Klaus Kinski incarne le fils d’un officier nazi qui capture des jeunes femmes dans son appartement, les séquestre et les assassine…
CRAWLSPACE
1986 – USA
Réalisé par David Schmoeller
Avec Klaus Kinski, Talia Balsam, Barbara Whinnery, Carole Francis, Tane McClure, Kenneth Robert Shippy, Sally Brown, Jack Heller, David Abbott, Sherry Buchanan
THEMA TUEURS I SAGA CHARLES BAND
Fidèle à ses habitudes, le producteur Charles Band tourne plusieurs films en même temps, recycle les décors et les accessoires des longs-métrages qu’il chapeaute et vend des concepts à d’éventuels investisseurs sur simple présentation d’un titre prometteur et d’un poster alléchant. Lorsqu’il réussit à intéresser du monde autour d’un projet baptisé Crawlspace (qu’on pourrait traduire par « vide sanitaire »), il charge David Schmoeller d’en tirer un scénario. Ce dernier avait passé un moment agréable avec Band sur le tournage de Tourist Trap, donc pourquoi pas ? Schmoeller imagine l’histoire d’un vétéran de la guerre du Viet-Nam devenu psychopathe au point de transformer son grenier en camp de prisonniers de guerre. Band aime le concept mais craint que le public américain ne soit pas encore prêt pour un tel sujet. Il envisage plutôt de transformer le personnage en ancien nazi. Les réticences de Schmoeller – bien légitimes – s’évaporent lorsque son producteur lui promet Klaus Kinski dans le rôle principal. Cet acteur légendaire étant disponible, tout le monde saute sur l’occasion et le scénario est spécialement réécrit pour lui. Mais Schmoeller déchante rapidement. Kinski se comporte en effet comme un dément pendant le tournage, hurle lorsque les costumes qu’on lui propose ne lui conviennent pas, refuse de prononcer certains dialogues, n’obéit pas aux instructions de base que sont « action ! » et « coupez ! », provoque de nombreuses bagarres. Les membres de l’équipe finissent même par supplier Schmoeller de l’abattre ! Finalement, le titre français du film se sera révélé parfaitement adapté.
Tant bien que mal, Fou à tuer se tourne malgré la tourmente. Les spectateurs attentifs reconnaîtront le décor de l’immeuble dans lequel se déroule la quasi-totalité de l’action : c’est le même que celui de Troll. Charles Band reste le roi du recyclage. Kinski incarne Karl Gunther, le propriétaire des lieux, un homme passablement perturbé saisi par des élans sadomasochistes. Fils d’un tortionnaire nazi, il fut lui-même médecin à Buenos Aires où il pratiqua l’euthanasie sur bon nombre de patients. Désormais, il espionne ses voisines, en kidnappe quelques-unes, les mutile ou les tue et se confesse dans un journal intime. « Autrefois je tuais pour la science, maintenant je tue parce que je ne peux plus m’arrêter » écrit-il l’air pensif. Lorsqu’il n’occis pas ou ne prélève pas d’organes sur ceux qu’il considère comme ses rivaux, Gunther joue à la roulette russe avec un pistolet chargé, dans l’espoir de se tuer un jour et de mettre fin à sa folie meurtrière avec le peu de moralité qui lui reste. Mais c’est à chaque fois un « clic » qui résonne lorsqu’il appuie sur la gâchette. « Qu’il en soit ainsi » dit-il alors avec philosophie, avant de reprendre ses activités troubles.
Tuez Monsieur Kinski !
Fou à tuer se drape d’une musique superbement grandiloquente de Pino Donaggio, qui prend bien soin d’éviter d’autoplagier son travail sur Body Double lors des nombreuses séquences de voyeurisme du film. Dans l’une d’elles, Tane McClure, la fille de l’acteur Doug McClure (Le Sixième continent, Les 7 cités d’Atlantis) en fait des tonnes, se trémoussant sans retenue et découpant aux ciseaux les bouts de son soutien-gorge ! Papa Doug sera fort mécontent en découvrant le résultat. Quant à Kinski, il montrera un fort penchant pour l’actrice, à tel point que le réalisateur la sollicitera tout le temps sur le plateau, même lorsque sa présence n’est pas nécessaire, dans l’espoir de calmer le tempérament imprévisible de sa star. Le film redouble de séquences troublantes, notamment les lamentations muettes d’une prisonnière enfermée dans une cage dont Gunther a coupé la langue mais qu’il maintient en vie pour avoir quelqu’un à qui parler, ou les reptations surréalistes de Kinski dans les conduits qui relient chacun des appartements. Le problème, c’est que l’intrigue n’est pas follement palpitante, les personnages passant le plus clair de leur temps à monter les escaliers, descendre les escaliers et frapper aux portes. Tout ce qui tourne autour de ce super-vilain néo-nazi est finalement si excessif (ses gadgets, ses armes, ses instruments de torture, son comportement général) que le climax, conçu comme une descente aux enfers cauchemardesques, sombre tranquillement dans le ridicule. Pour prendre sa revanche sur cette expérience traumatisante, David Schmoeller réalisera plus tard un court-métrage au titre évocateur : Please Kill Mr. Kinski !
© Gilles Penso
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