision.

 

(1) Extrait d’un courrier datant du 26 juillet 1971.

 

© Gilles Penso


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