Pour la plus fantastique de ses aventures, le détective Sherlock Holmes trouve son interprète idéal sous les traits anguleux de Basil Rathbone…
THE HOUND OF THE BASKERVILLES
1939 – USA
Réalisé par Sidney Lanfield
Avec Basil Rathbone, Nigel Bruce, Richard Greene, Wendy Barrie, Lionel Atwill, John Carradine, Barlowe Borland, Morton Lowry, Eily Malyon, Beryl Mercer
THEMA MAMMIFÈRES
Le Chien des Baskerville de Sidney Lanfield est loin d’être la première des adaptations à l’écran d’une aventure de Sherlock Holmes, mais ce film fait tout de même office de pionnier d’une certaine manière. En effet, si toutes les versions précédentes modernisaient leur cadre pour en faire des récits contemporains, celle-ci prend le parti d’installer son intrigue dans le même contexte que celui décrit dans les romans, c’est-à-dire l’Angleterre victorienne. Tout commence donc en 1899 dans la sinistre lande de Datmoor, au cœur du Devonshire. Dès les premières secondes, une atmosphère inquiétante et irréelle s’installe, via ce manoir lugubre (une très belle maquette) niché au milieu d’arbrisseaux noyés de brume. Soudain, un homme court à perdre haleine et s’écroule dans la lande, mort. Il s’agit de Sir Charles Baskerville (Ian Maclaren), victime d’une crise cardiaque d’après le diagnostic du docteur Mortimer (Lionel Atwill, qui campait la même année le mémorable inspecteur Krogh dans Le Fils de Frankenstein). Après cette brutale entrée en matière, nous voilà à Londres, dans le mythique appartement du 221B Baker Street où Sherlock Holmes et John Watson nous apparaissent sous les traits de Basil Rathbone et Nigel Bruce. Il ne faut pas longtemps aux spectateurs pour constater que les deux personnages viennent de trouver là leurs interprètes idéaux.
Si le docteur Mortimer rend visite au célèbre détective, c’est pour lui avouer qu’il a caché un détail à la police : à côté du corps de Sir Charles se trouvaient les empreintes d’un chien gigantesque. Craignant que personne ne prenne son témoignage au sérieux, il n’en a rien dit. Or il existe une légende autour de la famille Baskerville qui remonte au 16ème siècle, époque où le vil Sir Hugo (Ralph Forbes) kidnappa une servante. Cette dernière prit la fuite, mais lorsqu’Hugo se lança à ses trousses, ce fut pour retrouver son corps sans vie avant d’être lui-même déchiqueté par un chien monstrueux. Charles aurait-il été occis par la même créature ? Alors que le mystère s’épaissit, l’héritier de la famille, Sir Henry Baskerville (Richard Greene), revient du Canada pour prendre possession des biens et du titre de son oncle. Mais lorsqu’il arrive dans le domaine familial, il reçoit une lettre de menaces et risque de se faire tuer. Sherlock Holmes décide alors de mener l’enquête…
Le début d’une longue série
Le Chien des Baskerville nous séduit d’emblée par sa reconstitution soignée du Londres embrumé du 19ème siècle. Si la mise en scène de Sidney Lanfield reste relativement académique, le cinéaste parvient à composer de très belles séquences chorales (avec parfois dix personnages actifs en même temps dans le même cadre) mais aussi d’intéressants gros plans s’attardant sur des regards qui en disent souvent bien plus long que ce que les mots prononcent. Sans doute Lanfield travaille-t-il alors sous l’influence d’Alfred Hitchcock, déjà virtuose dans ce type d’exercice. Les seconds rôles du film se révèlent savoureux, du sinistre couple de majordomes, incarné par John Carradine et Eily Malyon, à l’inquiétant mendiant barbu, qui n’est pas sans rappeler le Ygor du Fils de Frankenstein, en passant par le jeune scientifique Stapleton (Morton Lowry), sa charmante demi-sœur (Wendy Barrie), qui vit de l’autre côté de la lande, ou encore l’épouse du médecin (Beryl Mercer), adepte des séances de spiritisme. Peu confiant dans le succès du film, le studio Fox préfère capitaliser sur le nom de l’acteur Richard Greene en le plaçant en haut de l’affiche, reléguant Basil Rathbone et Nigel Bruce au second plan. Mais le public se déplace en masse et positionne Le Chien des Baskerville en tête du box-office. Rathbone et Bruce incarneront à nouveau Holmes et Watson dans treize autre films… et leurs noms occuperont cette fois-ci la place qu’ils méritent sur chacun des posters.
© Gilles Penso
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