FAMILLE ADDAMS (LA) (1964-1966)

Quatre accords à l’orgue, deux claquements de doigts… Bienvenue dans la famille la plus macabrement drôle de l’histoire de la télévision

THE ADDAMS FAMILY

 

1964/1966 – USA

 

Créée par David Levy

 

Avec Carolyn Jones, John Astin, Jackie Coogan, Lisa Loring, Ted Cassidy, Marie Blake, Ken Weatherwax, Felix Silla, Parley Baer, Eddie Quillan, Vito Scotti

 

THEMA FREAKS I MAINS VIVANTES

Féru d’humour noir, le dessinateur Charles Addams commence à publier dans le magazine The New Yorker une série de dessins humoristiques consacrés à une famille drôle et sinistre à laquelle il donne son propre nom. Dès leur première publication en 1938, ces histoires en noir et blanc gorgées de gags macabres remportent un grand succès. Scénariste et producteur pour la télévision américaine depuis le début des années 50, David Levy décide au milieu de la décennie suivante de porter à l’écran les dessins d’Addams. Il convainc même ce dernier de participer à la future série TV qu’il a en tête. Le dessinateur donne donc un nom à chacun des personnages – qui n’en portaient pas dans ses publications originales. L’un des atouts artistiques clés de cette Famille Addams télévisée sera le producteur Nat Perrin, scénariste de plusieurs films des Marx Brothers. Son sens de la satire, de l’humour visuel, des dialogues comiques et des gags absurdes sera déterminant pour définir la tonalité du show. Ainsi naît une sitcom pas comme les autres, dont le grain de folie irradie chacun de ses épisodes de 30 minutes dans une atmosphère gothico-lugubre saisie par la photographie en noir et blanc d’Archie R. Dalzell (La Petite boutique des horreurs).

Il n’était évidemment pas simple de trouver des contreparties en chair et en os des personnages dessinés par Charles Addams. Le parti pris de la série n’est pas de jouer la carte du mimétisme à tout prix mais de trouver des interprètes charismatiques au fort potentiel comique que les départements costumes et maquillages se chargeront de faire ressembler à leurs modèles en 2D. Habituée du cinéma fantastique (L’Homme au masque de cire, L’Invasion des profanateurs de sépulture), Carolyn Jones entre dans la peau de la femme fatale Morticia Addams, une mère de famille beaucoup plus sexualisée que ses contreparties télévisées de l’époque. Son époux Gomez, qui la couvre de baisers et de mots doux, est campé par le vétéran de la télévision John Astin, qui trouve là le rôle le plus marquant de sa carrière. Les rejetons délicieusement sinistres de Morticia et Gomez, Mercredi et Pugsley, sont incarnés par Lisa Loring et Ken Weatherwax. C’est dans leur grand manoir aux allures de musée des horreurs que se déroule la grande majorité des épisodes de la série et où évolue – en s’appuyant bien souvent sur les mécanismes comiques du Vaudeville – une galerie de personnages mémorables, notamment le majordome Lurch (Ted Cassidy) aux allures de monstre de Frankenstein, la main coupée la Chose, le très bizarre oncle Fester (Jackie Coogan), le chevelu cousin Itt (Felix Silla) ou encore la grand-mère Grandmama (Marie Blake) férue de potions douteuses.

Humour noir

Les effets comiques de La Famille Addams s’appuient beaucoup sur le décalage qui se crée naturellement entre les mœurs atypiques de nos héros et la réaction qu’elles provoquent chez leurs visiteurs « normaux ». Au-delà des éclats de rire, c’est justement la question de la normalité que pose en substance la série, avec d’autant plus d’acuité que Charles Addams lui-même partageait avec ses héros le goût de l’étrangeté, du gothisme et des ornementations macabres. L’ambiance « soirée d’Halloween » que dégage La Famille Addams n’est donc pas un simple environnement visuel attrayant mais presque une philosophie de la vie. Comment ne pas se laisser séduire par cette faune hétéroclite qui semble s’aimer avec sincérité et intensité justement parce qu’elle n’obéit pas aux normes classiques qu’impose la société guindée de son époque ? Le succès de La Famille Addams, dont chaque épisode s’ouvre sur l’inoubliable générique composé et chanté par Vic Mizzy, sera quelque peu tempéré à l’époque par la diffusion d’une autre série aux thématiques très proches, Les Monstres. Mais depuis, l’histoire a repositionné le show de David Levy à la place de choix qui lui revient. Plusieurs autres séries (animées ou non) et quelques longs-métrages prendront la suite pour raconter à leur manière les aventures rocambolesques de cette famille joyeusement sépulcrale.

 

© Gilles Penso


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