Fou de chagrin après la mort de sa fiancée, un étudiant en médecine kidnappe des prostituées pour lui redonner un corps…
FRANKENHOOKER
1990 – USA
Réalisé par Frank Henenlotter
Avec James Lorintz, Patty Mullen, Charlotte Helmkamp, Louise Lasser, Vicki Darnell, Shirl Bernheim, Joanne Ritchie
THEMA FRANKENSTEIN
C’est presque sous forme d’une blague que le réalisateur Frank Henenlotter, à qui nous devons les déjantés Frère de sang et Elmer le remue-méninges, évoqua un jour face à d’éventuels financiers le projet de Frankenhooker. Il faut croire que son pitch fit son petit effet, car la production se mit en branle aussitôt, poussant le trublion à écrire en vitesse un scénario susceptible de tenir la route, épaulé par son co-auteur Robert Martin (interprète non crédité d’un des nombreux zombies du Jour des morts-vivants). Le délire érotico-parodique bat bien sûr son plein dans cette série B sans complexe dont le titre pourrait être traduit par « Frankenprostituée » ! Jeffrey Franken (James Lorintz) poursuit ses études de médecine lorsque sa fiancée, Elisabeth Shelley (Patty Mullen), meurt dans un accident de tondeuse à gazon. La malheureuse se retrouve littéralement en mille morceaux, ce qui permet rapidement de donner le ton du film. Le médecin en herbe est tellement épris de sa dulcinée en miettes qu’il colle sa photo sur toutes sortes de corps : celui d’un petit « écorché » en plastique, ceux de playmates diverses et surtout celui, grandeur nature, d’un grand dessin d’organisme féminin mis à nu sur lequel il imagine une myriade de composantes électriques et de branchements pendant tout le générique de début.
Passablement effondré, Jeffrey recueille la tête de sa défunte promise et la maintient en survie, en une sorte d’hommage au fameux Cerveau qui ne voulait pas mourir. Dans l’espoir de lui fournir un corps bien proportionné, il se met à fréquenter les bars louches de Manhattan afin d’y repérer quelques prostituées dont la taille est adéquate. Il guette ensuite l’orage qui lui fournira l’énergie nécessaire pour recoller les morceaux et donner vie à sa créature. Hélas, Franken s’aperçoit vite que son amoureuse raccommodée et ressuscitée se conduit comme une prostituée. Alors qu’il décide de reprendre ses travaux, le souteneur de ces dames – qui répond au doux nom de Zorro – commence à s’inquiéter de toutes ces disparitions au sein de son cheptel… C’est là que survient l’un des morceaux d’anthologie de Frankenhooker : l’explosion d’une dizaine de prostituées junkies dans une chambre d’hôtel, un pur moment de délire.
La belle est la bête
Peu avare en grimaces élastiques déformant à loisir son joli visage, Patty Mullen (ex playmate de « Penthouse ») excelle dans le rôle de cette créature de rêve au comportement bien peu catholique, l’expérience ayant présidé à sa naissance se révélant fidèlement calquée sur celle des classiques de l’Universal. Les jolies filles qui lui donnent la réplique ont principalement été dénichées dans les doubles pages des magazines de charme ou dans les bars à strip-tease, et toutes participent à cette fête érotico-gore avec une bonne humeur communicative. Les gags du film clignent même parfois de l’œil vers les absurdités des Monty Pythons ou des ZAZ, comme lorsque le garage des Franken s’avère quatre fois plus grand à l’intérieur qu’il ne le semblait vu de l’extérieur. Vers la fin du film, des morceaux de femmes collés anarchiquement entre eux et ramenés accidentellement à la vie par la foudre attaquent le proxénète dans une scène démente digne du Screaming Mad George de Re-Animator 2 et Society. Avec des moyens ridicules, Gabe Bartalos compose là des maquillages approximatifs mais très efficaces, l’ensemble du film ayant été bouclé avec un budget très modeste d’1,7 million de dollars (plus élevé cependant que ceux des films précédents d’Henenlotter). Exempté de classification X grâce à son humour offrant une distance secourable, Frankenhooker s’achève sur un ultime gag joyeusement graveleux.
© Gilles Penso
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