Cette aventure mythologique invraisemblable confronte son héros musclé à un bestiaire particulièrement farfelu…
LA VENDETTA DE ERCOLE
1960 – ITALIE
Réalisé par Vittorio Cottafavi
Avec Mark Forest, Broderick Crawford, Gaby André, Renato Terra, Federica Ranchi, Ugo Sasso, Sandro Moretti, Salvatore Furnari, Giancarlo Sbragia, Michele Gentilini
THEMA MYTHOLOGIE
En pleine vogue du péplum mythologique, Vittorio Cottafavi (Milady et les Mousquetaires, La Révolte des Gladiateurs, Les Légions de Cléopâtre) réalise cette Vengeance d’Hercule, dont le titre est un peu mensonger dans la mesure où le personnage principal s’appelle en réalité Emilius. C’est du moins ce que nous apprend le texte d’introduction du film, avant d’ajouter que sa force et sa puissance lui ont valu le surnom de Goliath. D’où le titre utilisé lors de son exploitation sur le territoire américain : Goliath and the Dragon. Et c’est le new-yorkais Mark Forest, héros la même année du Géant de la vallée des rois, qui entre dans la peau du demi-dieu. Le début du film évoque le dernier des douze travaux d’Hercule. Emilius/Hercule/Goliath s’enfonce dans une caverne souterraine et fumante qui pourrait bien être l’entrée des Enfers. Plusieurs inserts sur de la lave semblent confirmer cette impression. Là, il croise le chien tricéphale Cerbère, enchaîné à la roche. Cette marionnette grandeur nature un peu figée, qui se contente d’agiter ses longs cous et d’ouvrir ses trois gueules pour cracher du feu à la face de l’acteur, n’est pas très crédible, c’est le moins qu’on puisse dire. Ses yeux sont immobiles, son pelage peu réaliste et les petites truffes qui ornent le bout de ses museaux prêtent plutôt à rire. Ce n’est que le premier spécimen de la ménagerie farfelue qui s’apprête à déferler à l’écran.
Car ce premier affrontement précède le surgissement d’une chauve-souris géante et simiesque soutenue par deux énormes câbles, d’un figurant gesticulant dans un costume d’ours et d’une sorte de faune-centaure furtif, allusion probable au Nessus de la vraie légende d’Hercule. La mythologie grecque, on le sait, a toujours été malmenée par les péplums musclés venus d’Italie, puisant au hasard leurs péripéties dans les épisodes des légendes antiques. Ici, notre Hercule se trouve impliqué dans une vague histoire de conquête du trône, de trahison, d’amants maudits… Rien de très passionnant, certes, mais l’intrigue réussit malgré tout à susciter un certain intérêt. Mark Forest n’est pas le plus mauvais des Hercule et Broderick Crawford campe un fort honorable méchant, en l’occurrence le vil Eurystée, avide de pouvoir et adepte de duplicité ayant dérobé un précieux joyau sur le front du dieu païen de la vengeance…
Drôle de dragon
Vers la fin du film, la belle Déjanire (Leonora Ruffo) est enchaînée dans une caverne jonchée de squelettes et livrée à un dragon en stop-motion. Quadrupède, le dos hérissé d’écailles, il évoque ses homologues du 7ème voyage de Sinbad ou des Amours enchantées mais souffre hélas d’une animation extrêmement saccadée et de mouvements trop rapides qui lui ôtent toute crédibilité. C’est pourtant l’œuvre des talentueux Jim Danforth (Jack le tueur de géants, Quand les dinosaures dominaient le monde) et Marcel Delgado (King Kong) qui, par manque de temps et de moyens, n’ont guère la possibilité d’affiner leur création. D’autant que la figurine d’animation est alternée au montage avec une grosse tête mécanique pas du tout crédible, qui crache de la fumée par les naseaux et sur laquelle le héros balance des rochers en carton. « Au départ, la société de production American International Pictures souhaitait faire son propre film mythologique », explique Danforth. « Ils nous ont donc sollicité pour une scène de dragon. Mais ils ont finalement décidé de dépenser moins d’argent. Ils ont donc racheté ce film italien en y insérant artificiellement le dragon » (1). Voilà pourquoi cette séquence est absente des copies européennes du film. Sur sa lancée, Vittorio Cottafavi réalisera dans la foulée Hercule à la Conquête de l’Atlantide en 1961.
(1) Propos recueillis par votre serviteur en avril 1998
© Gilles Penso
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