Exposé à des produits chimiques expérimentaux, un dangereux tueur en série se transforme en bonhomme de neige psychopathe !
C’est en fabriquant un bonhomme de neige en compagnie d’un groupe d’amis qui partagent avec lui une cabane à Big Bear Lake, en Californie, que le scénariste Michael Cooney pense pour la première fois à l’histoire de Jack Frost. Nous sommes alors en 1989 et son script commence à faire le tour des studios pendant plusieurs années infructueuses, jusqu’à atterrir entre les mains du réalisateur Renny Harlin (Prison, Le Cauchemar de Freddy, 58 minutes pour vivre, Cliffhanger). Le cinéaste n’a pas oublié ses affinités premières avec le genre horrifique et se laisse tenter par cette histoire de bonhomme de neige tueur. Le budget est estimé à une trentaine de millions de dollars et l’on envisage de recourir aux images de synthèse pour la majorité des effets spéciaux. Mais lorsqu’elle découvre le scénario, Geena Davis – alors épouse de Harlin – s’affole : selon elle, c’est la pire chose qu’elle ait jamais lue ! Elle convainc son mari de s’engager plutôt sur L’île aux pirates et Jack Frost revient alors à la case départ. C’est finalement la modeste compagnie Prism Entertainment qui récupère le projet et accepte de le financer à condition que le budget ne dépasse pas le million de dollars, que le tournage soit effectué avec des chutes de pellicule récupérées dans les rebuts des grands studios, que les effets spéciaux soient artisanaux et que Michael Cooney accepte de réaliser le film lui-même, exercice auquel il ne s’était encore jamais prêté. C’est donc dans des conditions très précaires que Jack Frost voit le jour.
Par une nuit enneigée de décembre, un véhicule de transfert pénitenciaire traverse la petite ville tranquille de Snowmonton. À l’intérieur se trouve le tueur en série Jack Frost (Scott MacDonald), qui a échappé à la police pendant des années et laissé derrière lui trente-huit cadavres à travers onze États avant d’être finalement arrêté par Sam Tiler (Christopher Allport), le shérif de la bourgade. Jack doit être exécuté à minuit, mais il parvient à tuer le garde tandis que le véhicule s’écrase contre un camion de recherche génétique. Jack est alors exposé à des produits chimiques, ce qui le dissout et le fait fusionner avec la neige. Les maquillages spéciaux excessifs visualisant la décomposition de son corps (dignes d’un film Troma) et l’emploi du dessin animé pour montrer la mutation de son organisme annoncent la couleur : l’artisanat, l’exubérance et le second degré seront de la partie. Après ce prologue choc, le film prend le temps de nous présenter la population locale de cette petite ville américaine typique en pleins préparatifs de Noël. Le shérif, sa petite famille, ses collègues, les commerçants, le curé, le docteur, les jeunes du coin… Bref tout un échantillon de futures victimes pour le monstre neigeux !
Complètement givré
Les meurtres qui jalonnent Jack Frost sont inventifs mais le manque de moyens se fait cruellement ressentir. Maladroite, la mise en scène élude en effet beaucoup de choses pour éviter de solliciter des effets spéciaux trop élaborés. Michael Cooney joue donc très souvent la carte de l’ellipse (on devine les choses plus qu’on ne les voit) et recours à une astuce scénaristique qui lui facilite bien la tâche : le bonhomme tueur est capable de fondre et de se recongeler instantanément, se déplaçant à la vitesse de l’éclair d’un endroit à l’autre. Voilà qui est bien pratique pour ne pas avoir à montrer le monstre blanc en train de bouger ou de se déplacer. Les talentueux et inventifs Screaming Mad George (Society) et Michael S. Deak (Re-Animator II) sont pourtant en charge des effets spéciaux de maquillage. Mais manifestement, les moyens à leur disposition ne leur permettent pas de s’épanouir à la hauteur de leurs capacités. Le dernier tiers du film nous offre tout de même quelques passages joyeusement délirants, comme le lancer de stalactites mortelles, la transformation de Frost en boule de neige géante ou encore cette scène folle où une jeune femme prend son bain avant de se rendre compte que l’eau qui l’entoure n’est autre que ce bon vieux Jack Frost qui se resolidifie autour d’elle et n’en fait qu’une bouchée. En parfait émule de Freddy ou de Chucky, le tueur givré ricane à loisir et multiplie les mauvaises blagues chaque fois qu’il occis quelqu’un – donc assez souvent. Ce slasher sans queue ni tête qu’on croirait issu des années 80 est donc complètement stupide mais hautement sympathique.
© Gilles Penso
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