Un petit groupe hétéroclite fait face à des créatures démoniaques qui se tapissent sous les fondations d’un cimetière et d’une église…
THE LURKING FEAR
1994 – USA
Réalisé par C. Courtney Joyner
Avec Blake Bailey, Jon Finch, Ashley Laurence, Jeffrey Combs, Allison Mackie, Paul Mantee, Joe Leavengood, Vincent Schiavelli
THEMA DIABLE ET DÉMONS I SAGA CHARLES BAND
Charles Band doit à H.P. Lovecraft deux de ses productions les plus populaires, Re-Animator et From Beyond. En quête d’un nouveau succès, il puise logiquement une fois de plus dans les écrits du romancier tourmenté de Providence et sollicite le réalisateur Stuart Gordon avec l’idée d’adapter la nouvelle « La Peur qui rôde », publiée en 1923. Mais la compagnie Empire Pictures fait faillite et le projet ne renaît que plus tard sous le label Full Moon Entertainment. Cette fois-ci, c’est C. Courtney Joyner (réalisateur de Future Cop 3 et scénariste de Prison, Class of 1999, Puppet Master III ou encore Doctor Mordrid) qui est chargé d’écrire et de réaliser le film. Suite aux accords qu’il a passé avec les producteurs Vlad et Oana Paunescu, Charles Band délocalise désormais la plupart de ses tournages en Roumanie. La petite équipe menée par Joyner s’installe donc dans les studios Buftea de Bucarest et s’efforce de tirer au mieux parti du minuscule budget mis à sa disposition. Si elle n’a rien de foncièrement marquant, la séquence pré-générique de La Peur qui rôde a le mérite d’attiser la curiosité. Deux sœurs terrifiées tentent d’empêcher des créatures monstrueuses dont nous ne voyons que les griffes de s’emparer d’un bébé. La tension et la nervosité de ce prologue tiennent des promesses qui hélas ne seront pas respectées, le reste du métrage se révélant confondant d’ennui.
Au fil d’un scénario qui ne doit quasiment rien à la nouvelle dont il est censé s’inspirer, plusieurs intrigues s’entremêlent avant de converger. Nous nous intéressons d’abord à un jeune homme qui sort tout juste de prison et se met en quête d’une somme considérable d’argent que son père aurait cachée pour lui dans un cimetière. Ensuite interviennent des gangsters qui eux aussi veulent mettre la main sur le butin. Puis nous découvrons un petit groupe hétéroclite (un médecin, une militaire, une femme enceinte) qui cherche à éliminer des démons dissimulés sous une église. Tout ce petit monde se retrouve à Leffert’s Corner, une petite ville à l’abandon dans laquelle les habitants portent de profondes marques de blessures et où, au détour d’une rue déserte, peuvent surgir un enfant caché sous un masque en plastique transparent ou des restes humains jonchant le sol. L’occasion de mettre en scène un récit d’épouvante original au climat dérangeant était bien là. Mais C. Courtney Joyner rate spectaculairement cette opportunité, nous livrant un film fade et sans attrait.
Les griffes de l’ennui
Il faut dire que La Peur qui rôde force systématiquement le trait, mettant en scène des personnages caricaturaux que leurs interprètes surjouent sans la moindre nuance : le repris de justice aux allures de héros de soap opera (Blake Bailey), l’entrepreneur de pompes funèbres adepte des malversations (Vincent Schiavelli), le médecin dépenaillé et alcoolique (Jeffrey Combs), la militaire sexy qui n’a pas froid aux yeux (Ashley Laurence), la femme fatale échappée d’un film noir des années 40 (Allison Mackie), le mafieux patibulaire (Jon Finch), l’homme de main à la gâchette facile (Joe Leavengood) ou encore le prêtre taciturne (Paul Mantee). C’est d’autant plus regrettable que le talent de la plupart des comédiens sollicités, de Combs (Re-Animator) à Laurence (Hellraiser) en passant par Finch (Macbeth) ou Schiavelli (Ghost), n’est plus à prouver. Mais personne ne semble y croire, pas même les pauvres acteurs déguisés en démons (sous des maquillages pourtant efficaces conçus par Michael S. Deak et Wayne Toth) qui essaient maladroitement d’agripper leurs victimes avec leurs doigts crochus en latex. Statique, répétitif, affublé d’une musique synthétique médiocre de Jim Manzie, La Peur qui rôde n’est donc qu’une série Z facultative à des années lumières des adaptations de Lovecraft signées par Stuart Gordon.
© Gilles Penso
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