THÉÂTRE DE SANG (1973)

Vincent Price incarne un comédien raté qui décide d’assassiner un groupe de critiques de théâtre en s’inspirant des pièces de Shakespeare…

THEATER OF BLOOD

 

1973 – GB

 

Réalisé par Douglas Hickox

 

Avec Vincent Price, Diana Rigg, Ian Hendry, Harry Andrews, Robert Morley, Jack Hawkins, Diana Dors

 

THEMA TUEURS

Après le succès de L’Abominable docteur Phibes et de sa suite, Vincent Price reprend un rôle très similaire dans Théâtre de sang dont le scénario fonctionne une fois de plus sur le principe de la vengeance méthodique et raffinée d’un homme passé pour mort. Sollicité pour diriger le film, Robert Fuest – à la tête des deux Docteur Phibes – préfère passer son tour pour ne pas être catalogué « réalisateur de films avec Vincent Price qui tue les gens en série ». La mise en scène est donc confiée à Douglas Hickox, qui vient de réaliser le thriller La Cible hurlante avec Oliver Reed. Price lui-même aurait pu être rebuté à l’idée de se plagier lui-même. Mais il tombe littéralement amoureux du scénario d’Anthony Greville-Bell et se délecte à l’idée de pasticher quelques grands classiques du répertoire de William Shakespeare. Jouer dans Théâtre de sang lui permet en effet de combler une frustration, celle de ne pas avoir pu jouer du Shakespeare sur scène en Angleterre à cause de sa carrière cinématographique. Réciter la prose de son écrivain préféré tout en détournant les codes du cinéma d’horreur qui fit sa gloire, voilà une belle revanche.

Le charismatique comédien moustachu incarne ici Edward Kendal Sheridan Lionheart, un comédien de théâtre au jeu ampoulé et excessif que la critique éreinte systématiquement. Le jour où la récompense suprême – le Grand Prix de la Critique – lui échappe au profit d’un jeune premier prometteur, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Dans son plus bel apparat, il rend visite aux huit membres du jury, leur déclame le fameux monologue d’« Hamlet » puis, en guise de sortie, se jette par la fenêtre. Quelques mois plus tard, une série de meurtres abominables défraient la chronique. Les victimes sont des critiques de théâtre, tous membres du fameux trophée annuel du meilleur acteur. Il devient vite évident que Lionheart n’est pas mort et qu’il lance une terrible campagne vengeresse contre ceux qui ont brisé sa carrière. Recueilli par un groupe de sans abri qu’il a transformé en troupe de théâtre hétéroclite, l’acteur déchu s’est mis en tête de tuer un à un ceux qui l’ont humilié en s’inspirant des crimes les plus spectaculaires décrits dans l’œuvre de son mentor William Shakespeare.

Gore et burlesque

Ce concept donne l’occasion à Douglas Hickox de mettre en scène des meurtres outranciers où le gore et le burlesque se partagent équitablement la vedette : décapitation à la scie, noyade dans une barrique de vin, électrocution sous une permanente, cœur arraché, torse transpercé… Bourreau caricatural, Vincent Price s’en donne à cœur joie, cabotinant plus que de raison, comme son rôle l’exige, et paraissant sous les grimages les plus variés, le plus exubérant d’entre eux étant sans conteste le coiffeur efféminé affublé d’une coupe afro ! A ses côtés, on retrouve avec bonheur Diana Rigg, inoubliable Emma Peel de Chapeau melon et bottes de cuir et James Bond Girl d’Au service secret de Sa Majesté, dans le rôle de la fille et complice de Lionheart. Le final est à l’image du héros : grandiloquent et exagérément théâtral. De tous les personnages qu’il incarna à l’écran, Vincent Price avoua que Lionheart, summum d’excès et d’exubérance, fut l’un de ses préférés. Son enthousiasme – comme celui de Diana Rigg – est parfaitement perceptible à l’écran, même si nous serions tentés de préférer Price dans des registres plus subtils.

 

© Gilles Penso


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