Membre de la police scientifique de Miami le jour, serial killer la nuit, Dexter Morgan applique sa propre justice selon un rituel immuable…
DEXTER
2006/2022 – USA
Créée par James Manos Jr.
Avec Michael C. Hall, Julie Benz, Jennifer Carpenter, Erik King, Lauren Vélez, David Zayas, James Remar, C.S. Lee, Desmond Harrington, Aimee Garcia, Geoff Pierson
THEMA TUEURS
C’est le roman « Ce cher Dexter » de Jeff Lindsay, publié en 2004, qui donne à James Manos Jr. l’impulsion pour créer l’une des séries les plus perturbantes, les plus atypiques et les plus populaires de sa génération. A mi-chemin entre l’enquête policière, la comédie, l’horreur et le drame, Dexter est un cas à part qui se réapproprie les ingrédients de tous ces genres très codifiés (surtout sur le petit écran) pour en faire jaillir un mélange unique. Cette alchimie presque miraculeuse opère dès le générique, petit chef d’œuvre à lui seul qui, rythmé sur un thème musical faussement enjoué composé par Rolfe Kent, détourne tous les gestes quotidiens d’une matinée ordinaire (le réveil, la douche, le petit déjeuner) pour leur donner un double sens évoquant le meurtre et le passage de vie à trépas. Dexter repose ainsi sur sa mise en scène au cordeau, son écriture millimétrée et son casting hors pair. En tête d’affiche, Michael C. Hall crève l’écran. Dans Six Feet Under, il endossait déjà un rôle complexe et montrait toute l’étendue de son talent. Ici, il entre dans la peau d’un personnage incroyablement attachant et qui pourtant souffre de ne ressentir aucune émotion, d’être étranger à l’empathie et d’être sans cesse guidé par une pulsion qui le pousse à tuer sur un rythme régulier.
Orphelin à l’âge de trois ans, alors qu’il est témoin du meurtre brutal de sa mère à la tronçonneuse, Dexter est adopté par Harry Morgan, un policier de Miami. Reconnaissant le traumatisme du garçon et le développement ultérieur de ses tendances sociopathes, Harry le manipule pour qu’il canalise son inextinguible soif de sang, lui apprenant à tuer les criminels inexcusables qui ont échappé à la justice. Désormais adulte, Dexter travaille au sein de la police de Miami en tant qu’analyste médico-légal, spécialisé dans l’analyse des éclaboussures de sang. Cette activité est la couverture idéale pour qu’il puisse assouvir ses penchants psychopathes. Chaque fois qu’il a repéré une victime susceptible d’entrer dans son « code », il l’endort avec une injection soporifique, l’attache dans une salle d’exécution entièrement recouverte de plastique, lui plante un couteau dans le cœur, découpe son cadavre et s’en débarrasse en jetant les morceaux dans l’océan Atlantique, non sans avoir prélevé au préalable un goutte de sang qu’il conserve précieusement dans sa collection de trophées. Dexter a donc deux personnalités bien distinctes qui cohabitent en parfaite harmonie : l’homme affable entouré d’amis et de collègues d’un côté, l’assassin assoiffé de sang de l’autre. Mais cet équilibre aura maintes occasions d’être mis à rude épreuve.
« Le passager noir »
Pour mieux jouer la carte du contraste, Dexter se déroule dans une atmosphère colorée et lumineuse, sous le soleil de Miami, aux accents d’une bande originale qui intègre régulièrement des standards de la salsa. Le héros lui-même arbore volontiers des chemises à fleurs et des tenues estivales bien peu conformes à ses activités secrètes inavouables. Aux côtés de Michael C. Hall, une galerie de personnages secondaires concourt à bâtir l’atmosphère de la série et à se ranger dans deux camps bien distincts : ses alliés et ses obstacles. Jennifer Carpenter (qu’on avait découverte dans L’Exorcisme d’Emily Rose) campe à merveille la sœur de Dexter, une femme-flic dure à cuire qui cache derrière sa carapace de nombreuses failles. Le vétéran James Remar (Les Guerriers de la nuit, Cruising, 48 heures, Cotton Club), de son côté, incarne le père de Dexter, mort depuis longtemps mais rendant régulièrement visite à son fils sous forme d’un fantôme peu avare en conseils et en recommandations. C’est lui qui guide notre tueur en série et lui apprend à gérer son « passager noir », autrement dit la part sombre de sa personnalité. Quelques guest-stars font également une apparition remarquée, notamment John Lithgow sous la défroque d’un redoutable tueur qui, à partir de la saison 4, va sérieusement compliquer la tâche de notre « héros ». Dexter s’achève en 2013 au bout de huit saisons, puis réapparaît le temps d’un ultime tour de piste avec huit épisodes diffusés en 2022. Ce « revival » tardif en a déçu plus d’un, ce qui n’empêche pas Dexter d’être l’une des séries les plus marquantes des années 2000, comme en témoigne la pluie de prix dont elle fut récompensée.
© Gilles Penso
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