Cette suite de La Maison des 1000 morts et The Devil’s Rejects n’arrive pas à la cheville de ses prestigieux modèles…
3 FROM HELL
2019 – USA
Réalisé par Rob Zombie
Avec Sehri Moon Zombie, Bill Moseley, Sid Haig, Richard Blake, Danny Trejo, Dee Wallace, Daniel Roebuck, Jeff Daniel Phillips, Pancho Moler, Jackie S. Garcia
THEMA TUEURS I SAGA FIREFLY FAMILY
Rob Zombie a démarré sa carrière de cinéaste très fort. Trop fort, peut-être. En guise de baptême du feu, La Maison aux 1000 morts et The Devil’s Rejects étaient deux coups de maître, le second surpassant même le premier par son audace, sa crudité et son jusqu’auboutisme. Tous les regards braqués sur lui, le barbu métalleux promu nouveau pape du cinéma d’horreur ne risquait-il pas de décevoir faute de pouvoir encore se surpasser ? Sa double relecture de l’Halloween de John Carpenter portait encore en germe d’indiscutables coups de génie. Mais Lords of Salem eut du mal à convaincre. Quant à 31, il sentait déjà la redite maladroite. Pour regagner les faveurs du public et retrouver ses personnages fétiches, Zombie décide alors de doter ses deux premiers films d’une suite, muant du coup la « saga » de la famille Firefly en trilogie. Malheureusement, Sid Haig, inoubliable Captain Spaulding clownesque et macabre, est alors très malade, se remettant difficilement d’une opération compliquée. Le réalisateur est contraint de réduire drastiquement son rôle. Le film s’appelle pourtant 3 From Hell (« Les trois de l’enfer »), succédant logiquement à The Devil’s Rejects (« Les rebuts du diable »). Spaulding étant hors-jeu, qui sera le troisième larron ? Zombie crée alors un nouveau personnage, Winslow Coltrane, surnommé « Le loup-garou de minuit », demi-frère des infernaux Otis et Baby. Le rôle échoit au charismatique Richard Brake, déjà présent dans Halloween 2 et 31.
Le début du film se raccorde directement avec la fin de The Devil’s Rejects. Nous sommes le 23 mai 1978. Baby, Otis et Captain Spaulding, laissés pour morts suite à leur altercation avec la police, ont miraculeusement survécu à leurs blessures. C’est déjà une facilité scénaristique difficile à avaler. Les voilà donc incarcérés et jugés coupables pour leurs crimes, même si l’opinion publique leur est en partie favorable, voyant chez eux le symbole d’une certaine liberté et d’une lutte contre le système. Fascinés, leurs admirateurs scandent même le slogan « Free the Three » (« Libérez les trois ») qui se répand comme une traînée de poudre. Comme tout effet de mode, l’engouement finit par se tarir et nos trois psychopathes croupissent pendant dix ans dans le couloir de la mort. Alors que l’heure de l’exécution approche à grands pas, la situation bascule. Suite à une évasion musclée avec perte et fracas, une série de cadavres ensanglantés s’apprête une fois de plus à joncher la route des « rebuts du diable »…
Le film de trop ?
Comme toujours, Zombie soigne la patine de son film, s’amusant cette fois-ci avec les codes visuels des années 80, du moins dans la première partie du métrage où de fausses images d’archive (reportages, émissions TV, documentaires) viennent s’insérer dans le montage. Mais trouver la bonne tonalité de ce troisième opus n’est visiblement pas une chose simple. Avec La Maison des 1000 morts et The Devil’s Rejects, il avait abordé la folie de ses personnages sous deux facettes complémentaires : l’exubérance baroque d’un côté, la furie brute de l’autre. Quel style adopter cette fois-ci ? Dans le doute, il force le trait, laisse ses acteurs surjouer (surtout Sheri Moon qui en fait clairement trop, comme si elle se muait en émule de l’Harley Quinn de Suicide Squad). Il semble surtout que Zombie n’ait plus grand-chose à raconter autour des Firefly. Il lance donc des idées en l’air sans les exploiter, comme la folie de Baby la poussant à avoir des hallucinations poétiques (le chat qui danse), ou cette tentative isolée et un peu vaine de déstructurer totalement la chronologie d’une séquence pour tenter de varier les plaisirs. La violence et la brutalité sont toujours de la partie, mais la spontanéité semble s’être effacée. D’autant qu’à partir de sa deuxième moitié, le scénario de 3 From Hell stagne et se laisse couler, s’appuyant sur une sorte d’atmosphère de western spaghetti mexicain en évacuant peu à peu ses apparats de film d’horreur. Voilà donc sans conteste le film de trop, qui aura été endeuillé par le décès de Sid Haig, mort à peine cinq jours après sa sortie en salles.
© Gilles Penso
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