LE MONSTRE DU MARÉCAGE (1957)

Un cowboy mexicain mène l’enquête sur la disparition d’un cadavre et se heurte à un homme-poisson qui sévit dans un marais sinistre…

EL PANTANO DE LAS ANIMAS

 

1957 – MEXIQUE

 

Réalisé par Rafael Baledon

 

Avec Gaston Santos, Manola Saavedra, Manuel Dondé, Sara Cabrera, Salvador Godinez, Pedro de Aguillon, Lupe Carriles

 

THEMA MONSTRES MARINS

Ismael Rodriguez et Edouard Nassour avaient ouvert la brèche du western fantastique mexicain en 1956 avec La Montagne mystérieuse, dans lequel les propriétaires d’un ranch se retrouvaient nez à nez avec un saurien préhistorique. Un an plus tard, le scénariste Ramon Obon imagine le personnage de Gaston, un cow-boy détective flanqué d’un faire-valoir comique, et Rafael Baledon porte à l’écran leurs premières aventures dans cet inénarrable Monstre du marécage. D’emblée, le cinéaste installe une ambiance oppressante du meilleur effet. « Le Marécage aux Âmes » qui donne son nom au titre original est un point d’eau sinistre que doivent traverser à la barque Maria et Ignacio, respectivement l’épouse et le frère de Fabrique Mendoza qui vient de succomber à la peste. La musique de Gustavo Carrion, les cris sinistres des oiseaux et ce crâne grimaçant savamment disposé à l’avant-plan nous mettent immédiatement dans le bain. Avant que le corps ne soit mis en terre, son fils Adrian demande à voir une dernière fois son père. Et là, surprise : le cercueil est vide !

Gaston mène l’enquête et son esprit cartésien se heurte bien vite aux croyances locales. « Mon mari est mort et les âmes l’ont emporté pour son châtiment éternel » : telle est l’opinion de Maria, qui en veut toujours à Fabrique de l’avoir épousée pour son argent. Même le médecin du village y va de sa petite phrase nébuleuse : « il est des forces surnaturelles que la culture moderne ne comprend pas. » En fait, Gaston soupçonne une arnaque à l’assurance et reste persuadé que le corps a été subtilisé au moment opportun. A moins que Fabrique lui-même ne soit dans le coup… Julietta, amie d’enfance du beau cow-boy et nièce du défunt, partage cette théorie. Parallèlement à l’enquête, et de la manière la plus incongrue qui soit, un monstre marin surgit régulièrement du marécage pour attaquer les autochtones et terrifier nos héros.

L’étrange créature du Far West

Démarcage très maladroit de L’Étrange créature du lac noir (qui triomphait trois ans plus tôt sur les écrans du monde entier), cet homme-poisson est engoncé dans un costume caoutchouteux parfaitement grotesque, tandis que sa tête disproportionnée et rigide arbore de gros yeux fixes, une gueule immobile et deux espèces d’oreilles d’écureuil du plus curieux effet parachevant son costume de carnaval. Autant dire qu’à chacune de ses apparitions, le film sombre aussitôt dans le ridicule, notamment lorsque le valeureux Gaston l’affronte sous l’eau, un couteau à la main, à la manière de Johnny Weissmuller affrontant des crocodiles en caoutchouc dans les bons vieux Tarzan. L’aspect improbable du monstre et certains de ses comportements anthropomorphiques (il utilise un harpon pour attaquer les héros, ainsi qu’un télégraphe pour communiquer !) trouvent leur explication au moment de la révélation finale. Mais celle-ci, au lieu de justifier la présence de la créature dans le scénario, la rend au contraire définitivement absurde, voire tout à fait inutile. Au second degré, Le Monstre du marécage se savoure donc sans modération, et son succès fut suffisant pour entraîner une nouvelle aventure fantastique de Gaston deux ans plus tard, Le Cri de la mort.

 

© Gilles Penso


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