La quête d’indépendance d’un poisson trop couvé par son père, au cœur de fonds marins regorgeants de surprises et de dangers…
FINDING NEMO
2003 – USA
Réalisé par Andrew Stanton et Lee Unkrich
Avec les voix de Albert Brooks, Alexander Gould, Ellen DeGeneres, Willem Dafoe, Brad Garrett, Allison Janney, Austin Pendleton, Stephen Root, Vicki Lewis
THEMA MONSTRES MARINS I SAGA PIXAR
Élément clé de l’écriture de Toy Story, 1001 pattes et Monstres & Cie, Andrew Stanton se lance à son tour dans la réalisation en prenant à bras le corps un projet qui lui tient particulièrement à cœur. Pour le mener à bien, il plonge dans ses souvenirs d’enfance, à l’époque où il observait les poissons d’un aquarium dans la salle d’attente de son dentiste et imaginait qu’ils préparaient secrètement un plan d’évasion. Stanton s’inspire aussi de ses relations avec son fils et de sa propre attitude qu’il juge parfois trop protectrice. Ainsi naît Le Monde de Nemo, qui cache derrière ce titre semblant vouloir se référer à Jules Verne une parabole de la lutte des enfants pour acquérir leur indépendance. Une vaste galerie de personnages variés s’anime dans l’environnement aquatique du film, notamment le poisson clown Nemo qui ne rêve que de découvrir le monde, à ses risques et périls, son père Marin qui s’est juré de veiller sur lui coûte que coûte, quitte à le surprotéger avec une prudence excessive, le « poisson-chirurgien » Dory qui les accompagne avec bienveillance, malgré de sérieux troubles de la mémoire immédiate, ainsi que toute une faune de créatures marines plus ou moins amicales.
Les poissons n’étant pas des animaux auxquels il est simple de donner des expressions faciales, les animateurs s’inspirent souvent des chiens, et certaines des mimiques adoptées par les héros à nageoires rappellent parfois celles du poisson tropical Polochon de La Petite sirène. Les prisonniers qui vivent dans l’aquarium, quant à eux, se réfèrent à tout un pan du cinéma des années 70. De l’aveu même de l’équipe de Pixar, leur groupe névrosé s’inspire de Vol au-dessus d’un nid de coucou, leur meneur Gill est calqué sur Clint Eastwood et le poisson « gonflable » Boule imite George Kennedy dans Luke la main froide. Quant aux requins qui croisent la route de nos héros, ils clignent bien sûr de l’œil vers Les Dents de la mer (le chef s’appelle Bruce, surnom que Spielberg avait donné au monstre animatronique de son film) et lorsqu’il se met à poursuivre Dory avec un regard fou, c’est à Shining que Le Monde de Nemo fait allusion. Des références plutôt inattendues dans un film pour enfants !
La fête des mers
Le Monde de Nemo regorge de séquences mémorables et de morceaux d’anthologie, de la traversée marine au milieu de plus de deux-cents tortues jusqu’au magnifique mais très dangereux champ de méduses fluorescentes en passant par l’attaque des mouettes et la grande évasion finale. Pour autant, ce cinquième film estampillé Pixar n’a pas le même grain de folie ni la même originalité que ses prédécesseurs. En arpentant une voie plus classique et plus linéaire, en empruntant son point de départ à Bambi, en s’adressant de toute évidence à un public un peu plus jeune, le film d’Andrew Stanton et Lee Unkrich fait preuve d’une certaine « sagesse » qu’on aurait plus tendance à attribuer aux films Disney qu’à ceux de Pixar. Cette tendance trouve son écho dans la bande originale de Thomas Newman. A contre-courant de l’approche mi-jazzy mi-épique de son cousin Randy, le compositeur d’American Beauty écrit une bande originale planante et introspective qui, si elle ne manque pas de charme, s’éloigne du style trépidant et tumultueux de Toy Story, 1001 pattes et Monstres & Cie. Pour autant, Le Monde de Nemo est un triomphe spectaculaire. C’est à l’époque le plus gros succès du studio, battant même les recettes jusqu’alors indétrônables du Roi lion. Aucun film d’animation ne s’était jusqu’alors aussi bien comporté au box-office. Pour couronner cet accueil enthousiaste, l’Oscar du meilleur film d’animation lui est décerné en 2004.
© Gilles Penso
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