Premier film d’horreur de David DeCoteau, ce slasher surnaturel met en scène une succube aux appétits sanglants…
DREAMANIAC
1986 – USA
Réalisé par David DeCoteau
Avec Thomas Bern, Ashlyn Gere, Sylvia Summers, Lauren Peterson, Bob Pelham, Cynthia Crass, Brad Laughlin, Linda Denise Martin, Matthew Phelps, Lisa EMery
THEMA DIABLE ET DÉMONS I TUEURS I SAGA CHARLES BAND
David DeCoteau fait ses débuts dans le cinéma en tournant des films pornographiques gay, une industrie alors en plein essor dans les années 80. En deux ans, il réalise une bonne dizaine de longs-métrages de cet acabit, camouflé la plupart du temps derrière un pseudonyme, puis décide de s’attaquer à un genre différent susceptible de lui ouvrir un public plus large : l’horreur. À 24 ans, il écrit donc un long-métrage titré Succubus et réunit l’argent nécessaire (c’est-à-dire pas grand-chose) pour pouvoir le mettre en scène. Après dix jours de tournage, DeCoteau approche le producteur Charles Band et lui propose de lui montrer les rushes. « Ce n’était pas un chef d’œuvre », avoue Band, « mais David était très prometteur, et j’aimais le fait qu’il ait la même approche que moi : faire les choses, tout simplement. J’ai financé la post-production, j’ai réuni un peu d’argent pour lui et j’ai distribué le film sous la bannière de ma compagnie Empire. » (1) Jamais à cours d’idée lorsqu’il s’agit de surfer sur les modes du moment, le producteur change le titre au passage. Succubus devient donc Dreamaniac, dans l’espoir de profiter du succès des Griffes de la nuit. Le slogan sur les posters de l’époque assume d’ailleurs la référence en affirmant : « Pas besoin d’habiter à Elm Street pour faire des cauchemars ». Le film n’a pourtant aucun rapport avec le monde des rêves, mais les voies de l’opportunisme sont souvent impénétrables.
Le personnage principal du film est Adam (Thomas Bern), un musicien de heavy metal qui, pour une raison qui nous échappe (la quête de la gloire, de l’inspiration ou du succès auprès des femmes ?), décide d’invoquer une entité mystérieuse qui répond au nom d’Alou. Il allume donc des bougies dans sa chambre, écoute une musique planante, déchiffre un vieux livre écrit en français et se lance dans quelques incantations évasives. Bientôt apparaît Lily (Sylvia Summers), une jeune femme qui se love contre lui et entreprend de lui octroyer une petite gâterie. Mais soudain il hurle, tandis que nous la découvrons la bouche pleine de sang. S’agissait-il d’une hallucination ? Nous n’en savons trop rien, le scénario prenant le parti de ne pas s’attarder sur ce genre de détail. Tout ce que nous savons, c’est qu’une petite fête entre étudiants se prépare dans la maison, orchestrée par la petite amie d’Adam (Ashlyn Gere). La soirée en question s’avère aussi ennuyeuse pour les participants que pour les spectateurs, qui attendent désespérément un peu d’action. C’est alors que s’installe la mécanique du slasher.
Très très méchante
Lily s’immisce ainsi entre les différents invités, attend qu’ils s’isolent et se lance dans un joyeux massacre. Le carnage s’effectue au couteau, au rasoir, au tisonnier, au fil électrique, au bâton de ski, à la perceuse ou à mains nues, tandis que des effets spéciaux gore bricolés avec les moyens du bord font ce qu’ils peuvent pour éclabousser l’écran. L’un des invités, plus malin que les autres, a tout compris : « Ce n’est pas une fille, c’est un succube », s’exclame-t-il. « Elle baise les hommes et elle les tue ! » Le comportement d’Adam reste la plupart du temps incompréhensible. Complice involontaire de la tuerie, il s’offusque très mollement. « Il faut que ça s’arrête » dit-il ainsi sans conviction à Lily, tandis qu’à l’arrière-plan gisent deux cadavres enlacés l’un contre l’autre. Puis il se montre plus entreprenant, participant même activement au massacre. Dreamaniac est un film au rythme lent, affublé d’une facture de court-métrage amateur des années 80, d’une prise de son déficiente et d’un jeu d’acteurs globalement catastrophique. Comment ne pas s’embarrasser face à cette pauvre Sylvia Summers qui fait les gros yeux en nettoyant son couteau pour nous faire comprendre qu’elle est très très méchante ? Fidèle à ses goûts, David DeCoteau a tendance à déshabiller plus volontiers les garçons que les filles, arguant que la plupart des actrices ont refusé de satisfaire aux exigences de nudité du scénario, contrairement aux acteurs qui se sont révélés plus à l’aise. « J’ai investi dans David, plus que dans Dreamaniac » avoue Charles Band, bien conscient des maigres qualités de ce galop d’essai. « Et cet investissement s’est avéré payant. David a depuis réalisé des tonnes de films pour moi. C’est en outre devenu l’un de mes amis les plus proches. » (2)
(1) et (2) Extraits de l’autobiographie de Charles Band « Confessions of a Puppetmaster » (2021)
© Gilles Penso
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