AMSTERDAMNED (1988)

Rien ne va plus dans la capitale hollandaise : un tueur sous-marin hante les canaux et multiplie les victimes au grand dam de la police…

AMSTERDAMNED

 

1988 – HOLLANDE

 

Réalisé par Dick Maas

 

Avec Huub Stapel, Monique van de Ven, Serge-Henri Valcke, Tanneke Hartzuiker, Wim Zomer, Hidde Maas, Lou Landré, Tatum Dagelet, Edwin Bakker

 

THEMA TUEURS

Quatre ans après L’Ascenseur, Dick Maas récidive avec un nouveau long-métrage ambitieux aux confins de l’épouvante qui se révèle, une fois de plus, très efficace. « Je voulais exploiter la ville d’Amsterdam pour qu’elle serve de théâtre à une histoire de suspense et d’horreur », raconte le réalisateur. « Je n’avais jamais vu ça avant. Mon idée était de détourner les clichés touristiques et les décors connus pour y mettre en scène des séquences de meurtres et de poursuites » (1). Le titre à lui seul est une vraie trouvaille, puisqu’il combine le nom de la capitale hollandaise avec le mot « maudit ». Empruntant ses codes à la fois aux films policiers et aux films d’horreur, Amsterdamned coûte à peine 98 000 dollars et ne lésine pourtant devant aucune séquence spectaculaire en plaçant souvent ses caméras en extérieurs réels, sur les sites les plus connus de la ville. « La municipalité a été très coopérative », explique Dick Maas. « Ils ont même mis à notre disposition leurs véritables bateaux et hélicoptères de police. Certains employés de la ville apparaissent dans le film en jouant leur propre rôle. Nous avons pu bloquer plusieurs rues et plusieurs parties de canaux pour tourner les scènes de poursuite » (2). Une année en amont du tournage aura été nécessaire pour obtenir toutes les autorisations nécessaires, mais ces démarches laborieuses en valaient largement la peine au vu du résultat.

Tout commence donc au cœur d’Amsterdam, en pleine nuit. Une prostituée prend un taxi pour réintégrer son domicile. Refusant les avances du chauffeur, elle se fait expulser de la voiture. Peu après, quelque chose surgit hors de l’eau des innombrables canaux de la ville, se jette sur elle et l’assassine, sous les yeux d’une clocharde. Le lendemain, dans l’une des scènes les plus mémorables du film, des touristes en bateau découvrent son cadavre ensanglanté suspendu à un des ponts de la ville. L’éventualité d’un monstre marin est assez rapidement écartée par le policier incarné avec détachement par Huub Stapel, ne croyant guère à la théorie du « monstre du Loch Ness ». Malgré tout, le réalisateur sacrifie volontiers aux conventions du genre empruntées aux Dents de la mer, utilisant la caméra subjective sous-marine (avec la fille en maillot sur son bateau pneumatique), faisant surgir un cadavre à l’œil exorbité dans une épave sous l’eau et utilisant souvent la métonymie pour évoquer le tueur, notamment via les bulles qui émergent à la surface (et qui donnent lieu à une excellente séquence de suspense).

Le saigneur des canaux

Les canaux d’Amsterdam constituent un décor insolite, plein d’originalité, et surtout parfaitement adapté à cette histoire de meurtres en série dont l’instigateur demeure énigmatique. Sa véritable nature attendra le dénouement pour être connue du héros et du public, sous la forme évidente d’une grosse surprise. Si Dick Maas évite le gore frontal, la crudité du propos prouve qu’à l’époque Paul Verhoeven n’était pas le seul « Hollandais violent ». La vision d’Amsterdam que propose le film est d’ailleurs loin d’être touristique. Les canaux y sont pollués, la misère et les bas-fonds y sont mis en avant, les personnages attirent peu la sympathie. La musique synthétique, composée par Maas lui-même, semble puiser son inspiration chez John Carpenter, même si notre homme n’assume pas vraiment cette filiation. « Je pense au contraire que mes musiques sont très différentes des siennes », dit-il. « Bien sûr, nous utilisons le même type d’instruments électroniques et des sons synthétiques qui peuvent se ressembler, mais je crois que nos styles ne sont pas les mêmes. Pour la bande originale d’Amsterdamned, j’ai même essayé d’intégrer des sons orchestraux proches de ceux des véritables instruments classiques » (3). Truffé de scènes de poursuite ébouriffantes en voiture, en moto et surtout en hors-bord, Amsterdamned soulève un enthousiasme mérité lors de sa sortie. Pourtant, malgré la sympathie qu’on peut éprouver pour certaines de ses œuvres ultérieures, force est de constater que Dick Mass ne sut jamais réitérer le double coup d’éclat de L’Ascenseur et Amsterdamned, comme ces stars éphémères des années 80 dont seul un tube ou deux subsistent encore dans la mémoire collective.

 

(1), (2) et (3) Propos recueillis par votre serviteur en septembre 2017

 

© Gilles Penso


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