Dans cette réponse hongkongaise à Robocop, le producteur Tsui Hark et le réalisateur David Chung cèdent à tous les excès…
TIE JIA WU DI MA LI YA
1988 – HONG-KONG
Réalisé par David Chung
Avec John Sham, Sally Yeh, Tsui Hark, Tony Leung, Ching-Ying Lam, Dennis Chan, Teddy Chan, Wing Cho, Kong Chow, Paul Chun, Ben Lam, Foo-Wai Lam
THEMA ROBOTS
À première vue, Roboforce semble être une variante de Robocop, sorti sur les écrans moins d’un an plus tôt. Un humanoïde au visage humain, un grand robot destructeur, des gangs qui affrontent la police, des fusillades et des explosions à tire-larigot sont en effet au programme. Mais en réalité, cette comédie de science-fiction délirante n’a pas grand-chose à voir avec le classique de Paul Verhoeven. Certes, le succès des aventures d’Alex Murphy motiva très certainement sa mise en chantier, mais Tsui Hark – qui produit le film et en tient l’un des rôles principaux – en profite surtout pour offrir au public un spectacle hors-norme, tout à fait conforme au grain de folie que véhiculaient des œuvres telles que Zu : les guerriers de la montagne magique, Histoires de fantômes chinois ou Mad Mission 3. Réalisateur de Police Action et La Légende des héros, David Chung hérite de la mise en scène et s’en donne à cœur joie, épaulé par Hark lui-même (co-réalisateur officieux du film) et par Ching Siu-Tung qui règle toutes les séquences d’action. Le film commence très fort avec l’attaque d’un robot cuirassé et fumant qui s’en prend aux forces de l’ordre. Insensible aux balles, capable de voler, armé de missiles qui pulvérisent les véhicules blindés, ce monstre mécanique est la dernière invention du redoutable Hero Gang qui terrorise Hong-Kong.
Par cette démonstration de force, les membres du Hero Gang entendent bien faire comprendre aux autorités qu’ils sont invincibles. Leur chef (Ben Lam), un psychopathe obsédé par les robots, décrète que « l’émotion est une faiblesse humaine ». Il a d’ailleurs décidé de remplacer son bras droit, la tueuse Maria (Sally Yeh) qui est éprise de lui et n’agit que pour le satisfaire, par une contrepartie robotique qu’il nomme Pioneer II (Pioneer I étant la machine massive vue dans l’introduction du film). Bien sûr, Maria voit d’un très mauvais œil la création de cet avatar cybernétique qui a l’outrecuidance d’arborer le même visage qu’elle. Pour sa première mission, Pioneer II doit retrouver « Whisky » (incarné par Tsui Hark), un ancien membre du gang, et le tuer. Mais Whisky vient de se lier d’amitié avec « Curly » (John Sham), un concepteur d’armes high-tech qui travaillait jadis pour la police et qui parvient à reprogrammer le robot féminin. Bientôt, les gangsters, les policiers, les robots et nos deux héros maladroits vont devoir s’affronter. Un journaliste malchanceux campé par Tony Leung vient s’ajouter à ce cocktail déjà explosif…
Mad Robot
Roboforce vaut principalement pour la folle inventivité de ses séquences mouvementées et de ses effets spéciaux, qui lui permirent de remporter un prix spécial lors de sa présentation au mythique Festival du Film Fantastique de Paris en 1988. Si le robuste Pioneer I crève l’écran, la Maria robotique (qui doit sans doute son prénom à l’héroïne de Metropolis) ne démérite pas. Capable de grimper sur les façades des immeubles avec autant de facilité que Spider-Man, elle déchire le métal comme si c’était du papier, projette des poings extensibles, défonce les murs, transforme ses doigts en mitrailleuses et ses bras en lance-missiles, décolle grâce à ses pieds-réacteurs, bref assure un spectacle total. Au cours du dernier acte du film, son relooking évoque autant le classique de Fritz Lang que les designs de Hajime Sorayama. Il faut bien reconnaître que l’aspect comique du film ne brille pas par sa finesse. Les acteurs en font des tonnes, face à un réalisateur qui les laisse visiblement en totale roue libre, les gags traînent en longueurs et les mimiques excessive du trio masculin vedette finissent par lasser. Fort heureusement, cet humour éléphantesque est contrebalancé par des scènes d’action dingues : les gangsters qui mitraillent à tout va en s’accrochant aux branches des arbres avec des filins, l’assaut d’une moto volante chargée d’un arsenal destructeur, le combat contre les deux robots ou encore l’impensable échauffourée finale sur le flanc d’un mecha titanesque. Toute la folie et la démesure du cinéma hongkongais des eighties explose dans ce Roboforce décomplexé auquel on ne pourra pas reprocher son manque de générosité et d’imagination.
© Gilles Penso
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