DAY THE WORLD ENDED (1956)

Roger Corman tourne avec un budget ridicule la mésaventure de sept survivants de la fin du monde menacés par un mutant monstrueux et affamé…

DAY THE WORLD ENDED

 

1956 – USA

 

Réalisé par Roger Corman

 

Avec Richard Denning, Lori Nelson, Adele Jergens, Mike Connors, Paul Birch, Raymond Hatton, Paul Dubov, Jonathan Haze

 

THEMA MUTATIONS

Comment raconter les ravages d’un holocauste nucléaire sur toute la surface de la planète et la mutation d’hommes en créatures monstrueuses lorsqu’on ne dispose que de neuf jours de tournage, de sept acteurs et d’un budget de moins de 100 000 dollars ? Réponse : en confiant le film à Roger Corman ! Et tandis que le producteur James H. Nicholson prépare une campagne publicitaire alléchante laissant imaginer un film de science-fiction spectaculaire garni de monstres baveux, Corman, alors aux commandes de son quatrième film en tant que réalisateur, s’acquitte sans complexe des moyens anémiques à sa disposition pour conter ce drame pessimiste, dont le texte d’introduction nous annonce qu’il commence par la fin. En effet, après quelques stock-shots d’explosions atomiques, nous apprenons que le monde a été contaminé par les radiations, et que les survivants sont rares. Le capitaine Maddison (Paul Birch, héros de The Beast with a Million Eyes) et sa fille Louise (Lori Nelson, vue dans La Revanche de la Créature) ont réchappé à la catastrophe et se réfugient dans leur petite maison au milieu des bois.

Ces deux rescapés miraculeux sont bientôt rejoints par d’autres survivants qui n’échappent ni aux archétypes, ni à la caricature : Tony, un gangster à l’accent italien (Mike Connors, futur héros de Mannix), sa copine strip-teaseuse Ruby (Adele Jergens), le beau et blond géologue Rick (Richard Denning, vu dans L’Étrange Créature du lac noir), le vieux chercheur d’or Pete (Raymond Hatton), et un homme nommé Radek (Paul Dubov), en partie contaminé. Celui-ci a le visage à moitié défiguré, et il réclame instamment de la viande rouge, seule susceptible de le soulager. Le huis-clos s’avère rapidement étouffant, la tension montant peu à peu entre les protagonistes. Bientôt, il devient évident que les sept survivants ne sont pas seuls et qu’une entité étrange rode à proximité, prête à fondre sur eux. D’après le capitaine Maddison, il s’agit d’un mutant. Car lui-même a assisté à des essais nucléaires sur des animaux. Tous ont péri, sauf trois spécimens victimes alors de terribles mutations. Rien n’empêche donc d’imaginer que la chose dehors est un homme transformé par les radiations.

Le début de la fin

Lorsqu’enfin la bête montre le bout de son nez, les amateurs de rire au second degré ne sont guère déçus, tant son costume s’avère grotesque. Conçu et interprété par Paul Blaisdell, le mutant est une espèce de bibendum au front cornu, au museau pointu, aux trois yeux globuleux et aux nombreux bras qui pendouillent assez lamentablement. Comme il se doit, le monstre emporte dans ses bras la belle blonde du film puis est pris en chasse par l’intrépide héros. Faute de temps et de budget, Corman réduit donc l’action à deux décors (la maison et les bois avoisinants) et opte pour une mise en scène statique, quasi-théâtrale. Comme visiblement le scénario n’offre pas matière à maints développements, les situations finissent par se répéter jusqu’à la lassitude complète du spectateur. Ainsi Tony ne cesse-t-il de déclarer en vain sa flamme à Louise, Ruby n’en finit-elle pas de danser sur le même disque de swing et le capitaine ne se lasse-t-il pas de délivrer des dialogues sentencieux à fort caractère biblique. Reste à sauver une atmosphère oppressante plutôt réussie et un dénouement ouvert sur de nouveaux Adam et Ève, le film ne s’achevant pas, une fois n’est pas coutume, par « The End » mais par « The Beginning ».

 

© Gilles Penso


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