REBEL MOON – PARTIE 1 : ENFANT DU FEU (2023)

Zack Snyder se lance dans un space opera extrêmement ambitieux qui doit beaucoup à Star Wars et aux Sept samouraïs

REBEL MOON – PART 1: A CHILD OF FIRE

 

2023 – USA

 

Réalisé par Zack Snyder

 

Avec Sofia Boutella, Djimon Hounsou, Ed Skrein, Michiel Huisman, Bae Doona, Ray Fisher, Charlie Hunnam, Anthony Hopkins, Staz Nair, Fra Fee, Cleopatra Coleman

 

THEMA SPACE OPERA

Si Rebel Moon évoque tant Star Wars, ce n’est pas tout à fait un hasard. L’idée initiale de Zack Snyder est en effet de proposer à Lucasfilm d’ajouter sa pierre à l’édifice de La Guerre des étoiles à travers un long-métrage un peu plus adulte que les précédents. Nous sommes alors en 2012, peu de temps avant que la société de George Lucas soit rachetée par Walt Disney. Mais son projet est rejeté, manifestement pas en phase avec la ligne éditoriale que la maison de Mickey souhaite adopter pour relancer la franchise. Trois ans plus tard, J.J. Abrams réalisera Le Réveil de la Force. Opiniâtre, Snyder tente de séduire un studio concurrent, Warner Bros, sans plus de succès. C’est finalement Netflix qui ouvrira ses portes pour la seconde fois consécutive à « Mad Zack », après lui avoir laissé le champ libre sur Army of the Dead en 2021. Et comme pour son film de zombies déchaînés en plein Las Vegas, Snyder tourne Rebel Moon au format numérique pour mieux se conformer aux exigences techniques de Netflix, quitte à délaisser les formats 35 et 65 mm qu’il affectionnait tant. D’un commun accord avec la plateforme de streaming, le cinéaste conçoit Rebel Moon sous forme d’un diptyque. Le premier volet est programmé pour décembre 2023 et sa suite au printemps de l’année suivante. De quoi susciter l’attente des (télé)spectateurs et jouer sur leur attente… Pour peu que le public réponde présent, bien sûr.

Ce film choral se situe dans un univers de science-fiction heroic-fantaisiste, le « monde-mère », et se focalise sur le personnage de Kora (Sofia Boutella). Celle-ci, ancien soldat de l’armée de l’Imperium, a décidé de déserter pour se réfugier sur la lune Veldt, dans une petite colonie agricole paisible qui vit de ses récoltes. Mais un jour, une délégation de l’Impérium débarque, menée par le redoutable Atticus Noble (Ed Skrein), et réclame la mainmise sur l’intégralité des récoltes pour nourrir les soldats, quitte à affamer la colonie. Kora décide alors de lancer une quête pour recruter des guerriers dans toute la galaxie afin de s’opposer à l’Imperium. L’intrigue reprend donc dans les grandes lignes celle des 7 mercenaires, déjà déclinée à plusieurs reprises par le passé sous l’angle du space opera (notamment avec Les Mercenaires de l’espace et Les Évadés de l’espace). Snyder assume la référence, Les 7 samouraïs d’Akira Kurosawa figurant parmi ses films de chevet. Mais c’est surtout la version de John Sturges qui nous vient à l’esprit, dans la mesure où Rebel Moon se réapproprie à de nombreuses reprises les codes du western… comme le fit avant lui George Lucas.

Zack Wars

Pour bâtir son propre monde de toutes pièces, Zack Snyder brasse donc les sources d’inspiration et les mixe en un tout qu’il espère cohérent, quitte à assumer – au-delà de celles de Kurosawa et Sturges – l’influence de la saga Star Wars qui servit de starting-block au projet. L’empire galactique dictatorial, les rebelles, les chasseurs de prime, les duels au pistolet laser, les robots amicaux et les bars louches emplis de créatures aux morphologies exubérantes exhalent fatalement un parfum de déjà vu, ce qui n’empêche pas pour autant Rebel Moon de posséder sa propre atmosphère, sa propre saveur et son propre style (Snyder étant plus porté sur la violence et les allusions sexuelles que George Lucas et ses successeurs, on comprend mieux le rejet de Disney). En tête de casting, Sofia Boutella se révèle une solide héroïne d’action, Ed Skrein campe un super-vilain très charismatique, Djimon Hounsou semble cligner de l’œil vers son rôle dans Gladiator et Anthony Hopkins prête sa voix à un étonnant robot pacifiste. Le film est généreux dans son foisonnement d’idées et le réalisateur ne peut s’empêcher de disséminer quelques plans « signature » au fil de l’intrigue (les fameux plans-séquence en plein combat alternant l’ultra-ralenti et la vitesse réelle). Snyder n’a donc rien perdu de son sens visuel et de ses dons d’esthète. Mais son film souffre d’un déséquilibre narratif qui lui donne plus les allures du pilote d’une série TV que d’un long-métrage à part entière. La mise en place est relativement mécanique, jusqu’à un climax qui expédie les choses à la va-vite le temps d’un affrontement spectaculaire mais aux enjeux simplistes.  Il faudra donc attendre le second volet pour s’assurer que le récit de ce space opera tient vraiment la route au-delà de son effet d’annonce.

 

© Gilles Penso


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