FINAL CUT (2004)

Dans le futur, les humains portent des implants électroniques qui enregistrent tous leurs souvenirs en prévision de leurs obsèques…

THE FINAL CUT

 

2004 – USA

 

Réalisé par Omar Naïm

 

Avec Robin Williams, Jim Caviezel, Mira Sorvino, Genevieve Buechner, Leanne Adachi, Stephanie Romanov, Thom Bishops

 

THEMA FUTUR I CINÉMA ET TÉLÉVISION

Aussi étrange que ça puisse paraître, l’idée de la fable de science-fiction futuriste Final Cut est née dans l’esprit du réalisateur d’origine libanaise Omar Naïm alors qu’il était en train de travailler sur son film documentaire Grand Theater : A Tale of Beirut consacré à la guerre civile au Liban. En plein processus de montage, il découvre à quel point l’agencement des séquences, leur rallongement ou leur omission peut radicalement changer le sens de son film. Le témoignage des faits passés – et donc leur souvenir – se révèle ainsi forcément subjectif. Petit à petit, le scénario de Final Cut se formule dans la tête du cinéaste. L’intrigue se situe dans un futur indéterminé où il est désormais de mise de se faire poser l’implant Zoé, une puce électronique qui enregistre les moindres faits et gestes. Lorsque les gens meurent, ces puces sont retirées et les images enregistrées tout au long de leur vie peuvent alors être montées (avec une machine surnommée « la guillotine ») puis diffusées lors de leurs obsèques. Mais un jour, Alan Hakman, l’un des « monteurs » les plus demandés, retrouve pendant l’un de ces montages une image issue de son enfance qui le hante depuis toujours. Cette découverte va l’amener à chercher la vérité sur sa propre histoire…

Dans un premier temps, Omar Naïm voit son personnage principal comme un homme froid et distant ne laissant transparaître aucune émotion. Mais lorsque Robin Williams hérite du rôle, la donne change un peu. Même si l’acteur tient à inscrire cette performance dans la lignée « sombre » de sa filmographie, donc dans la continuité des rôles qu’il tenait dans Photo Obsession et Insomnia, ses penchants naturellement comiques lui permettent de doter Alan Hakman d’une humanité et d’une sensibilité non prévues initialement dans le scénario. La vie pathétique de cet homme solitaire n’en est que plus touchante. Car Hakman ne vit que pour son travail. Étant donné que sa mission consiste à reconstituer les souvenirs de ses semblables (filmés en caméra subjective) en prenant bien soin d’effacer tous les éléments indésirables, il se considère comme les « mangeurs de péchés » des tribus primitives. Les questions éthiques que pose le scénario prennent une tournure nouvelle lorsqu’intervient Fletcher (Jim Caviezel), un ancien « monteur » manifestant désormais contre ces pratiques et souhaitant faire éclater au grand jour les souvenirs peu glorieux de l’avocat pédophile à la tête de la toute puissante compagnie Eye Tech.

Les mangeurs de péchés

Le montage jouant un rôle prépondérant dans le film, Omar Naïm tient à être épaulé par un vétéran de la profession et se tourne donc vers la grande Dede Allen (L’Arnaqueur, Bonnie et Clyde, Little Big Man, Abattoir 5, Serpico, Un après-midi de chien, Breakfast Club, La Famille Addams, quelle carrière !). Pour la bande originale de Final Cut, élément clé de son atmosphère glaciale et tendue, le réalisateur sollicite Brian Tyler qui parvient à doter le film d’une patine sonore très distinctive. Final Cut a donc beaucoup d’atouts, le moindre n’étant pas bien sûr son postulat de science-fiction qu’on imagine très plausible et qui sera entre autres décliné dans la série Black Mirror. Mais l’austérité et la lenteur du film finissent par jouer en sa défaveur. Son impact et la force de son récit s’en trouvent fatalement amenuisés. L’autre problème de Final Cut est le manque de clarté de son message. Le film semble vouloir à la fois nous dire qu’il ne faut pas enregistrer ses souvenirs pour pouvoir se les remémorer naturellement, et en même temps qu’il est important d’être capable de les revisionner pour mieux les comprendre. À ces réserves près, l’exercice demeure fascinant et se place surtout à contre-courant des blockbusters de SF traditionnels. Présenté en compétition dans de nombreux festivals, Final Cut a remporté le prix du scénario à Deauville.

 

© Gilles Penso


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