ANIMALE (2024)

Un conte fabuleux, cruel et libératoire dans lequel se noue une étrange connivence entre un taureau et une jeune camarguaise…

ANIMALE

 

2024 – FRANCE

 

Réalisé par Emma Benestan

 

Avec Oulaya Amamra, Damien Rebattel, Vivien Rodriguez, Claude Chaballier, Elies-Morgan Admi-Bensellam, Pierre Roux, Marinette Rafai, Renaud Vinuesca

 

THEMA MAMMIFÈRES

Nous sommes en Camargue, au pays des courses de taureaux, de celles où l’on respecte le plus l’animal, où blessures et mise à mort sont exclues. Après avoir gagné sa place au milieu des raseteurs (acteurs d’un sport traditionnellement réservé aux hommes), Nejma rêve à présent de se distinguer dans l’arène. Mais une étrange connivence semble s’établir entre elle et l’animal, tandis que des hommes de son entourage disparaissent… Depuis Animale,  il existe désormais une légende en Camargue qui raconte qu’une femme, à l’instar de La Féline de Jacques Tourneur, ou des héros de films de lycanthropes comme Le Loup-garou de Londres, se transformerait non pas en panthère noire, ni en canidé sanguinaire, mais en taureau (un taureau-garou en quelques sortes) ! L’action se passe dans l’univers peu connu des manades, là où les bovidés vivent en liberté en attendant, pour les plus vigoureux, d’être capturés lors des fêtes votives. Ils sont alors guidés par les guardians jusque dans l’arène, où les raseteurs doivent attraper une cocarde placée entre leurs cornes. Point de folklore ni de tourisme dans ce film, mais au contraire une image respectueuse de la nature et de la région dont elle révèle toute la splendeur.

Ce merveilleux film de métamorphose revisite les codes du genre pour mieux les réinventer avec un point de vue résolument féministe, et un animalisme discret que ne renieraient pas les auteurs du Règne animal. Le résultat est un sincère chant d’amour, remarqué dans de nombreux festivals : film de clôture de la Semaine de la Critique à Cannes, film d’ouverture du NIFF 2024, accueilli au FEFFS, etc. La splendide photo du très prisé chef-opérateur belge Ruben Impens, qui s’est distingué avec les deux premiers films de Julia Ducournau, Grave et Titane, sublime ici l’authenticité d’un environnement sauvage, des hommes qui l’habitent, de ses bêtes puissantes, et parmi eux, la beauté naturelle d’une jeune femme qui poursuit un rêve émancipatoire, celui d’être dans l’arène et d’y remporter les honneurs de la prochaine course camarguaise. Toutefois, une étrange connexion s’établit entre elle et le taureau. Peu à peu, l’empathie que ressent la belle pour la bête va lui révéler sa propre animalité, tandis que le bovin et son regard vont nous sembler de plus en plus humains. L’actrice principale Oulaya Amamra crève l’écran dans chacun des plans serrés où transpire sa volonté de vivre libre dans un monde en partie hostile, et contre lequel il va falloir se battre.

Libre, passionnée et engagée

Détentrice, comme John McTiernan, d’une licence en anthropologie, et ancienne étudiante de la Fémis, Emma Benestan, dont c’est le second long-métrage, fait ses débuts dans le cinéma dans les salles de montage avant de passer à la réalisation. Elle tournera deux courts-métrages et deux documentaires en Camargue avant son premier long-métrage, Fragile, qui a reçu un accueil critique chaleureux. Animale est le fruit de son envie de continuer à exprimer son amour pour la région taurine (dont elle est issue), les habitants et la faune, et de montrer une autre image que celle stéréotypée de la femme franco-algérienne au cinéma, tout en conjuguant sa passion pour les westerns (qu’elle aimait regarder avec son père) et les films de genre avec lesquels elle a grandi dans son adolescence. Animale est donc un des grands chocs de la saison, un film fantastique rare, original, beau, écologique et engagé. Avec ce conte moderne, la cinéaste bouscule les stéréotypes de genre et du genre, un chant d’amour lyrique et fantastique qui est avant tout un hymne à la liberté !

 

© Quélou


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