SANS UN BRUIT : JOUR 1 (2024)

Ce troisième épisode nous raconte les origines de l’invasion des monstres en pleine ville de New York…

A QUIET PLACE : DAY ONE

 

2024 – USA

 

Réalisé par Michael Sarnoski

 

Avec Lupita Nyong’o, Joseph Quinn, Alex Wolff, Djimon Hounsou, Eliane Umuhire, Takunda Khumalo, Alfie Todd, Avy-Berry Worrall, Ronnie Le Drew, Benjamin Wong

 

THEMA EXTRA-TERRESTRES I SAGA SANS UN BRUIT

Au départ, c’est Jeff Nichols qui devait réaliser cet épisode « prequel », troisième opus de la franchise initiée en 2018. Dès 2020, l’auteur de Take Shelter et Midnight Special se met au travail sur une histoire développée par John Krasinski. Mais Nichols préfère finalement se désister pour s’impliquer dans un autre projet du studio Paramount. Après avoir envisagé plusieurs réalisateurs prestigieux, Krasinski et ses co-producteurs arrêtent leur choix sur un cinéaste indépendant, Michael Sarnoski, séduits par son étonnant Pig avec Nicholas Cage. « J’ai souhaité m’orienter vers une histoire très intime, et John Krasinski m’a beaucoup soutenu dans cette voie », raconte Sarnoski. « Il m’a laissé énormément de liberté. Il n’essayait pas de faire un autre épisode de Sans un bruit “à la façon de John“. Il voulait vraiment ouvrir ce monde et y laisser s’exprimer d’autres voix » (1). Sarnoski écrit et réalise donc le film lui-même en s’entourant de plusieurs de ses collaborateurs réguliers, comme le directeur de la photographie Pat Scola, le compositeur Alexis Grapsas et l’acteur Alex Wolff. Si le prologue de Sans un bruit 2 nous donnait déjà un aperçu du début de l’invasion des monstres au milieu de la population, Sans un bruit : jour 1 prend le même parti mais change de cadre. Après la petite ville américaine, place à l’une des cités les plus denses et les plus bruyantes du monde : New York.

Un texte en ouverture nous dit d’ailleurs que le niveau sonore moyen de New York est de 90 décibels, soit l’équivalent d’un hurlement continu, ce qui ne manque pas d’ironie lorsqu’on sait que la clef de la survie des personnages sera le silence. La protagoniste de cet opus est Samira (Lupita Nyong’o, héroïne de Us et Black Panther : Wakanda Forever), une femme atteinte d’un cancer en phase terminale qui vit dans une maison de repos avec son chat et d’autres patients. Même si c’est à contrecœur, elle accepte de participer à une sortie de groupe pour assister à un spectacle à Manhattan. Là, le drame ne tarde pas à survenir sous forme d’une multitude d’objets lumineux tombés du ciel. En un clin d’œil, une nuée de créatures voraces et indestructibles envahit les rues et attaque tout ce qui fait du bruit. Alors que le chaos s’empare de la population, le titre du film apparaît enfin, après treize minutes d’exposition. La ferme rurale de Sans un bruit et l’usine abandonnée de Sans un bruit 2 cèdent désormais la place à la « Grosse Pomme », siège de visions impressionnantes et quasi-surréalistes comme ces panoramas de la cité entièrement dévastée ou le gigantesque exode de la population errant comme une horde de zombies au milieu des carcasses fumantes de véhicules réduits en bouillie.

Après la chute de New York

Ironiquement, presqu’aucune séquence du film n’a réellement été tournée à New York, les rues de la ville, ses bâtiments et son métro ayant été reconstitués avec beaucoup de minutie à Londres. Si le cadre de l’action s’est considérablement élargi par rapport aux deux premiers films, l’intrigue se révèle paradoxalement plus minimaliste. À la préservation de la cellule familiale, cœur des enjeux des deux films précédents, Michael Sarnoski préfère la faible étincelle qui naît entre deux parfaits inconnus : Samira, celle qui n’attend plus rien de l’existence et se raccroche pourtant désespérément à son instinct de survie, et Eric (Joseph Quinn, alias Eddie Munson dans Stranger Things), l’homme qui assume pleinement son manque de courage et son incapacité à affronter seul la menace. Cette dynamique nouvelle induit une approche mélancolique. Face à la fin du monde, on s’agrippe faute de mieux à des souvenirs d’enfance, à une pizzeria de quartier désormais dévastée, aux touches d’un piano qu’on ne peut plus qu’effleurer en silence… Là réside le renouveau d’une franchise qui aurait pu se contenter d’exploiter tranquillement des recettes éprouvées – travers dans lequel tombait un peu Krasinsiki lui-même dans Sans un bruit 2. Pour autant, Sarnoski ne fait pas l’économie de séquences de suspense éprouvantes, de destructions spectaculaires et de mises à mort brutales. Djimon Hounsou vient même compléter le casting pour assurer un lien avec le film précédent. Rafraîchissant, ce troisième épisode possède un supplément d’âme particulièrement appréciable.

 

(1) Extrait d’un entretien paru dans « The Hollywood News » en juin 2024

 

© Gilles Penso


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