Des rites vaudous, des âmes enfermées dans des corps d’oiseaux, une main volante aux doigts-serpents… Bienvenue dans les productions Charles Band !
NETHERWORLD
1992 – USA
Réalisé par David Schmoeller
Avec Michael Bendetti, Denise Gentile, Anjanette Comer, Holly Floria, Robert Sampson, Holly Butler, Alex Datcher, Robert Burr, George Kelly
THEMA SORCELLERIE ET MAGIE I MAINS VIVANTES I SAGA CHARLES BAND
Habitué des productions Charles Band, David Schmoeller avait déjà réalisé pour les compagnies Empire puis Full Moon quelques titres emblématiques comme Tourist Trap, Fou à tuer ou Puppet Master. Son projet suivant est un thriller hitchcockien baptisé Whispers & Seduction auquel il tient beaucoup mais qui ne convainc guère Band. « Le problème, lorsque vous travaillez avec Charlie, c’est qu’il ne comprend et ne s’intéresse qu’à la science-fiction, le fantastique et l’horreur », avoue Schmoeller. « Voilà pourquoi Whispers & Shadows ne s’est pas fait. » (1) Le réalisateur hérite donc d’un autre projet concocté par Charles Band sous le titre de Netherworld (qui sera traduit en français par La Main des ténèbres). Ce film, censé d’abord être dirigé par Ted Nicolaou en Roumanie, est sans cesse repoussé et entre enfin en production en 1992. Le scénario est signé Schmoeller (sous le pseudonyme improbable de Billy Chicago) et le rôle principal échoit à Michael Bendetti, l’un des acteurs récurrents de la série 21 Jump Street. Schmoeller lui-même fait une petite apparition dans le rôle d’un barman qui fait tourner une bouteille de bière sur son doigt comme s’il s’agissait d’une toupie (talent dont le réalisateur n’est pas peu fier et qu’il peut donc exhiber à l’écran !).
La photographie moite d’Adolfo Bartoli et la caméra rampante de Schmoeller saisissent dès les premières secondes l’ambiance interlope d’un établissement peu recommandable juché au milieu des bayous de la Louisiane : coups de feu et bagarres, prostituées à l’affut des clients, murs décrépits, serpents et poules qui se partagent le sol poisseux, sous-sol mystérieux… Le film s’intéresse à Corey Thorton (Michael Bendetti), un jeune homme qui vient d’hériter de la somptueuse propriété d’un père qu’il n’a jamais connu en Louisiane. Sur place, il fait la connaissance de l’avocat taciturne de son père (Robert Burr), de la gouvernante des lieux (Anjanette Comer) et de sa fille (Holly Floria). Un carnet manuscrit laissé à son attention par son père Noah (Robert Sampson) affirme qu’il a trouvé un moyen pour revenir d’entre les morts et qu’il compte sur son fils pour l’aider. La clé de cette résurrection serait détenue par une adepte de pratiques occultes nommée Delores (Denise Gentile)…
La main qui tue
Schmoeller s’investit comme il peut dans ce film, mais l’on sent bien qu’il n’y croit qu’à moitié. « Une partie de la notion de “père/fils” vient de ma propre biographie », avoue-t-il. « Mon père a quitté ma famille lorsque j’avais un an et n’a jamais regardé en arrière. J’ai donc pu injecter un peu d’émotions personnelles. C’était un film amusant à faire et les extérieurs naturels le rendaient encore plus intéressant, mais je n’ai jamais pu résoudre le problème du monde souterrain, le « netherworld » : comment le montrer de manière convaincante, surtout quand on ne dispose que de 2000 dollars pour construire les décors ? Ça ressemble à ce que l’on voit dans le film, c’est assez ridicule. » (2) Certes, le maquilleur spécial Mark Shostrom tente bien de nous secouer de notre torpeur avec cette main pétrifiée qui se détache d’un mur, vole dans les couloirs comme la sphère de Phantasm et attaque ses victimes avec ses doigts-serpents qui déchiquètent les visages. Mais ces petits passages insolites – au demeurant incompréhensibles – ne chassent pas totalement l’ennui des spectateurs, bien en mal de s’intéresser aux personnages insipides et à l’intrigue filiforme du film, dont chaque séquence est ponctuée par des roucoulements de colombes, des battements d’ailes, des cris de rapaces, des images d’oiseaux en cage et de plumes qui flottent. Peu mémorable, La Main des ténèbres fera une petite apparition dans les bacs des vidéoclubs avant de disparaître de la circulation.
(1) et (2) Propos extraits du livre « It Came From the Video Aisle ! » (2017)
© Gilles Penso
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