Pour son premier long-métrage, Sébastien Vaniček infeste un appartement de la banlieue parisienne avec une horde d’araignées monstrueuses…
VERMINES
2023 – FRANCE
Réalisé par Sébastien Vaniček
Avec Théo Christine, Sofia Lesaffre, Jérôme Niel, Lisa Nyarko, Finnegan Oldfield, Marie-Philomène Nga, Ike Zacsongo-Joseph, Emmanuel Bonami, Abdallah Moundy
THEMA ARAIGNÉES
Quand on sait que Vermines est un premier long-métrage, on peut s’étonner face à la virtuosité artistique et technique de ce spectacle à déconseiller très fortement aux arachnophobes, sous peine de quelques nuits blanches tourmentées. Mais Stéphane Vaniček n’en est pas tout à fait à son coup d’essai, puisqu’il traîne derrière lui une expérience intensive dans le domaine du court-métrage, exercice qui lui permet d’attirer notamment l’attention du producteur Harry Tordjman et de la plateforme Netflix. Le scénario de Vermines, qu’il écrit avec Florent Bernard, est moins une déclaration d’amour au cinéma d’horreur qu’une volonté de créer une expérience immersive extrême pour les spectateurs tout en jouant le jeu de la métaphore sociale. Le titre du film décrit les araignées qui s’apprêtent à semer la panique, bien sûr, mais aussi toute cette frange de la population marginalisée qui vit dans des HLM aux allures de cages à lapin (le parallèle avec les petites bêtes enfermées dans des boîtes saute aux yeux) et que le commun des mortels aurait tendance à considérer comme des êtres indésirables. Sans jamais chercher à discourir frontalement sur le sujet sensible des banlieues ni à se positionner de manière manichéenne lorsqu’interviennent les forces de police, Sébastien Vaniček choisit ce décor réel et tangible qu’il connaît bien pour y faire surgir la terreur.
C’est dans les « immeubles camemberts » de Noisy-le-Grand, en banlieue parisienne, que le réalisateur installe ses caméras. Ce panorama étrange et oppressant, conçu au début des années 80, sert de cadre de vie aux cinq protagonistes de Vermines : Kaleb (Théo Christine), qui vivote en revendant des chaussures de sport et se passionne pour les animaux exotiques, sa sœur Manon (Lisa Nyarko) avec qui il entretient des relations d’amour/haine depuis la disparition de leur mère, leur voisin Mathys (Jérôme Niel) et leurs amis Jordy (Finnegan Oldfield) et Lila (Sofia Lesaffre). Un jour, Théo découvre dans une petite boutique une araignée qui lui fait de l’œil et la ramène chez lui pour compléter sa collection de reptiles et d’invertébrés soigneusement conservés dans des vivariums de fortune. Mais cet arachnide n’est pas comme les autres. Arraché à son désert natal d’Afrique du Nord, c’est un spécimen particulièrement virulent qui s’échappe et pond des milliers d’œufs dans l’immeuble, prélude d’un massacre à grande échelle…
Arachnofolie
Des films d’attaques d’araignées, les amateurs de films de genre en ont déjà vu un certain nombre, des plus « mainstreams » (Arachnophobie, Arac Attack) aux plus « vintages » (Tarantula, The Spider) en passant par les séries B et Z (L’Invasion des araignées géantes, Spiders, Arachnid, Arachnia, Lavalantula, Big Ass Spider ! et consorts). Au beau milieu de ce foisonnement de pattes et de crocs, le terrifiant L’Horrible invasion de John « Bud » Cardos s’érigeait sans conteste comme le plus traumatisant de tous dans la mesure où il sollicitait de véritables arachnides et concoctait des séquences particulièrement angoissantes. Désormais, il faudra ajouter à ce palmarès Vermines qui se hisse sans mal au niveau du petit classique de John Cardos et fera date comme l’un des longs-métrages les plus impressionnants jamais consacrés aux bébêtes à huit pattes. Vaniček a déjà le bon goût de ne pas chercher à imiter ses modèles américains en installant son action dans un contexte français réaliste. Si ses jeunes héros n’échappent pas totalement à l’archétype, le naturel des comédiens emporte l’adhésion et rend crédibles et attachants des personnages qui auraient pu rapidement irriter les spectateurs. Une fois le mécanisme de l’empathie enclenché, les araignées peuvent entrer en piste. La précision de la mise en scène, la perfection des effets spéciaux (alternant sans cesse les arachnides réels, leurs contreparties numériques et les versions mécaniques), la minutie de la bande son (truffée d’effets cliquetants stressants) et la gestion impeccable du rythme font de Vermines un « must » du genre. Hollywood ne s’y trompera pas, déroulant aussitôt le tapis rouge à Sébastien Vaniček pour lui proposer d’apporter dans la foulée sa pierre à l’édifice de la franchise Evil Dead.
© Gilles Penso
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