Dans ce fleuron de l’épouvante gothique italienne, Barbara Steele incarne une défunte dont l’esprit revient hanter les lieux de son assassinat…
AMANTI D’OLTRETOMBA
1965 – ITALIE
Réalisé par Mario Caiano
Avec Barbara Steele, Paul Muller, Helga Line, Lawrence Clift, Rik Battaglia, Giuseppe Addobbati
THEMA FANTÔMES I MÉDECINE EN FOLIE
En 1965, la reine de l’épouvante Barbara Steele nous offre une double prestation mémorable dans Les Amants d’outre-tombe de Mario Caiano, qui signe ce film sous le pseudonyme d’Alan Grünewald. Dans l’Angleterre de la fin du 19ème siècle, l’éminent professeur Stephen Arrowsmith (Paul Muller) étudie la régénération sanguine. Dès les premières secondes, son épouse Muriel (Barbara Steele) nous apparaît comme un personnage antipathique. Elle se moque de son époux, rabaisse leur vieille servante Solange (Helga Liné) et semble portée sur la bouteille. Sensible comme nombre de ses confrères à la photogénie très particulière de la comédienne, Caiano l’iconise via de nombreux choix artistiques. Un grand portrait qui force ses traits tout en préservant sa beauté trône au-dessus de la cheminée du château qu’elle habite avec son époux, son ombre portée immense la précède sur les murs de la vaste demeure, son visage est souvent scindé entre une zone de lumière et une part d’ombre grâce à la somptueuse photographie d’Enzo Barboni. La musique d’Ennio Morricone elle aussi contribue à cette iconisation, reprenant souvent le thème au piano que joue Muriel au début du métrage pour le décliner tout au long du film.
L’intrigue bascule lorsque le scientifique surprend son épouse dans les bras du jardinier David (Rik Battaglia). Furieux, il défigure ce dernier d’un coup de canne et enchaîne les amants dans une crypte en les soumettant à maints sévices. « Si tu voyais la haine que j’éprouve pour toi, tu frémirais d’horreur », lui dit-elle, à bout de force. « Même en me tuant, tu ne détruiras pas ma haine. Tu peux tuer mon corps mais je te hanterai à tout jamais. » Peu sensible aux menaces, et révélant une cruauté sans borne, le professeur brûle la poitrine de sa femme avec de l’acide après l’avoir violée, puis tue les amants à grands coups de décharges électriques ! Il injecte ensuite le sang électrisé de Muriel dans le corps de Solange, la vieille gouvernante, pour lui redonner beauté et jeunesse.
Ange ou démon ?
Le scénario oscille ainsi entre horreur et science-fiction sans s’encombrer de demi-mesure. C’est alors qu’intervient Jenny, la demi-sœur de Muriel, qui s’installe au château pour disposer de l’héritage et que le savant entend bien épouser pour en profiter. Parfait sosie de Muriel, la jeune femme est aussi incarnée par Barbara Steele, qui nous offre dès lors un visage angélique. Blonde, fragile, docile, elle est peu à peu possédée par l’esprit de sa sœur. Le jeu de la comédienne est alors fascinant, passant en une seconde d’une personnalité à l’autre, d’un sourire, d’un regard, avant de redevenir elle-même. Plus que jamais, la dualité qu’elle incarna si souvent s’exprime dans tout son paradoxe et dans toute sa latitude. Le surgissement final des amants maudits, le visage blafard et à moitié défiguré, fait basculer le film dans le cauchemar, et l’on mesure face à une telle vision l’impact que le film a pu avoir sur Tim Burton, qui en déclinera souvent l’imagerie à travers son œuvre.
© Gilles Penso
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