KRAVEN THE HUNTER (2024)

Le chasseur de fauves bien connu des amateurs de Spider-Man fait ses premiers pas à l’écran sous les traits d’Aaron Taylor-Johnson…

KRAVEN THE HUNTER

 

2024 – USA

 

Réalisé par J.C. Chandor

 

Avec Aaron Taylor-Johnson, Ariana DeBose, Fred Hechinger, Alessandro Nivola, Christopher Abbott, Russell Crowe, Yuri Kololnokov, Levi Miller, Tom Reed

 

THEMA SUPER-VILAINS I SAGA MARVEL COMICS

Après trois Venom, un Morbius et une Madame Web, le studio Sony/Columbia continue à faire du « Spider-Man sans Spider-Man » en capitalisant sur les personnages périphériques de l’univers de l’homme-araignée dont il a encore les droits. D’où la mise en avant de Kraven le chasseur, apparu pour la première fois dans les pages d’Amazing Spider-Man en août 1964. Ce fameux émule du comte Zaroff, vêtu d’une peau de lion comme s’il voulait faire de la concurrence au demi-dieu Hercule, aura longtemps joué l’arlésienne au cinéma. Sam Raimi l’envisageait pour un Spider-Man 4 qui ne vit jamais le jour. Le film Sinister Six (lui aussi annulé) devait le mettre en scène aux côtés de cinq autres vilains dans la foulée de The Amazing Spider-Man 2. Ryan Coogler quant à lui voulait l’opposer au prince T’Challa dans Black Panther avant d’apprendre que les droits du personnage n’appartenaient pas au studio Marvel… Bref, la balle était dans le camp de Sony, qui décida enfin de porter le chasseur à l’écran en confiant l’écriture du scénario à Richard Wenk sur la foi de son travail sur The Equalizer 2. Le rôle-titre est attribué à Aaron Taylor-Johnson qui, depuis Kick-Ass, aura fait du chemin. Le frêle adolescent s’est en effet mué en montagne de muscles. Après ses prestations remarquées dans Godzilla, Avengers : l’ère d’Ultron, Tenet et Bullet Train, le voilà donc dans la peau de Sergeï Kravinoff, alias Kraven.

Kraven the Hunter surprend d’emblée par la violence de ses scènes de combat, le chasseur n’hésitant pas à semer les cadavres ensanglantés sur son chemin (avec quelques écarts presque gore plutôt inattendus). Mais paradoxalement, puisque Sony a décidé de transformer les super-vilains en héros, cet assassin est « politiquement correct », dans la mesure où il défend les espèces protégées et ne tue que les gangsters et les braconniers. Le personnage initialement créé par Stan Lee et Steve Ditko est donc totalement dénaturé, puisqu’il s’agissait d’un chasseur de fauves fier de remplir ses appartements avec les dépouilles de toutes les bêtes sauvages ayant eu le malheur de croiser sa route. Le Kraven de Sony n’est clairement pas du même calibre. Il a un code d’honneur, luttant non seulement contre les mafieux mais aussi contre d’autres super-vilains dont le studio possède encore les droits, y compris – attention spoiler, ne pas lisez les lignes qui suivent si vous souhaitez conserver certaines surprises et passez directement au paragraphe suivant – y compris donc un Rhino beaucoup plus convaincant que la version Transformers que nous proposait The Amazing Spider-Man 2, même si son intervention reste finalement très anecdotique. Sans compter la présence d’un second couteau né dans les pages de Spectacular Spider-Man, L’Étranger, et l’annonce lourdement insistante d’un autre méchant que les lecteurs des Marvel comics connaissent bien puisqu’il s’agit du propre frère de Kraven, autrement dit le Caméléon.

Les chasses du comte Kravinoff

Les précédents opus du « Sonyverse » nous avaient tellement déçu qu’il n’y avait rien à espérer de cette sixième itération. La surprise est donc agréable. Si l’on considère la médiocrité globale des épisodes du Marvel Cinematic Universe déployés dans le sillage d’Avengers Endgame, on aurait même tendance à marquer ce Kraven d’une pierre blanche. Certes, le scénario est d’une balourdise assez exaspérante, la prestation de Russell Crowe dénuée de toute finesse et les motivations des personnages aussi crédibles que Francis Huster dans Parking. Mais Aaron Taylor-Johnson entre fort bien dans la peau du personnage, mouille visiblement la chemise et se plonge dans des scènes d’action folles qui – même si elles sollicitent des doubles numériques souvent très voyants – savent mettre le paquet question adrénaline, notamment une poursuite frénétique qui commence à pied, continue en voiture et se prolonge en hélicoptère. Le dernier acte semble chercher son inspiration quelque part à mi-chemin entre Predator et Robowar (oui, oui) jusqu’à un climax qui en fait trop, saturant la forêt qui n’en demandait pas tant de milliers d’animaux numériques en furie. Rien qui mérite d’inscrire Kraven the Hunter au registre du patrimoine culturel, certes, mais la mission divertissante est accomplie. Dans un monde parallèle, nous n’aurions d’ailleurs pas été contre un affrontement entre ce Kraven et le Spidey de Sam Raimi. Il faudra nous contenter d’en rêver.

 

© Gilles Penso


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