Ne reculant devant rien, ce film de monstre fait la promotion de la mauvaise qualité de ses effets spéciaux !
BAD CGI GATOR
2023 – USA
Réalisé par Danny Draven
Avec Michael Bonini, Maddie Lane, Ben VanderMey, Rebecca Stoughton, Cooper Drippe, Sarah Buchanan, Lee Fealy
THEMA REPTILES ET VOLATILES I SAGA CHARLES BAND
Chez Full Moon, on ose tout, même l’impensable. La compagnie à l’origine des sagas Puppet Master et Subspecies n’hésite jamais devant un bon concept, surtout s’il est provocateur. Quelques années après avoir commis un Corona Zombies calamiteux qui n’eut d’autre vertu que celle d’un morbide opportunisme, la société de Charles Band tente le tout pour le tout : un film de monstre qui assume pleinement la mauvaise qualité de ses effets spéciaux en en faisant non seulement un argument marketing mais aussi un élément comique vaguement justifié par un scénario improbable. Pour être honnête, l’idée n’est pas nouvelle, puisque Matthew et Jason Ellsworth signaient déjà un Bad CGI Sharks en 2019. C’est Zalman Band, le propre fils de Charles, qui est à l’origine de l’histoire abracadabrante de Bad CGI Gator, tandis que la réalisation échoit à Danny Draven (Horrorvision, Cryptz, Patient Seven). Signe des temps, Full Moon produit désormais de nombreux films directement destinés à leur plateforme de streaming et donc formatés sur des durées courtes (deux fois 30 minutes ou une heure). Bad CGI Gator (dont le titre pourrait se traduire par « L’alligator en mauvaises images de synthèse », oui ça sonne tout de suite moins bien en français) fait partie de cette nouvelle génération de films « direct-to-streaming » qui se distinguent généralement par une mise en forme soignée malgré des budgets ridicules.
Les héros de ce petit film absurde sont six étudiants qui rivalisent de stupidité et sont ouvertement pétris de clichés : le gros bras sportif, l’abruti imbibé de bière, les deux bimbos superficielles accros aux réseaux sociaux, le garçon réservé et maladroit (qui ressemble bizarrement à une version jeune de Martin Sheen) et la fille marginale qui se sent au-dessus des autres. Ce petit groupe mal assorti s’installe dans une maison au bord d’un lac pour un petit séjour à base de bière, de coucheries, de vidéos TikTok et de jeux idiots. L’un d’entre eux consiste à jeter tous les ordinateurs portables en leur possession au fond du lac, comme un acte de rébellion contre les conventions… à condition de tout filmer et de tout envoyer sur les réseaux sociaux en espérant créer une vidéo virale. Les ordis coulent donc à pic. Mais un petit alligator qui passait par là entre en contact avec les machines. Soudain, une étrange réaction en chaîne se déclenche : frappé par des éclairs électrico-numériques, le reptile devient énorme et prend les allures d’une création approximative en images de synthèse. Ce monstre improbable surgit des eaux et décide de grignoter les six ados attardés qui se trouvent à proximité…
Digitalligator
Bad CGI Gator assume pleinement l’incongruité de son intrigue et de ses personnages, multipliant chez ses jeunes héros les comportements niais et les dialogues saugrenus, comme lorsque le grand macho crie « je suis un mâle alpha ! » en brandissant un sabre, ou lorsque l’une des filles se demande si l’alligator tueur est un mâle, une femelle ou un saurien non genré. Bien sûr, l’attraction principale reste cette vilaine bête qui s’avère capable de courir, de sonner aux portes et même de voler. Son animation, sa texture et son incrustation dans les prises de vues réelles rivalisent de médiocrité assumée. Les effets visuels sont pourtant attribués à Dave Matherly qui, jadis, œuvrait pour des films comme Vampire vous avez dit vampire, Les Aventures de Jack Burton, The Devil’s Rejects ou Hostel. Ici, nous voilà revenu à l’époque des « creature features » diffusés sur Sci-Fi Channel au tout début des années 2000, des micro-productions Nu Image ou des pires rejetons d’Asylum. À côté des effets numériques de Bad CGI Gator, n’importe quel Sharknado ressemble à Avatar, c’est dire ! On s’amuse donc raisonnablement dans ce film qui rit de sa propre bêtise… puis s’oublie aussitôt après avoir été visionné.
© Gilles Penso
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